Réagissant à l'adoption par le Sénat d'une proposition visant à modifier la loi sur les organisations bénévoles privées, qui attend désormais l'assentiment du président Emmerson Mnangagwa afin d'entrer en vigueur, Tigere Chagutah, directeur adjoint pour l'Afrique de l'Est et l'Afrique australe à Amnesty International, a déclaré :
Sous sa forme actuelle, le texte proposant de modifier la Loi relative aux organisations bénévoles privées menace les organisations de la société civique travaillant sur les droits humains au ZimbabweTigere Chagutah, directeur adjoint pour l'Afrique de l'Est et l'Afrique australe à Amnesty International
" Sous sa forme actuelle, le texte proposant de modifier la Loi relative aux organisations bénévoles privées menace les organisations de la société civique travaillant sur les droits humains au Zimbabwe. Si elle est promulguée, cette proposition de loi aura des conséquences désastreuses, notamment une réduction de l'espace civique et une restriction de l'accès aux services de soutien humanitaire au Zimbabwe, car elle rendra immédiatement illégales toutes les organisations non gouvernementales non enregistrées comme organisations bénévoles privées.
" S'il est promulgué par le président, ce texte pourrait être utilisé pour refuser l'enregistrement d'organisations de défense des droits humains en raison du travail qu'elles accomplissent, notamment en faveur de la liberté d'expression, d'association et de réunion pacifique. Cette proposition de loi exacerberait par ailleurs la répression croissante contre les organisations de la société civile, mènerait à une hausse des violations des droits humains et compliquerait la tâche consistant à obliger le gouvernement à rendre des comptes. Il existe un risque que les employé·e·s et membres du comité directeur d'ONG soient arrêtés et soient visés par des mesures punitives, notamment une incarcération, pour avoir simplement fait leur travail.
Le président Mnangagwa doit utiliser sa position afin de rejeter cette proposition de loi car elle est répressiveTigere Chagutah
" Le président Mnangagwa doit utiliser sa position afin de rejeter cette proposition de loi car elle est répressive. Le président doit veiller à ce que ce texte ne soit jamais promulgué.
" Toute future loi doit pleinement refléter les normes internationales relatives aux droits humains et réaffirmer les obligations du pays en matière de promotion et de protection des droits fondamentaux de chaque personne, y compris de celles qui s'efforcent de défendre les droits d'autrui. Les ONG doivent être autorisées à effectuer leur travail librement sans représailles. "
Complément d'information
Le Sénat s'est réuni le 1er février 2023 et, malgré les préoccupations exprimées par le public, a adopté la proposition portant modification de la Loi relative aux organisations bénévoles privées (H.B. 10A, 2021).
Le 5 novembre 2021, le gouvernement du Zimbabwe a publié au Journal officiel un projet de loi portant modification de la Loi relative aux organisations bénévoles privées, dans le but affiché de " lutter contre le terrorisme et interdire le travail de pression politique de la part d'organisations non gouvernementales ".
Des amendements à ce texte présentés en juin 2022 ont considérablement durci la version initiale, ne tenant aucun compte des inquiétudes de la société civile et contenant des dispositions plus strictes et plus répressives. Ce projet de loi a fourni la base du texte venant d'être adopté par le Sénat.
La proposition de loi sur les organisations bénévoles privées place toutes les organisations enregistrées au titre de diverses lois sous l'autorité d'un seul et même texte, dans une tentative visant à contrôler les organisations de la société civile considérées comme " opposées au gouvernement ".
Ce n'est pas la première tentative des autorités zimbabwéennes de réglementer les ONG. La première remonte à 2004, par le biais de la " proposition de loi relative aux organisations bénévoles privées ". Celle-ci a été adoptée par le Parlement, mais le texte n'a jamais été promulgué par le président de l'époque, Robert Mugabe.