Sénégal: Benoît Sambou, Ministre d'État, Président de la Commission Nationale du Dialogue des Territoires - " En vérité, le Sénégal n'a pas de problème de fiabilité du fichier électoral "

28 Janvier 2023
interview

Président de la Commission nationale du dialogue des territoires, le Ministre d'État, Benoit Sambou, est, pour la mouvance présidentielle, le Chargé des questions électorales. Il revient, avec Le Soleil, sur l'actualité.

Quel bilan tirez-vous du Cycle de dialogue qui a été au cœur de l'agenda de la Cndt durant l'année 2022 ?

Le cycle de dialogue, initié par la Cndt, est une série de rencontres animées par des experts de haut niveau, à l'attention des acteurs territoriaux, qui mettent l'accent sur des questions qui intéressent la décentralisation et la coopération territoriale. Le cycle de dialogue a vocation à être un creuset de réflexions et de propositions pertinentes favorables au développement territorial.

Ces rencontres ont été l'occasion de réflexions sur des questions centrales telles que les instruments de financement de la coopération territoriale et sur les mécanismes optimaux pour une Gouvernance foncière plus efficace. Elles ont été également le lieu d'échanges pour une gestion plus efficace des ressources partagées et d'une analyse prospective de la Gouvernance des ressources pétrolières et gazières au Sénégal. Les acteurs territoriaux ont salué l'approche participative et inclusive adoptée par la Cndt et ont magnifié la teneur des échanges ainsi que les actions engagées à l'issue de ces journées thématiques au profit exclusif des populations à travers des projets d'intercommunalité envisagés dans les territoires.

Vous avez initié le Projet dénommé " le Pse des Territoires ". Quelle vision englobe ce concept ?

Le Plan Sénégal émergent (Pse), cadre de référence de toute action de développement dans notre pays, s'articule autour de projets et programmes de développement dans des secteurs-clés de l'économie nationale. Pour son opérationnalisation, plusieurs programmes majeurs ont été élaborés parmi lesquels, les nouveaux pôles urbains, le Programme d'urgence de modernisation des territoires et axes frontaliers (Puma), le Programme d'urgence de développement communautaire (Pudc), le Programme de modernisation des villes (Promovilles), la Couverture maladie universelle (Cmu), les Bourses de sécurité familiales, etc. À côté du Pse des infrastructures, nous suggérons le Pse des territoires qui sera la finalisation de la vision du Chef de l'État qui vise la transformation structurelle de notre économie, mais également la

construction de notre pays à partir de chaque territoire. En cela, la Cndt a initié un programme dénommé programme de valorisation des ressources des terroirs (Provart), comme contribution des acteurs territoriaux à l'atteinte des objectifs en s'adossant sur les indicateurs contenus dans le Pse. Il s'agit d'une approche de promotion des chaînes de valeurs des filières porteuses, agricoles et non agricoles, sous la forme de programmes ou de projets d'intercommunalité qui placeront les exécutifs et acteurs locaux au cœur de leurs propres initiatives. Le Provart promeut en réalité l'intercommunalité de projets autour de l'identification et de la valorisation de ressources partagées entre collectivités territoriales.

Les missions de la Cndt ont pour finalité de rendre nos territoires compétitifs et viables en termes de développement, conformément aux objectifs de l'Acte III de la décentralisation. Que représentent, pour vous, les impacts des changements climatiques sur nos territoires ?

Les changements climatiques constituent une des menaces au développement en ce 21e siècle. Le sens des responsabilités nous impose aujourd'hui d'avoir une approche proactive afin de préserver nos ressources actuelles, de conserver nos écosystèmes, mais également de laisser aux générations futures une planète viable. Nos territoires font face de manière différenciée aux effets induits par les changements climatiques, notamment les zones côtières face à l'érosion et à la raréfaction des ressources, les territoires frontaliers font face à la surexploitation des ressources forestières ou à l'avancée du désert. De ce point de vue, il ne saurait donc exister qu'une seule approche valable pour tous nos territoires. La Cndt s'est approprié une approche basée sur le dialogue afin d'accompagner nos collectivités territoriales dans leur stratégie d'atténuation des impacts des changements climatiques.

Le Sénégal entrera sous peu dans le cercle des pays producteurs de gaz et de pétrole. Que vous inspire le débat sur l'enjeu du contenu local ?

Il faut rappeler que l'exploitation des ressources pétrolière et gazière à grande échelle est une activité nouvelle au Sénégal. Le Sénégal a cependant l'avantage d'avoir à sa tête un Président Macky Sall qui connait bien le secteur et qui a très vite compris les enjeux. La place du contenu local dans le dispositif d'exploitation de nos ressources fossiles est un défi que notre pays doit relever. Ce défi est bien compris par l'État du Sénégal qui a développé des partenariats dans ce sens avec divers organismes pour outiller notre secteur privé afin de lui permettre d'être compétitif. Par ailleurs, l'État sénégalais a pris les dispositions législatives idoines pour faire participer et faire bénéficier aux Sénégalais les retombées de l'exploitation des ressources.

Comment appréciez-vous la présidence sénégalaise à la tête de l'Union africaine, qui prend fin en février ?

