Madagascar: Secteur minier - Les ristournes d'Ambatovy utilisées par les collectivités à leur guise

Plus de 86,5 milliards d'ariary ont été versés par le projet Ambatovy aux 22 collectivités territoriales décentralisées (CTD) environnantes à titre de ristournes pendant la période 2018-2020. Plus de 75% de ces ristournes reviennent à 6 collectivités ayant des parts significatives pour appuyer leur développement inclusif. Cependant, bien des failles ont été repérées dans l'utilisation et les impacts ne se font pas sentir au niveau de la population.

Plus de 65,5 milliards d'ariary ont été versés aux régions Alaotra Mangoro et Atsinanana et aux communes rurales de Vohitranivona, d'Ambohibary, d'Andasibe, d'Amboditandroroho et de Toamasina suburbaine à titre de ristournes entre 2018 et 2020 selon le rapport de la Cour des comptes sur l'audit de l'utilisation des ristournes minières du projet Ambatovy, publié le 25 janvier dernier.

Cette manne financière devrait donc servir en grande partie au financement du développement de ces collectivités. Spécifiquement pour les ristournes, au moins 70% du montant total revenant à chaque collectivité devrait être affecté en investissement, le rapport fait cependant état de 43,2% de la part d'investissement réalisé à partir des sommes reçues. En outre, pour certaines de ces CTD, soit les documents de base d'élaboration de budget en l'objet du Plan de développement local (PDL) n'existent tout simplement pas, soit leur élaboration n'a pas suivi la règlementation en vigueur.

La région Alaotra Mangoro a reçu les ristournes les plus élevées, soit environ 15,5 milliards d'ariary, alors que son PDL est en désuétude et sa mise à jour n'a pas été possible faute de moyens financiers selon le rapport. À défaut, le conseil pour la commune et les directions au sein de la région fixent les travaux à effectuer sur la base du montant des ristournes perçues par la collectivité. Situation engendrant le pilotage à vue durant les exercices sous revue et favorisant certains responsables remarque la Cour des comptes. D'ailleurs, aucun document de développement récent n'est disponible pour cadrer l'utilisation des ristournes au bénéfice de la population de la région indique le rapport.

Pour la région Atsinanana, qui a obtenu plus de 10 milliards d'ariary, le PDL existe bel et bien, mais le processus de consultation citoyenne lors de sa mise à jour n'a pas été respecté. Celui-ci est pourtant nécessaire en tant que garant de la cohérence entre le PDL et les projets prioritaires collectés annuellement auprès de la population.

Besoin de la population non prise en compte

La Cour des comptes observe que les collectivités bénéficiaires ne disposent pas toutes d'un cadre de consultation citoyenne opérationnelle telle que prévue par la règlementation et d'un PDL découlant d'une approche participative et inclusive, servant de référence dans le processus d'élaboration du budget. Au demeurant, l'utilisation des ristournes n'est pas forcément cadrée dans un document de développement issu d'une consultation citoyenne, indispensable pour la mise en œuvre du projet d'investissement des CTD.

En outre, le PDL au niveau des communes ne sert pas vraiment d'outil de planification et de pilotage des interventions de la collectivité en matière de développement. Il est plutôt conçu pour des besoins administratifs remarque la Cour des comptes. Cette situation fait que les besoins des populations ne sont pas pleinement pris en compte lors de l'utilisation des ristournes minières.

L'utilisation des ristournes a permis de développer et d'améliorer les infrastructures de base au niveau des collectivités bénéficiaires. Toutefois, la Cour note que ces réalisations ont été accompagnées d'énormes gaspillages de ces ressources, favorisés essentiellement par une mauvaise priorisation des projets, une violation des prescriptions du code des marchés publics, une défaillance de pilotage et de suivi des travaux réalisés. Les autorités locales gèrent ainsi les ristournes sans forcément se préoccuper du caractère non renouvelable des ressources minières.

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