TUNIS/Tunisie — Dubai (Emirats arabes unis), 14 fév 2023 (de l'envoyée de TAP, Nedra Boukesra)- Les pays du Moyen-Orient doivent contribuer davantage pour aider les pays en difficultés financières de la région, à réaliser des réformes et éviter un raz-de-marée, dont les conséquences n'épargneraient personne, tel est le principal message de la directrice du Fonds monétaire international (FMI), Kristalina Georgieva et son équipe lors du 7ème Forum fiscal arabe, tenu les 12 et 13 février, à Dubai aux Emirats arabe unis.
En effet, Georgieva avait affirmé sans détour, à l'ouverture de ce forum, que les pays de la région "courent un risque considérable de destabilisation", en raison de la guerre en Ukraine, des catastrophes climatiques et des effets des pénuries alimentaires sur les pays les plus fragiles.
Pour elle, les pays donateurs peuvent "contribuer à la stabilité et à la croissance économique de la région en participant à des initiatives multilatérales".
En effet, l'accent a été mis lors de ce rendez-vous périodique du FMA (Fonds monétaire arabe), sur la situation difficile des finances publiques dans certains pays de la région (Tunisie, Liban et Egypte) avec des ratios dette/PIB avoisinant les 90 % pour certains et une inflation de plus de 10% pour la quatrième année consécutive outre le chômage, qui " reste très élevé, notamment chez les jeunes".
La solution pour cette situation préoccupante réside, d'après le FMI, dans le renforcement de la résilience des finances publiques de ces pays pour protéger les populations, les économies et le climat.
Pour Georgieva "seule la coopération multilatérale peut permettre de rétablir la viabilité de la dette" dans ces pays. A cet égard, elle a rappelé que trois ans après le lancement par le G20, en 2020, de l'initiative de suspension du service de la dette et l'adoption d'un cadre commun pour le traitement de la dette, il reste beaucoup à faire.
"Le traitement de la dette doit intervenir plus rapidement et de manière plus cohérente, et bénéficier à tous les pays qui en ont besoin", a-t-elle dit. Elle a évoqué, à ce propos, les 54 milliards de dollars mis sur la table par les pays du CCG (Conseil de coopération du Golfe), à titre de financement budgétaire et de la balance des paiements outre les 10 milliards de dollars d'aides financières consentis par le "Groupe de coordination arabe", aux pays à faible revenu et pays fragiles ou en proie à un conflit.
Depuis le début de la pandémie, le FMI a accordé quasiment 20 milliards de dollars de financement à certains de ses pays membres de la région. En outre, sur les 650 milliards de dollars de son allocation record de droits de tirage spéciaux (DTS) de 2021, plus de 37 milliards ont bénéficié au monde arabe.
La directrice générale du FMI a rappelé qu'avec les pays disposant de solides réserves dans ce domaine, le fonds œuvre "désormais à la réaffectation de ces actifs en faveur des pays dont les besoins sont plus importants" et la réaffectation de DTS vers le fonds fiduciaire du FMI pour la réduction de la pauvreté et pour la croissance". L'objectif étant de continuer à accorder des prêts à taux d'intérêt nul à des pays à faible revenu.
Georgieva a, ainsi, réitéré toute l'importance qu'accorde le fonds au renforcement de la coopération dans la région.
A noter que la concrétisation de l'accord entre le FMI et la Tunisie constitue la première épreuve à travers laquelle l'institution de Bretton woods saura si son appel à une coopération plus soutenue et plus ciblée dans la région est entendu.
La Tunisie est parvenue à conclure un accord préliminaire avec le FMI depuis le 15 octobre 2022, en vue d'obtenir un prêt de 1,9 milliard de dollars, remboursable sur une période de 48 mois. Mais, le pays attend toujours l'approbation de cet accord par le Conseil d'administration du fonds.
La déprogrammation du dossier de la Tunisie de l'ordre du jour de son conseil d'administration réuni en janvier 2023, a relancé les spéculations et les polémiques sur la capacité du pays à mener à bien ce dossier.
Entre-temps, les autorités financières tunisiennes ont toujours affirmé que la finalisation de l'accord est en cours et que les financements du FMI sont peut-être retardés, mais finiront par arriver, et ce en dépit de la succession des déclarations des économistes, sur un éventuel envoi du dossier tunisien devant le club de Paris.
Des médias arabes ont rapporté lundi, que la mise en oeuvre de l'accord conclu en octobre 2022 entre la Tunisie et le Fonds monétaire international (FMI) sera adoptée "trés bientôt" et sa finalisation dépend de la mobilisation d'autres fonds de la région, de manière à permettre la concrétisation des réformes promises par le gouvernement tunisien.
Le 7ème forum fiscal arabe s'est tenu sur le thème "La viabilité budgétaire dans le monde arabe au-delà de la pandémie de covid 19: défis et opportunités". Il a axé sur l'importance de revoir la politique fiscale dans la région. Ont pris part à ce forum qui précède le Sommet mondial des gouvernements (tenu du 13 au 15 février à Dubaï, sous le slogan "Façonner les futurs gouvernements"), des ministres des finances des pays arabes et des gouverneurs des banques centrales dont Marouane Abassi, gouverneur de la BCT.
Le Fonds monétaire arabe (FMA), l'un des importants bailleurs de fonds de la Tunisie, avait déjà accordé au pays, en 2021, un prêt dit "Prêt Compensatoire" (Compensatory Loan) dans le jargon comptable arabe, d'environ 82 millions de dollars US ou 19,175 millions de dinars.
L'objectif de ce prêt est " d'apporter un soutien pour renforcer la situation financière du pays et répondre aux besoins d'urgence. "
La Tunisie avait également obtenu, en 2020, de cette même institution arabe, un prêt de d'un montant de 59 millions de dollars, selon le site du FMA. Parmi les objectifs de ce fonds crée en 1976, figure la correction des déséquilibres dans la balance des paiements des pays membres.
Pour rappel, l'encours de la dette publique en Tunisie a avoisiné les 112 milliards de dinars, à fin novembre 2022, contre près de 103 milliards de dinars, une année auparavant, ce qui représente une hausse de 8,7%.
Quant au service de la dette publique, il s'est élevé à 12 milliards de dinars, dont la dette intérieure représente 58% du montant global (soit 7 milliards de dinars), alors que la dette extérieure est de l'ordre de 42% (près de 5 milliards de dinars) selon le document " Résultats provisoires de l'Exécution du Budget de l'Etat ", publié par le ministère des Finances.