Au Mali, les Nations unies et les autorités de transition s'affrontent sur le terrain juridique, dans un dossier très politique. Le chef des droits de l'homme de la Minusma a été déclaré " persona non grata " dans le pays le 5 février. Depuis, la Commission des droits de l'homme de l'ONU et le gouvernement malien s'opposent sur la légalité de cette décision.
La Commission des droits de l'homme de l'ONU affirme que la Charte des Nations unies offre une immunité au personnel onusien, rendant inapplicable la doctrine de persona non grata.
Le gouvernement malien de transition répond en citant la Convention de Vienne de 1961 sur les relations diplomatiques, en vertu de laquelle le Mali serait bel et bien autorisé à déclarer n'importe quel diplomate persona non grata, sans même avoir à motiver sa décision.
"C'est un véritable débat doctrinal"
Convention de Vienne ? Charte des Nations unies ? " C'est un véritable débat doctrinal ", explique un juriste spécialiste du droit international, qui rappelle cependant quelques précédents : au Burkina Faso, fin décembre, avec l'expulsion de la coordinatrice de l'ONU ; ou en Éthiopie, en septembre 2021, lorsque sept responsables onusiens avaient été sommés de quitter le pays.
" À chaque fois, les Nations unies protestent avec le même argument ", développe le juriste. Mais, dans les faits, " de nombreux États appliquent quand même la doctrine de persona non grata aux diplomates onusiens ".
Légale ou pas, les autorités maliennes de transition ne reviendront pas sur cette décision très politique.
La section droits de l'homme de la Minusma est dans leur viseur depuis des mois, à cause de ses enquêtes sur les allégations d'exactions de l'armée malienne et de ses supplétifs russes. Bamako juge ainsi que le comportement général de Guillaume Ngefa contrevient à ses obligations d'" impartialité ".
Guillaume Ngefa se trouvait hors du Mali lorsque son expulsion a été annoncée. Quel que soit l'avis des experts juridiques, on l'imagine mal revenir à Bamako dans ces conditions.