Tunisie: Quartiers populaires marginalisés - Les jeunes payent les frais

1 Février 2023

Le fiasco politique a suscité chez les jeunes une grande déception et tué en eux tout projet futuriste. D'autant plus que leur milieu dépressif pèse sur un état d'esprit de plus en plus agressif.

Légion sont les études menées sur le vécu de nos jeunes, leurs soucis, rêves et les objectifs auxquels ils aspirent très souvent, à l'aune des maux affligeants et l'avenir incertain qui les taraude. C'est que nos quartiers populaires, à haute densité démographique, sont trop marginalisés, suite à une politique de développement, jusqu'ici, pénalisante. Et que l'Etat n'a toujours pas été à l'écoute de sa jeunesse. Au fil du temps, l'on a entendu parler de l'intérêt qu'il fallait accorder à cette population, le tiers de la société, et les forums de dialogue qu'on devait lui réserver, à souhait. Mais cela n'avait abouti à rien et même les promesses qui lui étaient publiquement exprimées sont aussi parties en fumée.

Un modèle de développement pénalisant !

Ce fiasco politique a suscité chez les jeunes une grande déception et tué, en eux, l'ambition de vivre mieux. D'autant plus que leur milieu dépressif pèse sur un état d'esprit de plus en plus agressif. A l'école, dans la rue ou ailleurs, la violence a dépassé tout entendement. Une réalité qui en dit long ! Voire un danger banalisé menaçant d'insécurité et de criminalité abusivement tolérée. Et ce n'est pas tout. L'émergence d'autres comportements à risque liés à des clivages sociaux entravant toute forme du développement humain. Et combien de fois, nos quartiers populaires, dans pas mal de régions, sont retenus comme " fiefs", où l'on culpabilise l'insécurité, l'anxiété, le chômage et la déscolarisation. Soit un constat réduit à une simple perception si péjorative, découlant, à vrai dire, d'un modèle de développement jugé punitif. A cela s'ajoute un certain désengagement institutionnel et moral. En cause, cette politique deux poids, deux mesures qui avait, pour longtemps, appauvri les plus démunis.

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Victimes des préjugés

Les jeunes vivant dans ces quartiers ont toujours été à la marge. Leur vécu étant à la merci des aléas du temps qui passe. Déscolarisés, sans emploi et encore loin de retrouver le droit chemin, ces préjugés sociaux, dont leur esprit s'était imprégné, ont gravement influencé leurs comportements, leur confiance en eux-mêmes et leur regard de l'autre. L'autre, c'est bien l'Etat, de prime abord. Puis, leur milieu immédiat et la société toute entière, en second lieu. Cela n'est pas sans impact sur leur état d'âme, leur psychologie sociale, mais aussi sur leur santé mentale. Ce dont repose toute enquête sociologique menée dans nos quartiers, révélatrice du désespoir et du sentiment d'anxiété comme indicateurs des comportements à risque. Au fur et à mesure, la délinquance juvénile demeure une qualité intrinsèque. Mais elle n'est guère une fatalité. Cela dit, l'homme est le produit de la société. Un animal social, comme disait Aristote.

L'injustice pèse

D'autant plus, ces jeunes, dépourvus de quoi subsister, n'ont, non plus, pas droit d'accès aux soins de proximité. C'est que la défaillance des structures de santé de base et l'absence de l'Etat-providence ont ajouté à cette crise sociétale. Leur réticence à la chose politique n'est plus à démontrer. Ainsi, violence, exploitation sexuelle, consommation des stupéfiants sont tributaires d'une injustice sociale. Cette injustice qui a dû provoquer un sentiment de frustration, d'exclusion et puis un comportement violent. D'où, un bon traitement socioéconomique s'impose. Nos prisons ont-elles vocation rééducative ? Absolument pas. Car, même dans nos établissements pénitentiaires, comme en témoignent divers rapports associatifs, la qualité des prestations sociales et sanitaires fait encore défaut. Outre des lieux privatifs des libertés, nos prisons sont, hélas, devenues des milieux de violence et d'insécurité. Voire une machine à produire des récidivistes criminels. En sont victimes les jeunes de ces quartiers populaires. En tout cas, leur passage carcéral en semble un grand témoin. Si rien n'est fait, on craint le pire. A moins qu'un nouveau projet sociétal sorte de l'ordinaire et permette à ces jeunes de voler de leurs propres ailes. Une question à ne pas prendre à la légère !

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