Le bilan de l'accident d'une rare violence survenu, lundi 16 janvier 2023, dans la commune de Sakal (région de Louga), entre un car " Ndiaga Ndiaye " et un camion, fait état de 22 morts et 23 blessés dont sept dans un état grave.
L'accident, qui a coûté la vie à 22 personnes, est survenu dans la matinée du lundi 16 janvier sur la Route nationale numéro 2, entre les villages de Ndiambe et Ndièye Niang, dans la commune de Sakal (département de Louga). Il était environ 5h 30 du matin lorsque le car " Ndiaga Ndiaye ", immatriculé AA 154 GE TH, communément appelé " horaire ", a quitté le village de Nguick Fall, rempli de voyageurs. Ces derniers rentraient de la célébration d'un baptême à destination de Dakar. Il est entré en collision avec un camion qui roulait en sens inverse.
Voulant éviter un âne aperçu au milieu de la route à quelques kilomètres du village de Ngueune Sarr, le chauffeur s'est retrouvé frontalement avec un camion immatriculé DK 6507 N. Malgré les manœuvres du conducteur du camion pour éviter le car, le choc n'a pas pu être évité. La violence de la collision a éjecté quasiment tous les occupants du car hors du véhicule.
Alertées, les populations riveraines, qui se sont précipitées sur les lieux de l'accident, ont dénombré 19 personnes décédées sur le coup. Babacar Lèye, chauffeur de son état et témoin de l'accident, raconte : " nous avons été réveillés par le bruit du choc vers cinq heures du matin. Lorsque je suis arrivé sur les lieux, avant même les sapeurs-pompiers et les gendarmes, nous avons trouvé beaucoup de morts et avons cherché à assister les blessés qui se tordaient de douleur avec des cris fusant de partout ".
À leur arrivée, les éléments de la 52e Compagnie d'incendie et de secours de Louga, 19 personnes avaient déjà perdu la vie sur place. Seize parmi les blessés ont été évacués à l'hôpital régional Ahmadou Sakhir Mbaye de Louga, aux urgences de la structure sanitaire qui a été prise d'assaut par les populations de la commune de Sakal pour l'identification des victimes. Quelques heures plus tard, deux autres blessés ont rendu l'âme et un autre a succombé à ses blessures au cours de son évacuation à Dakar, portant le nombre de décès à 22.
La morgue de l'hôpital régional Ahmadou Sakhir Mbaye de Louga n'ayant pu accueillir tous les corps, ils ont été identifiés et acheminés dans les morgues des différentes mosquées de la commune de Louga, en attendant les permis d'inhumer.
Sept évacuations à Dakar par hélicoptère, trois à Saint-Louis
Parmi les victimes de l'accident qui s'est produit, hier, dans la commune de Sakal et ayant fait 22 décès, certains blessés étaient dans un état tel que le Gouvernement, par l'entremise du Ministère de la Santé et de l'Action sociale, a affrété un hélicoptère pour évacuer sept d'entre eux à Dakar, notamment dans les hôpitaux Dalal Jamm et Idrissa Pouye de Grand Yoff. L'évacuation s'est faite en présence du Ministre de l'Intérieur, Antoine Félix Diome, et celui des Infrastructures, des Transports terrestres et du Désenclavement, Mansour Faye. Ils ont rallié les lieux de l'accident tôt dans la matinée d'hier pour constater de visu l'ampleur des dégâts avant de se rendre en début d'après-midi au stade Alboury Ndiaye de Louga d'où devaient être embarquées les victimes par hélicoptère à destination de Dakar.
Malheureusement, un des blessés est mort au cours de son évacuation, portant à 22 le nombre de décès, a informé le service de communication du Ministère de la Santé et de l'Action sociale. Mais auparavant, dans la matinée, trois blessés sérieux ont été transférés à l'hôpital régional de Saint-Louis où ils sont pris en charge. Ce qui porte à 10 le nombre de victimes de l'accident évacuées et prises en charge dans d'autres structures sanitaires en dehors de l'hôpital régional Ahmadou Sakhir Mbaye de Louga.
