A la suite des mesures prises par l'Etat du Sénégal pour prévenir les accidents de la circulation, au lendemain de la catastrophe routière ayant fait quarante morts à Sikilo, les transporteurs de Sédhiou qualifient ces engagements du gouvernement d'incongrues prises dans la précipitation. Que ce soit l'interdiction de circuler la nuit, l'importation des pneus de seconde main ou la suppression des porte-bagages, ces transporteurs s'en offusquent et interpellent les pouvoirs publics à revoir leur copie.
Sur l'essentiel des 22 mesures prises en Conseil interministériel, le lundi 9 janvier 2023, à la suite de l'accident meurtrier de la circulation survenu la veille dimanche à Sikilo, les transporteurs de Sédhiou déclarent ne pas être convaincus de leur pertinence et s'offusquent de la précipitation, disent-ils, avec laquelle ces mesures ont été prises. D'abord, sur l'interdiction de rouler la nuit, entre 23h et 5h du matin, Sérigne Abdou Mbengue et El Hadji Ibrahima Dramé, tous deux transporteurs interurbains font observer que "vouloir concentrer le déplacement des transports en commun des voyageurs par la route à seulement la journée n'a aucun sens ; mais c'est plutôt une source d'insécurité car dès le lever du jour, tout le monde voudra sortir en même temps. Je pense que c'est surtout cette option qui présente plus de risques. Nous pensons que l'Etat s'est vraiment précipité à ficeler des mesures restrictives, alors qu'il doit prendre le temps d'étudier la question et dans toutes ses formes pour obliger tout le monde à respecter les consignes rationnelles", ont-ils soutenu, lors d'une interview hier à la gare routière de Sédhiou.
Et de poursuivre, sur cette même lancée : "en plus, des urgences peuvent se poser aux citoyens à tout moment. Je pense qu'il faut plutôt réglementer le mouvement des populations que de vouloir confiner les gens la nuit. Et je suis sûr qu'au même moment, certains se livreront à un transport clandestin de voyageurs, avec des véhicules particuliers qu'on appelle "War Gaïndé".
"LES PNEUS DE SECONDE MAIN TIENNENT MIEUX QUE LES NEUFS D'ICI"
Au sujet de l'interdiction de l'importation des pneus, ils soutiennent que ceux appelés "Venant", ou de seconde main, sont quelques fois plus solides que les neufs, selon leur lieu de fabrication. "Les pneus neufs coûtent excessivement chers et souvent les "venants d'Europe" sont plus solides que ceux vendus chez nous, au Sénégal. Les pièces de rechange, généralement vendues au Sénégal, sont plus fragiles que celles importées ; donc, sans conteste que les pneus de seconde main tiennent mieux que les neufs d'ici", insistent-ils.
Pour ce qui est de la suppression des porte-bagages, les transporteurs de Sédhiou trouvent également que c'est une mesure radicale du fait que chaque passager se déplace avec sa valise. "Je me demande comment peut-on faire le transport en commun sans des véhicules avec porte-bagages. Autant exiger la limitation de la vitesse que de supprimer les porte-bagages et laisser les passagers dans le désarroi", s'inquiète Serigne El Hadji.
Pour certains, il faut prendre le temps nécessaire et adapter les nouvelles dispositions à la réalité du terrain, pour éviter des cas de tricherie sur la voie publique. D'autres demandent à ce que le contrôle routier soit tout simplement renforcé et sans complaisance.