Depuis 2011, Paul Jolicœur, photographie Guet Ndar, une étroite bande de terre entre le fleuve et la mer, située dans l'ancienne capitale coloniale Saint-Louis, au Nord du Sénégal, aussi appelée la Venise africaine. Ainsi, sur une période de sept (7) ans, en se mêlant discrètement à la vie du quartier, le photographe de rue capte patiemment un éventail de moments uniques et inspirants qui deviennent le sujet de sa création artistique.
Dès lors, à travers son objectif, il découvre des compositions riches et parfois inattendues. Il explore les jeux de plans et les effets de clair-obscur à travers des rues où les murs, immensément colorés et marqués par le temps, offrent une toile de fond percutante. Contrairement aux aprioris de la photographie actuelle qui propose le détail comme objet d'exploration, l'aspect purement esthétique demeure à la base de sa démarche. "La principale motivation de l'artiste est de démontrer que la beauté et la noblesse sont au cœur même de la vie de ce modeste quartier de pêcheurs et que la caméra représente un outil incomparable pour en faire la preuve", a expliqué Alioune Kébé, commissaire de cette exposition.
"Fondé sur le chromatisme, le langage plastique de Jolicœur intègre la ligne et des croissements de lignes, toujours assez simples et visant l'essentiel. Très picturale, sa photographie dégage spontanéité et gestualité. Si son langage est autonome et son style personnel, l'un et l'autre se placent au carrefour de beaucoup d'influences notamment le fauvisme sans doute ; mais on perçoit aussi des filiations avec la peinture chinoise et vénitienne", souligne André Seleanu, à propos du travail de l'artiste dans un article paru dans Vie des Arts, au printemps 2016.
En plus, le photographe entretient un réel lien d'amitié avec les habitants du quartier ; un quartier qu'il a inlassablement parcouru, passant d'un regard fasciné à ses premiers instants, à un regard plus intime et posé qui laisse beaucoup de place aux nuances et à l'interprétation de l'observateur. La photo de Jolicœur veut suggérer un univers plastique fort et captivant. Une vision personnelle d'un microcosme africain qui ne demande qu'à être découvert. Pour lui, la photographie est une pratique quotidienne et chaque jour, son objectif est de sortir pour captiver des images du monde. Comme disait le photographe Gilles Peress "je ne crois pas les mots, je crois les images".
"Cette exposition nous interpelle aussi sur les questions environnementale, sociale, culturelle et économique de la langue de barbarie et en particulier de Guet Ndar qui se trouve être un quartier unique au monde et participe au développement économique du pays. Grâce au secteur de la pêche, ce quartier fait rentrer des milliards de francs CFA dans ce pays. Sur le plan environnemental Guet Ndar est confronté à plusieurs problèmes avec l'érosion côtière, ses habitants sont menacés et certains d'entre eux se sont même déplacés dans d'autres lieux plus sûrs à Saint-Louis. Des chercheurs ont prédit la disparition de la langue de Barbarie dans 50 ans si rien n'est fait avec l'avancée drastique de la mer", a-t-il rappelé. Face à cette situation, de multiples propositions sont faites pour sauver un quartier mythique comme Guet Ndar.
Et enfin Guet Ndar est d'une grande richesse culturelle car, au-delà de l'aspect folklorique, les régates de Saint-Louis, un sport préféré des Guet ndar-Guet ndar, véhiculent des messages implicites qui provoquent le courage et la détermination de la population de Guet Ndar. Loin de toute préoccupation commerciale, Paul offre une partie de ses photographies à la collection du CRDS et l'autre comme donation à un groupement de femmes à Guet Ndar, aux artistes du Collectif W'Art et au Centre Culturel Régional de de Saint-Louis.
Présentation de Paul Joseph Jolicœur
Artiste-photographe de rue diplômé de l'Université de Sherbrooke, en Mathématique-Informatique, Paul Jolicœur décroche un poste de géomaticien pour le programme de cartographie au ministère des Ressources naturelles du Canada, en 1985. Poste qu'il occupe jusqu'en 2015 et qui le mène jusqu'à Dakar, au Sénégal, dans le cadre d'un projet coopératif.
En 2010, il développe une véritable passion pour la photographie, en captant le quotidien des habitants de Guet Ndar, quartier de pêcheurs très animé qu'il découvre à proximité de Saint-Louis. Il s'imprègne de ce lieu et devient photographe de rue. Il braque son objectif sur cet unique quartier infiniment coloré pendant près de sept (7) ans maintenant.
À ce jour, la collection photographique de Jolicœur se compose de plus de 400 clichés. Elle se voit bonifier de séjour en séjour sur le sol africain. Initialement présentées à Guet Ndar, ses photographies ont été accueillies chaleureusement au Sénégal, Montréal, Toronto, Paris et Venise. Une histoire en images, d'un coin de pays exceptionnel, appelée à parcourir le Monde.