Au total, l'accident du lundi 16 janvier sur la Route nationale n° 2 a fait 22 décès, sept blessés graves évacués à Dakar, trois autres à l'hôpital régional de Saint-Louis et 15 sont pris en charge aux urgences de l'hôpital régional Ahmadou Sakhir Mbaye de Louga. KH. A. WELE
Macky Sall souligne la nécessité de " renforcer les mesures de sécurité routière "
En une semaine, le Sénégal a connu deux accidents tragiques. Après celui de Sikilo et ses 42 morts, 22 personnes ont péri, hier, sur la route, à l'entrée de Ngeun Sarr, dans la commune de Sakal. À travers un tweet, le Président de la République, Macky Sall, s'en est fortement ému après avoir présenté ses condoléances aux familles éplorées et souhaité prompt rétablissement aux blessés : " encore un autre accident mortel sur nos routes ". Cela met en évidence, d'après le Chef de l'État, la nécessité de " renforcer les mesures de sécurité routière ".
Alassane Aliou Féré MBAYE
AMADOU BA, PREMIER MINISTRE
" Les mesures prises par l'État seront appliquées dans toute leur rigueur "
Le Premier ministre, Amadou Bâ, était, hier, à Louga, suite à l'accident qui a coûté la vie à 22 personnes. Une occasion, pour lui, de réitérer l'engagement du Gouvernement à appliquer les mesures issues du dernier Conseil interministériel, tout en étant ouvert au dialogue avec les transporteurs.
Accompagné des Ministres Moussa Bocar Thiam, Antoine Félix Diome, Mansour Faye, Moustapha Diop, Samba Ndiobène Kâ, le Premier ministre, Amadou Bâ, s'est rendu, hier, à l'hôpital régional Ahmadou Sakhir Mbaye de Louga pour " apporter le soutien et les condoléances du Président de la République, aux victimes de l'accident ". Cette visite était l'occasion, pour lui, de rappeler le dernier accident de Sikilo qui avait coûté la vie à 42 personnes. Cet accident tragique avait provoqué la tenue d'un Conseil interministériel sur la sécurité routière à l'issue duquel 23 mesures fortes avaient été prises.
47 passagers au lieu de 32
Et pour le Premier ministre, " ces mesures seront appliquées avec toute la rigueur requise, et ce, dans un cadre de dialogue avec les chauffeurs et les transporteurs ". Se voulant plus explicite, il a dévoilé les manquements révélés par les enquêtes sur l'accident qui a coûté la vie à 22 personnes, hier, dans la commune de Sakal, avec des irrégularités constatées sur un des véhicules. " Sur la carte grise du car, il est autorisé le transport de 32 personnes alors qu'il y avait quinze passagers de plus, portant le nombre à 47 ", a-t-il déploré. Suffisant pour que le Premier ministre rappelle la nécessité, pour l'État, de travailler à " sauvegarder l'intégrité physique des citoyens au-delà des intérêts particuliers ".
