La demande sur les marchés carbone croit de 30% chaque année. À Madagascar donc de miser davantage sur cette opportunité pour capter plus de ressources au profit d'une croissance économique durable.
Récompenser les pays forestiers pour leurs efforts en matière de réduction de la déforestation et ce faisant leur contribution à la lutte contre le changement climatique : voilà une idée qui a séduit dès le départ lorsqu'il y a 20 ans, des scientifiques ont proposé le concept de " réductions compensées ", à la base du mécanisme REDD+. Cette proposition qui va jouer un rôle de premier plan dans la préservation de l'environnement tout en soutenant économiquement les pays qui s'engagent vers un développement plus durable, promesse d'autant plus forte que les forêts mises sous pression se trouvent se trouvent dans leur grande majorité dans les pays émergents ou en voie de développement comme Madagascar.
Son adoption a été actée en 2007 sous le terme de mécanisme de réduction des émissions de gaz à effet de serre liées à la déforestation et à la dégradation des forêts (REDD), élargi plus tard à REDD+ pour intégrer les activités permettant l'augmentation des stocks de carbone (reboisement, restauration, gestion durable). Du côté de la Grande île, après plus de 10 ans de préparatifs marqués par des négociations difficiles, le premier grand contrat de vente de carbone a été décroché en 2021 avec la Banque mondiale dans le rôle d'intermédiaire.
Il s'agit d'un contrat de 5 ans pour la réduction et la vente de 10 millions de tonnes équivalent de carbone qui profitera à au moins 5 régions, 177 communes, aux organisations de la société civile et à l'État à travers les ministères de tutelle (environnement et finances). Les mois précédant la signature du contrat ont été intenses en pourparlers, notamment avec Forest Carbon Partnership Facility (FCPF) sur la question de la place des acteurs locaux dans la redistribution des gains des futures transactions.
Selon les précisions des responsables, Madagascar a développé, dans le processus REDD+, une stratégie nationale ainsi qu'un premier Programme de Réduction des Émissions dans l'écorégion des forêts humides de l'Est du pays dénommé " Atiala Atsinanana".
Booster l'économie verte
Le programme a été approuvé par le Fonds carbone pour donner lieu à un contrat de vente pour un montant environnant les 70 millions de dollars. " L'atteinte des objectifs fixé nécessite la responsabilisation des décideurs mais aussi la mobilisation d'investissements prometteurs afin d'optimiser la conduite d'activités génératrices de crédits carbone à l'intérieur du programme", a-t-on aussi indiqué. Mais si les 70 millions de dollars sont considérés comme un bon début, on estime que le pays doit s'activer pour être plus présent sur le marché du carbone. Car, il faut reconnaitre que la concurrence, notamment entre les pays africains, ne cesse de s'intensifier pour capter cette ressource financière permettant de donner un coup de boost à l'économie. Pour les experts de l'Initiative pour les marchés du carbone en Afrique, les pays du continent sont aujourd'hui en mesure de mobiliser 6 milliards de dollars par an sur les marchés volontaires du carbone (MVC) d'ici 2030.
Dans un rapport publié dernièrement par Sustainable Energy for All (SE4All), une initiative lancée par l'ONU pour doubler la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique, il est rappelé que l'un des principaux défis auxquels les pays comme Madagascar sont confrontés dans le domaine de la lutte contre le dérèglement climatique, est de déterminer comment financer la nécessaire transformation de leurs économies. D'autant plus que les financements climatiques promis par les pays riches sont encore très en deçà des objectifs fixés.
Le rapport souligne que la solution au manque de financements, notamment climatiques, passe par l'exploitation de l'énorme potentiel des marchés volontaires du carbone, qui représentent " une opportunité majeure pour accélérer le développement économique du continent ". Et selon les dernières estimations, la demande sur le marché du carbone augmente de 36% en moyenne par an. A savoir que sur ce marché, les acheteurs acquièrent ces crédits afin de compenser leurs propres émissions, finançant ainsi des projets de réduction du carbone et des programmes de développement économique durables.