Le puissant gouvernement de l'État semi-autonome du Puntland a annoncé lundi 9 janvier, dans un communiqué, " agir désormais en tant que gouvernement indépendant ". Il dit attendre qu'une Constitution fédérale pour la Somalie soit enfin achevée. Cette annonce survient dans un contexte de tensions entre le président fédéral somalien élu en mai dernier, Hassan Cheikh Mohamoud, et le président du Puntland, Said Abdullahi Deni, battu à la dernière élection présidentielle.
D'emblée, le communiqué du gouvernement du Puntland insiste sur son attachement à la Somalie. Signant d'ailleurs ses trois pages de justification sous l'intitulé " Gouvernement puntlandais de Somalie ", il rappelle ses " efforts depuis 18 ans " pour " poser les bases d'édification du système fédéral " et son soutien " financier et militaire " aux gouvernements successifs ayant siégé à Mogadiscio.
Mais il se prévaut de la Constitution - encore provisoire - de la Somalie et de celle du Puntland pour affirmer désormais son " droit d'agir en tant que gouvernement indépendant " tant qu'une Loi fondamentale régissant l'ensemble de la Somalie n'a pas été complétée et ratifiée par référendum. Un chantier ouvert en 2012 et jamais achevé, bien que le président Hassan Cheikh Mohamoud a récemment annoncé vouloir le ranimer.
La Somalie est toujours " un État en transition ", rappelle Matt Bryden, conseiller stratégique du centre d'analyses Sahan Research, basé à Nairobi. " Ce que le Puntland a décidé est fondé en droit et n'est pas surprenant pour qui observe la situation politique somalienne ", dit-il. La question est de savoir pourquoi maintenant.
Or les tensions sont allées grandissantes ces derniers mois entre Mogadiscio et le Puntland, sur la question de la répartition des pouvoirs politiques, judiciaires et sécuritaires, sur l'exploitation des ports de Bossasso et Berbera et des ressources naturelles, et le droit de nouer des partenariats avec l'étranger, notamment pour l'exploitation du pétrole.
Les récentes rencontres entre les deux chefs d'État, selon leur entourage, se seraient mal passées. Le président du gouvernement de Mogadiscio a en effet multiplié, depuis l'été dernier, les décisions prises au nom d'une Fédération somalienne encore à construire, ce que les autorités de Garowe ont perçu comme une tentation dirigiste des autorités fédérales.
Après sa défaite à l'élection présidentielle, le président du Puntland semble donc considérer qu'il n'a pas été " suffisamment compensé ", estime Matt Bryden. Il entend " réfréner la tentation centralisatrice " de son rival, le très populaire Hassan Cheikh Mohamoud, qui engrange des victoires militaires sur les jihadistes shebabs et bénéficie d'une excellente réputation à l'étranger. " Il rappelle ainsi, en même temps, que le Puntland demeure un pilier de l'État fédéral et que la Somalie a toujours des problèmes sérieux à régler. "