Alors que beaucoup s'attendaient à une baisse des prix du carburant, tel n'a pas été le cas. La raison : le Petrol Pricing Committee (PPC) a décidé de maintenir le prix de l'essence et d'augmenter celui du diesel. Mais le ministre du Commerce Soodesh Callichurn a usé de ses prérogatives pour bloquer la hausse du prix du diesel.
L'issue de la réunion du PPC était attendue jeudi, le comité devant trancher sur les prix. Or, ce n'est qu'hier à la mi-journée que le communiqué émis a dévoilé que les prix restaient inchangés, alors que beaucoup redoutaient une hausse ou s'attendaient à une baisse.
Selon le document de la State Trading Corporation (STC), des fonds sont disponibles dans le Price Stabilisation Account (PSA) pour permettre une baisse vu que le prix de référence est de 827.33 dollars par tonne métrique et permettait de financer une baisse d'environ Rs 6. Or, le prix de l'essence est resté inchangé à Rs 74.10.
Quant au diesel, le prix de référence par baril est de 115.38 dollars. De ce fait, le prix du diesel aurait dû augmenter pour atteindre Rs 61.40 le litre, contre Rs 54.55 actuellement. À savoir une hausse de Rs 6.85 le litre, soit 12.5%. Or, vu que le Petroleum Pricing Mechanism plafonne la hausse à 10%, le prix aurait dû être de Rs 60 le litre. Mais le ministre a décidé de faire fi de la recommandation du PPC et de bloquer la hausse de prix.
La conséquence directe de cette décision est que le déficit pour la STC se chiffre à Rs 5.91 sur chaque litre de diesel. D'autant que le comité note que l'épuisement du PSA continue au fil des exercices. La raison : la hausse des prix des carburants est plus de 10% plafonnés. De ce fait, les fonds sont épuisés vu qu'il faut répercuter le prix sur les finances de la STC au lieu des consommateurs. Le déficit du Price Stabilisation Account s'élève à Rs 4,4 milliards au 12 janvier.
Évidemment, ce statu quo n'a pas fait plaisir à la société civile, à l'Association des Consommateurs et aussi aux Mauriciens. La baisse du prix sur le marché mondial et quelques ajustements, beaucoup s'attendaient à une baisse après les hausses vertigineuses de 2021. Toutefois, le dollar qui est fort à Rs 45.3 vis-à-vis de la roupie a un effet sur les coûts à l'achat des cargaisons de carburants.
Hier, certains redoutaient une hausse et se sont rendus aux stations-service. Les automobilistes avaient l'espoir d'une baisse des prix suite à la grève de la faim de l'éducateur Nishal Joyram.
Réactions
L'ex-gréviste Nishal Joyram : "Très mauvaise décision"
"C'est une très mauvaise décision qui continue de faire suffoquer le peuple. Le gouvernement avait mis en attente la population pour une baisse. Mais l'incompétence dans les actions, les dépenses et les projets font que le prix est maintenu. Le dollar est stable, le fret a baissé et le prix a chuté de 40% sur le marché mondial. Il n'y a rien qui empêche de baisser le prix, sauf les dépenses suite à l'incompétence. Pour ce qui est de la désobéissance civile, ce sera une action citoyenne et pacifique. Je vais rencontrer les membres du comité de soutien et d'autres membres de la société civile pour dégager une stratégie que j'ai annoncée."
Jayen Chellum, secrétaire général de l'Association des consommateurs de l'ile Maurice (ACIM) : "Adding insult to injury"
"Les prix des carburants sont en train de dégringoler sur le marché mondial. Le ministre a outrepassé son rôle en maintenant un prix élevé. J'ai entendu la déclaration du directeur de la STC, c'est "adding insult to injury" au sujet du maintien des prix. Alors que tout le monde s'attendait à une baisse. Nous allons annoncer notre prochaine action. Une chose est sûre, nous n'allons pas rester les bras croisés."
Bhimraj Sunnasee, président de la Petrol Retailers Association (PRA) : "Inconcevable"
"Nous sommes déçus de la décision de la STC. Lorsque le prix était de 120 dollars, nous avons tous payé. Aujourd'hui, le cours est d'environ 79 dollars et on paie le litre au même prix, c'est inconcevable. Il faut dire que nos coûts d'opération augmentent et que le volume de vente baisse à cause du maintien des prix. D'autant que la facture d'électricité va augmenter en février. De plus les propriétaires des stations-service devront payer la compensation salariale. Il y a eu une promesse que notre marge de profit sera revue et indexée sur le coût de la vie. J'espère qu'on ne devra pas aller en justice."
Rajiv Servansingh, directeur général de la State Trading Corporation (STC) : "On continue de perdre de l'argent sur le Price Stabilisation Account"
"L'attente de la population est basée sur un produit, soit l'essence. Il y a eu effectivement une baisse du prix du pétrole sur le marché. Par contre, personne ne parle du prix du diesel qui est largement subventionné par la STC. Nous importons 210 000 tonnes de MOGAS (essence) et 230 000 à 240 0000 tonnes de diesel. On continue de perdre de l'argent sur le PSA et cela empire. Si on dit que l'essence aurait dû baisser, il faut qu'on admette que le diesel aurait dû augmenter aussi, vu que c'est le même mécanisme et la même méthodologie utilisés pour calculer le prix du diesel.".
Yasdev Yapsy, consommateur
"Le pouvoir d'achat sera encore érodé. Des coûts d'importation et de transport des commodités vont continuer d'augmenter avec le statu quo. Les Mauriciens vont devoir puiser de leurs économies pour pouvoir faire les achats des produits de consommation."
Oumesh, motocycliste et habitant de La Caverne
"Le prix aurait dû baisser pour soulager le peuple. Je suis défavorable à ce maintien moi qui suis un usager d'une moto. Je dois faire le plein et ce n'est pas évident."
Vikram de Midlands, chauffeur de taxi
"J'aurais aimé que les autorités baissent le prix des carburants, car l'essence est vraiment trop chère. Il y a un impact sur mon business, car les clients ne veulent pas payer les prix des courses. De ce fait j'ai moins de clients."