Ma conviction demeure que la présidence sénégalaise à la tête de l'Union africaine a été un grand moment de réaffirmation du leadership international sénégalais, mais également une nouvelle page dans les rapports entre l'Afrique et le reste du Monde. Durant cette année de présidence sénégalaise à l'Union africaine, le Chef de l'État a indubitablement fait bouger les lignes. Que ce soit sur la question de la présence pérenne de l'Afrique au sein du Conseil de sécurité de l'Onu ou la place du continent dans le G20 ou encore le rôle que l'Afrique doit jouer dans la résolution du conflit russo-ukrainien, le Président Macky Sall a fait entendre la voix du continent et a ouvert de nouvelles voies que ses successeurs pourront emprunter pour un rehaussement de l'Afrique sur la scène internationale. Tout dans ses positions renforçait le continent et ouvrait la voie à un rééquilibrage des rapports entre l'Afrique et le reste du monde au profit des populations africaines.

Quelles leçons les pays africains doivent-ils tirer des conséquences de la guerre en Ukraine ?

Les effets de la guerre en Ukraine se manifestent au-delà des frontières européennes. L'Afrique n'échappe pas à cette règle. Il est vrai que la dépendance de nombreux pays du continent aux exportations ukrainiennes et russes en produits agricoles et énergétiques a entrainé de nombreux problèmes d'approvisionnement et de disponibilité de certains biens. Une des conséquences immédiates a été l'envolée des prix des biens et produits agroalimentaires, mais également un renchérissement du coût de l'énergie. Ces hausses combinées à la crise du Covid-19 dont les effets se font toujours sentir sur des économies fragiles entrainent une baisse sensible du pouvoir d'achat des ménages africains. Cette situation couplée aux injonctions des partenaires techniques et financiers pour une baisse des subventions sur les produits agroalimentaires et énergétiques constitue un goulot d'étranglement pour de nombreuses économies du continent. La leçon à en tirer est que nos pays doivent se lancer dans une dynamique d'autonomisation agricole, de souveraineté alimentaire et d'indépendance énergétique. Le Président Macky Sall l'a très vite compris en initiant au Sénégal une stratégie nationale d'augmentation de la production agricole afin d'atteindre l'autosuffisance alimentaire.

Vous êtes un des spécialistes des questions électorales de la mouvance présidentielle. L'opposition revendique l'accès au fichier électoral et la nomination d'une personnalité estampillée neutre pour s'occuper des élections. Que leur répondez-vous ?

L'accès au fichier électoral est règlementé par la loi électorale qui en a confié l'organisation et les conditions au ministère en charge des élections. Il suffit de se conformer aux dispositions sans oublier que le fichier est disponible sur internet. Entre 2016 et 2022, le fichier a été audité deux fois sans qu'aucun grief sérieux n'ait été relevé. En vérité, le Sénégal n'a pas de problème de fiabilité du fichier électoral. Aussi dans toutes les grandes démocraties, l'organisation des élections est du ressort et de la responsabilité du Gouvernement qui en confie la charge régalienne à l'institution ou à l'organe idoine et au Sénégal, c'est le Ministère de l'Intérieur. Notre pays a démontré à tout instant son expertise dans la gestion des élections, ce qui en fait une vitrine de la démocratie dans le monde. Pourquoi devrions-nous alors changer ce qui a fait ses preuves et qui nous vaut le respect du monde entier?

Parlant d'élections, les différents états-majors s'accordent sur leurs candidats pour la prochaine présidentielle. À l'heure actuelle quelle est la situation au niveau de la coalition " Benno bokk yaakaar " (Bby) ?

La candidature du Président Macky Sall à l'élection présidentielle de 2024 est une position assumée de notre parti, l'Alliance pour la République (Apr). Rien, absolument rien du point de vue du droit, de la loi constitutionnelle et de la jurisprudence née des décisions antérieures du Conseil constitutionnel, ne s'y oppose. La coalition " Benno bokk yaakaar " (Bby) a tenu un séminaire national le 23 décembre 2022 autour du thème " Quelle coalition pour la victoire en 2024 ? ", marquant ainsi une étape importante vers la mobilisation de ses militants et l'investiture de son candidat à l'élection présidentielle de 2024. Le processus se poursuivra dans le respect de la souveraineté de chaque organisation membre de la coalition et de la préservation du partenariat engagé depuis 2012.

Est-ce que la publication du rapport de la Cour des comptes sur la gestion des fonds Force Covid-19 et la suppression de certaines subventions ne risquent pas de porter un coup dur à la majorité, à un an de la présidentielle ?

Le Président de la République a donné instruction au Premier Ministre et au Gouvernement d'examiner avec attention le rapport de la Cour des comptes sur la gestion du fonds Covid-19 et de prendre sans délai les mesures adéquates pour une exploitation conformément aux dispositions légales et règlementaires. Ceci est gage de volonté manifeste de respecter les principes de bonne gouvernance et de reddition des comptes. Depuis son accession à la tête de l'État, le Président Macky Sall s'est donné comme priorité de protéger le pouvoir d'achat des Sénégalais, particulièrement les couches vulnérables. La crise, résultante du conflit entre la Russie et l'Ukraine, impacte les économies du monde entier et le Sénégal n'y échappe pas. C'est le lieu de saluer et d'encourager la formidable dynamique impulsée par le Président Macky Sall en maintenant les prix à des niveaux appréciables compte tenu du contexte mondial décrit plus haut.

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