Les chefs des Églises au sein du FFKM ont présenté leurs vœux du Nouvel An au président de la République, hier, à Ambohitsorohitra. L'image qui en ressort tranche avec les débats enflammés suite au culte de la FJKM dimanche.
Se placer au-dessus de la mêlée. Vraisemblablement, c'est l'image qu'ont voulu montrer Andry Rajoelina, président de la République, et les quatre chefs des Églises au sein du Conseil œcuménique des Églises chrétiennes de Madagascar (FFKM). Selon l'adage, une image vaut mille mots. Depuis dimanche, les différentes factions au sein de l'opinion publique, selon son obédience politique, s'écharpent suite à l'homélie et une prière prononcées durant le culte de l'église réformée de Madagascar ou FJKM, au Coliseum, à Antsonjombe. L'information et la photo d'une rencontre entre le chef de l'État et les dirigeants du FFKM au palais d'État d'Ambohitsorohitra, hier, pourrait arbitrer cette pétaudière, dans le sens d'une conciliation des extrêmes.
Le motif de la rencontre d'hier est une présentation des vœux des chefs d'Églises au président de la République, à l'occasion du Nouvel An. Seulement, difficile de ne pas faire un rapprochement avec le contexte politique du moment. Bien qu'imagée, l'homélie prononcée par le pasteur Zaka Arimasy Andriamampianina, vice-président du bureau central de la FJKM, et la prière dite par le pasteur Georges Henri Randriamamonjisoa, conseiller auprès du bureau central de la FJKM, sonnent comme une charge frontale contre les tenants du pouvoir.
Depuis cette épisode, les partisans du pouvoir et ceux qui sont contre ou qui critiquent celui-ci, sont divisés sur le sujet. La présentation des vœux d'hier, à Ambohitsorohitra, s'est tenue à huis clos. La rencontre a, toutefois, été officialisée sur la page Facebook du président de la République. Les quelques mots qui accompagnent la publication donnent une idée de l'objectif derrière "le rapprochement" d'hier.
Impartialité
"Cette rencontre témoigne de l'importance de l'œcuménisme et de la cohésion entre les différentes confessions dans le pays. C'est en étant solidaire que nous allons construire un avenir rayonnant et heureux pour notre île. Je suis particulièrement reconnaissant envers tous les dirigeants au sein des Églises pour leur volonté à faire régner la solidarité et la fraternité", sont les mots de Andry Rajoelina, publiés sur sa page Facebook. Œcuménisme, cohésion, solidarité, fraternité sont ainsi mis en exergue dans la publication présidentielle. Une manière d'affirmer, probablement, que les querelles actuelles n'entament en rien les relations entre l'État et le FFKM, ainsi que les confessions qui le composent. Que l'homélie et la prière dites dimanche, à Antsonjombe, n'engagent que ceux qui l'ont prononcé et ceux qui y adhèrent ou qui les contestent. La photo qui accompagne la publication montre, justement, le pasteur Ammi Irako Andriamahazosoa, président de la FJKM et son épouse, à droite du chef de l'État.
Le numéro un de l'Église réformée de Madagascar assure aussi la présidence tournante du FFKM cette année. De par son statut, lui aussi, s'applique de prime abord à se placer au-dessus de la mêlée. Ce qui explique, probablement, sa présence à Iavoloha, le 13 janvier, lors d'un culte pour la nation. Ceci, bien que certains de ses collaborateurs au sein du bureau central de la FJKM ont une antipathie vis-à-vis du chef de l'État. Andry Rajoelina veut aussi rester au-dessus de la mêlée de prime abord. Sa publication d'hier tranche avec les contre-offensives virulentes de certains de ses partisans contre les dignitaires de la FJKM, depuis dimanche. Un point est également à souligner s'agissant de la rencontre d'hier. Il s'agit de la présence de monseigneur Odon Razanakolona, archevêque d'Antananarivo, qui représente l'église catholique au sein du FFKM.
Depuis l'épisode de l'affaire Apollo 21, il y aurait eu un froid entre l'archevêque d'Antananarivo et des ténors du pouvoir, dont le chef de l'État. Après les épisodes houleux, la rencontre d'hier pourrait ouvrir un nouveau chapitre dans les relations entre l'État et le FFKM et les confessions qui le composent "pour l'intérêt supérieur de l'État". Dans le contexte électoral où les hostilités politiques entre les différents courants seront à leur paroxysme, dont les fidèles chrétiens, l'Église aura un rôle à jouer pour atténuer les tensions et les clivages.
Le FFKM compte aussi jouer un rôle d'observateur et de balise lors de la présidentielle. Sans pour autant l'interdire de dénoncer ce qui ne va pas, la conception de la société malgache de l'Église et son statut de garant moral lui imposent l'impartialité. Les hommes d'églises sont certes des citoyens à part entière et ont le droit d'avoir leur opinion politique. En faire part n'est pas interdit. Seulement, parler au nom de l'Église implique de tenir compte de la diversité de l'opinion et de l'obédience de tous les fidèles, sans quoi, cela ne fera que renforcer les clivages.