Sénégal: Politique de gestion inachevée, déclassement - Quand l'Etat fragilise le ranch !

20 Janvier 2023

Le ranch de Dolly n'a jamais eu un statut juridique clair. En plus, le déclassement décidé par Me Abdoulaye Wade, en 2003, pour un projet agricole, a renforcé cette vulnérabilité institutionnelle du ranch.

Le 23 décembre 2018, le président de la République, Macky Sall, s'est déplacé à Dolly pour inaugurer les infrastructures qu'il a lui-même réalisées, pour redonner vie au ranch de Dolly. Il s'agissait d'un mur de clôture, d'un forage, d'une Direction des Eaux et Forêts et d'une Brigade de Gendarmerie Nationale et des pistes d'accès. Cette présence d'un chef de l'Etat, la deuxième du genre après les venues de Léopold Sedar Senghor, avait suscité un espoir chez la population.

Depuis lors, ce n'est qu'un changement qui tarde à se concrétiser, que du mirage ! Le ranch de Dolly ne se relève pas de sa longue agonie. "Le président Macky Sall qui nous a promis d'amener des agents vétérinaires, une Brigade de Gendarmerie, un poste des Eaux et Forêts. De toute notre requête, il ne reste que la compagnie des Sapeurs-pompiers", se réjouit Oumar Diallo.

Une satisfaction qui ne cache pas ses inquiétudes. "Le ranch est clôturé, mais des mesures d'accompagnement ne suivent pas. Ce qui porte atteinte à sa sécurité. Les agents en service aussi ne sont pas équipés. A force de rester à ne rien faire, ils finissent par demander une affectation et partir. Depuis 1999, le ranch va de mal en pis", déplore-t-il.

Le ranch de Dolly n'est pas aussi régi par un décret qui organise sa gestion ; cause d'un laisser-aller total. Après les nombreuses politiques de gestion sous le régime de l'ancien président Senghor, qui ont atténué les conséquences du flou juridique qui entoure son statut, la gestion de Dolly est caractérisée par une longue descente aux enfers, accentuée par le déclassement, décidé en 2003, par l'ancien président de la République, Abdoulaye Wade, au profit d'un chef religieux. La partie cédée devrait servir à des activités agricoles. Ce qui avait soulevé la colère les éleveurs.

S'ils n'ont toujours pas eu satisfaction de leur revendication (aucun document officiel n'abroge l'attribution), ils ont réussi à retarder le "projet maraboutique" ; même si la pression foncière est toujours de mise. Le ranch est ceinturé, de ses trois côtés, par des propriétés privés à usage agricole qui peuvent en tout temps, empiéter sur sa superficie ou entrainer des conflits entre éleveurs et agriculteurs à cause des animaux en divagation qui peuvent pénétrer dans les périmètres agricoles.

L'étude complémentaire sur la situation juridique du ranch de Dolly est toujours en attente et les moyens de la préservation de sa vocation pastorale du Cerfla, réalisée par l'ingénieur des Eaux et Forêts à la retraite, Abdoulaye Sy, en 2012, conclut : "les tentatives de cession d'une partie du ranch de Dolly, que les pouvoirs publics ont manifestées en 2003, ont fini par installer des sous-entendus relativement au sens juridique du statut du ranch". Une étude similaire, réalisée par la même organisation (Cerfla), en 2010, relève que la situation juridique du ranch est des plus floues.

Citant des documents disponibles auprès des services des Eaux et Forêts, elle signale que "le ranch est partie intégrante de la réserve sylvo-pastorale de Dolly et n'a jamais fait l'objet d'un déclassement. Ce n'est que par arrêté, n°4461, du 10 juillet 1955, que l'autorité coloniale avait érigé en aire protégée la réserve sylvo-pastorale de Dolly. Le classement qui portait sur 110.900 ha était dicté par le souci de préserver la végétation herbacée et arbustive en vue du développement de l'élevage, sans compromettre ses possibilités de régénération. Sa gestion était placée sous l'autorité conjointe des services de l'Elevage et des Eaux et Forêts." Plusieurs étapes ont marqué, par la suite, la gestion, avec des changements de sa tutelle.

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