Mbour — Le métissage est la "force" de la collectivité Mandingue de Mbour, qui a su conserver et vulgariser, dans un monde moderne, la tradition du "kankourang", un personnage à la fois mystique et mythique, estime Macodou Niang, un membre de ladite communauté.
"Notre chance, c'est le métissage. Nos ancêtres ont travaillé sur le métissage avec les sérères, les wolofs. C'est ce qui fait notre force", souligne Niang, le président de la commission des finances de la collectivité mandingue de Mbour.
Il recevait en compagnie de responsables de la collectivité mandingue, une équipe de journalistes de l'APS dans le cadre de la tenue ce jeudi à Thiès, la capitale régionale, d'un conseil des ministres délocalisé.
D'ascendances mandingue et sérère, il n'est pas seul dans cette situation. Macodou Niang est apparenté à Cheikhou Koté, le patriarche de la collectivité et dernier fils encore en vie de Mady Koté, celui qui avait amené le kankourang à Mbour en 1904, en provenance du Gabou, en Guinée-Bissau.
Sur le chemin de la migration, il fit escale à Mboulême, non loin de Mbour, où il prit une épouse chez les Sérères. Il n'est pas rare de voir des Diop, des Sarr, ou des Seck, des Sow au sein de la collectivité mandingue, qui ne se limite pas seulement aux Socés, explique-t-il.
A travers une démarche diplomatique, la première vague de migrants mandingues à Mbour a su s'allier aux wolofs et autres ethnies trouvées sur place, les consultant au sujet de l'introduction de certaines pratiques culturelles.
Au fil du temps, beaucoup de monde issu d'autres cultures ont adhéré à cette communauté soit par alliance, soit par adoption.
Si dans d'autres parties du pays, le kankourang est l'affaire des mandingues, à Mbour il semble faire l'unanimité. Il génère toute une économie, mobilisant pendant tout un mois des milliers de personnes qui viennent d'ailleurs pour le voir, l'apercevoir.
Tous les dimanches du mois de septembre, dénommé "septembre mandingue", le kankourang, revêtu de la tête aux pieds d'un masque fait d'écorces de couleur orange, est une véritable attraction.
Il sillonne la ville, tenant deux machettes qu'il fait s'entrechoquer et poussant des cris stridents auxquels répond sa suite, composée d'initiés.
Bien structurée, la communauté a créé tout un appareil autour du kankourang, classé au patrimoine mondial immatériel de l'Unesco.
Mbour, Sédhiou au Sénégal, et deux villes gambienne et guinéenne ont été désignées par l'Unesco comme les gardiennes de cette tradition exécutée en guise de rite initiatique, à l'intention des circoncis. Il est prêté au kankourang des vertus protectrices des jeunes circoncis.
Après la construction d'une maison du "kankourang", grâce à l'appui de l'Unesco, d'autres projets sont à l'étude. Il s'agit de la construction d'un écomusée, d'un centre d'interprétation.
La collectivité a signé une convention avec l'Université Iba Der Thiam de Thiès pour étudier l'impact du septembre mandingue sur l'économie locale. Cette étude pourra servir de "document de négociation et de promotion de la culture mandingue", selon le secrétaire de la collectivité, Mamadou Aïdara Diop.
Il s'agira de faire contribuer les grandes entreprises de la place au budget de fonctionnement de la collectivité dont une des activités culturelles booste les commerces, les transports, etc. pendant un mois.
Le succès du kankourang dont la collectivité mandingue mbouroise est très jalouse, fait déjà des émules. Elle a reçu une délégation venue de Ziguinchor pour s'inspirer l'organisation à l'ancien du kangourang, une culture propre aux mandingues à travers l'Afrique de l'Ouest.
Le nouveau bureau en relation avec des instituts de recherches et institutions, entend faire des convergences mandingues de la sous-région un instrument de diplomatie et de pacification de l'espace ouest-africain.