Les vagues d'indignations qui ont déferlé sur Alioune Tine ne se justifient pas, de notre point de vue. Le président de la structure "Afrika Jom" est cloué au pilori par ceux-là dont nous estimons qu'ils se trompent de colère, pour avoir alerté sur les graves dangers qui pèsent sur notre pays.
Invité sur le plateau de la chaîne Walf TV la semaine dernière, M. Tine a utilisé l'expression "agaçante" pour certains de "risque de guerre civile", appelant les différents protagonistes dans la confrontation politique à savoir raison garder. En particulier, le Président Macky Sall et le président du Pastef, Ousmane Sonko. Au premier, il rappelle qu'il a les moyens et l'autorité nécessaires pour mettre fin à tout ce puant remue-ménage ; au second il invite à l'impératif de responsabilité dans la posture et dans le propos.
En effet, notre pays est sur une corde raide tendue au bord d'un long et profond précipice. Ailleurs, des situations moins problématiques que celles que nous vivons depuis quelques temps au Sénégal ont conduit à des catastrophes. Elles ont entraîné l'exode à grande échelle et abîmé des vies. En l'occurrence, il ne sied donc pas de se lancer dans une campagne d'instrumentalisation émotionnelle tout aussi contre-productive que porteuse de chaos.
Par conséquent, au lieu de s'émouvoir de la sémantique et exposer sa peur des mots, il serait plus indiqué de réfléchir à comment échafauder un modèle de société conduit par la vérité. Un modèle de société fondé sur la lutte contre la transgression des lois et des principes garantissant notre vivre-ensemble et définissant notre humanité.
Depuis plus de deux ans - en référence à l'affaire qui oppose le leader politique Ousmane Sonko à la masseuse Adji Sarr - les appels à prendre conscience de la haine et de la bestialité grandissantes se multiplient. Mais la situation se dégrade et les positions (pouvoir et opposition) se radicalisent dans un dogmatisme inquiétant. De part et d'autre, nous avons des tyrans isolés ou en complicité avec leur entourage, clos sur eux-mêmes et enfermés dans leur démesure et leurs vices.
Dans ce contexte, parler de risque potentiel de "guerre civile" n'est pas excessif. Les propos de M. Tine s'inscrivent, à mon avis, dans l'ordre de la détestation du chaos, des fluctuations politiques, des errements et des atermoiements. Ils expriment le rêve d'une société où les rouages s'emboîtent et fonctionnent sans frottement.
Je suis de ceux qui pensent que l'économie des mots et des expressions, pour dire son désir d'un ordre lié au désir de vérité, relève de l'hypocrisie. A fortiori dans un pays où tout le monde est de plus en plus obsédé par les moyens de parvenir à ses fins.
C'est ignorer que le bonheur n'est pas en nous avant d'être dehors. Il est collectif avant d'être individuel. Le bonheur de chaque personne dépend de celui du tout et non de son individualité.
C'est oublier surtout que ce pays, le Sénégal, nous appartient à tous. S'il sombre, nous sombrons tous avec. Et les mots pour le dire importent peu.
PS : Aminata Touré, dite "Mimi", n'est plus députée à l'Assemblée nationale. Ainsi en ont décidé le mardi 25 Janvier ses anciens camarades de Benno Bokk Yakaar (coalition au pouvoir) qui lui font payer sa défection et ses assauts répétés contre le 3ème mandat si cher aux partisans du Président Macky Sall. C'est du moins l'une des raisons majeures que met en évidence la concernée comme explicative de la décision de ses "ex".
Il est vrai que Mimi a fait savoir qu'elle ne cautionnait pas une candidature à un 3ème mandat de Macky Sall. Sauf qu'elle s'était prononcée contre dans un contexte où c'était le refrain dicté par Macky lui-même. Entre temps, ce dernier a revu ses notes. Ce qui était un "refrain contre" est, semble-t-il, devenu un "refrain pour". Et Mimi, alors aux affaires à côté de son patron, est devenue aphone. Lorsque la question lui est posée dans ce nouveau contexte de "ni oui, ni non", elle a préféré s'abstenir de confirmer. Qui ne dit rien consent. Et voilà que se sentant (définitivement ?) "trahie" au détour des législatives passées, elle lance l'attaque contre le chef de l'Etat et son ambition d'un 3ème mandat. A moins d'être naïve, Mimi savait qu'elle ferait long feu à l'Assemblée. Connaissant la mentalité et la psychologie de ses anciens potes, elle aurait pu simplement démissionner pour s'éviter (encore) la disgrâce d'un renvoi.