Le Rwanda accuse Kinshasa d'engager des mercenaires étrangers et de vouloir se retirer des processus de paix. En RDC, on dénonce un ingérence de Kigali.
Les réactions sont nombreuses à Goma après la déclaration du gouvernement rwandais par le biais de son porte-parole, Yolande Makolo, dans un communiqué publié ce jeudi (19.01.2023).
Kigali reproche ainsi à la RDC de vouloir se retirer des processus de paix de Luanda et Nairobi.
Le Rwanda accuse son voisin de recruter des mercenaires étrangers pour préparer la guerre. Kigali fait référence à la présence depuis plusieurs semaines de soldats est-européens à Goma.
Une information confirmée mais dont les autorités congolaises donnent une interprétation différente, affirmant qu'il s'agit de personnels techniques chargés de la maintenance d'avions russes à l'aéroport de Goma.
Ingérence
Face à cette nouvelle tension verbale entre les deux pays, la population de la province du Nord-Kivu, qui se trouve en première ligne dans cette querelle, est très critique vis-à-vis de Kigali et accuse le pouvoir rwandais de s'ingérer dans les affaires intérieures de la RDC et de soutenir la rébellion du M23.
Selon Espoir Muhimuka, activiste des droits humains congolais, "le gouvernement congolais avait déjà communiqué sur la présence de certaines personnes qui sont venues pour former nos militaires sur l'utilisation des nouveaux matériels qu'on leur a donnés récemment. En quoi cette formation que va recevoir notre armée peut provoquer le Rwanda ? Nous sommes un pays souverain et indépendant, nous devons nous organiser à l'intérieur. Car le Rwanda serait content de voir notre armée demeurer sans matériel moderne et sans organisation."
Cet avis est partagé par Christian Kabamba, acteur politique de l'opposition congolaise, qui estime que le Rwanda, qui nie toujours son soutien au M23, poursuit son ingérence dans la politique congolaise. Pour lui, "la politique de la RDC ne concerne pas monsieur Kagame. De près ou de loin, le Rwanda est impliqué dans le massacre qui se déroule à Rutshuru. Pour ma part, je vois cette dénonciation de monsieur Kagame comme une peur. La peur a ainsi changé de camp."
Le M23 poursuit ses conquêtes
Cette nouvelle accusation du Rwanda pourrait aggraver les tensions entre les deux pays voisins. Mais selon l'analyste politique congolais Evariste Iragi, la réticence du M23 à respecter les résolutions de Luanda serait la principale cause de ces tiraillements politiques.
"Le M23, au lieu de cesser d'occuper de nouvelles entités, continue de conquérir d'autres cités, fonçant vers le territoire de Masisi. On apprend du jour au lendemain que des villes sont en train de tomber, ce qui n'est pas de nature à faire que les conventions conclues entre les Etats soient respectées, que ce soit dans le cadre de l'Union africaine par l'entremise du président angolais João Lourenço ou bien du facilitateur, l'ancien président du Kenya Uhuru Kenyatta", précise l'analyste politique.
Ces accusations interviennent alors que des affrontements continuent à être signalés dans la chefferie de Bwito, en territoire de Rutshuru, entre les forces armées congolaises et les rebelles du M23.