Pour cela, il a rappelé la nécessité du renouvellement du parc automobile, mais aussi l'épineuse question des " visites techniques " des véhicules de transport public. Sur ce point, tout en reconnaissant la responsabilité des services de l'État, Amadou Bâ a promis d'apporter " toutes les corrections nécessaires " qui incluent, selon lui, un accompagnement tout en insistant sur l'impératif du renouvellement du transport public interurbain. Cela passera, à ses yeux, par de " larges concertations " entre les acteurs concernés : " Il y a beaucoup de mesures à mettre en œuvre pour moderniser le transport, dont l'objectif, pour le Gouvernement, est de sécuriser les voyageurs ". KH. A. WELE (Correspondant)
Nettoyer les écuries d'Augias, des routes aux bureaux
La vague d'émotion suscitée par le terrible accident de Sikilo (42 morts) n'est pas retombée qu'un autre endeuille le Sénégal. Presque une semaine, jour pour jour. Cette fois-ci, le choc frontal entre un minicar et un camion (22 morts) a eu lieu sur la route nationale 2, entre Louga et Saint-Louis qui, avec le tronçon de la nationale 1, entre Kaolack-Tambacounda, reste l'axe le plus accidentogène du pays. Plus de soixante morts, en janvier, l'année 2023 est partie sur des bases macabres. Et comme nous l'écrivions dans un précédent article, à ce rythme, elle va battre tous les records de morts sur les routes. Le dire n'est pas faire les oiseaux de mauvais augure, mais le constat implacable d'une évidence qui n'échappe à personne, sauf à vouloir se comporter comme l'autruche : refuser de voir la réalité. Une réalité qui va continuer à nous rattraper, de manière dramatique, pour nous rappeler notre laxisme, notre inconséquence, notre indolence.
Si, après avoir pris 23 mesures après l'accident de Sikilo, l'État du Sénégal a pensé faire volte-face devant le chantage d'une partie des transporteurs, l'accident de Sakal devrait l'en dissuader. Cela peut paraître indécent de le dire en de pareilles circonstances, mais cette énième tragédie démontre toute la pertinence et l'urgence d'appliquer ces mesures dans toute leur rigueur. C'est l'occasion ou jamais de remettre de l'ordre dans le secteur des transports au Sénégal, mais surtout de mettre fin au diktat des transporteurs sénégalais, habitués à se braquer et à prendre en otage le pays, au moindre petit prétexte.
Après l'accident de Sakal, vont-ils encore pousser l'indécence jusqu'à mettre à exécution leur menace de grève ce mardi ? Venant de cette caste prête à sacrifier les Sénégal sur l'autel de ses intérêts pécuniaires, rien ne nous surprendrait. Ils ont déjà montré que, ce qui compte, c'est d'abord leurs poches, ensuite leurs poches, enfin leurs poches, avant la vie de leurs compatriotes.
À chaque fois, ils usent de menaces. C'est comme ça qu'en février 2020, ils ont obtenu de l'État la suspension des amendes sur le contrôle de la charge à l'essieu, au détriment de nos routes qui vont ainsi continuer à ployer sous le poids des camions surchargés. L'année suivante, ils ont poussé l'État à lâcher du lest sur les contrôles routiers. Et aujourd'hui, ils demandent l'annulation des 23 mesures.
Autrement dit, ils réclament un permis pour continuer à tuer. Ces regroupements d'intérêts privés ont même, une fois, menacé d'aller en grève, au motif que l'État, à travers Dakar Dem Dikk et les bus Sénégal Dem Dikk, leur menait une concurrence déloyale. Eux qui, sans jamais investir vraiment dans l'achat de nouveaux bus comme leurs homologues du Mali, veulent toujours gagner gros à petit frais. Renouveler leurs parcs, ils n'y pensent jamais.
Il n'y a qu'à regarder ce que sont devenus les bus de transports en commun appelés " Tata " mis en circulation à partir de 2005 avec le soutien financier de l'État. Qui aurait pensé que quinze ans plus tard, des milliers de Dakarois leur préfèreraient encore les " cars rapides " et " cars Ndiaga Ndiaye ", dont la mort avait été annoncée ?
Personne. Un peu plus d'ordre et de professionnalisme dans le secteur des transports ne seraient pas de trop, tout le monde y gagnerait. Cette mission, l'État doit l'assumer, et ce, quoi qu'il lui en coûte. Mais encore faudrait-il que les services de l'État, de leur côté aussi, acceptent de se départir de certaines pratiques malsaines liées notamment à la délivrance des titres de transport. Le nettoiement des écuries d'Augias doit ainsi concerner le secteur dans son ensemble, des bureaux aux routes.