Dans l'une de ses rares interventions télévisées, ce dimanche 12 février au soir, le président érythréen Issayas Afewerki a exposé - pendant 90 minutes - sa vision très personnelle du conflit dans le Tigré, où son armée est intervenue aux côtés de celle de l'Éthiopie.
Une ou deux fois par an, Issayas Afewerki s'assied face aux intervieweurs hiératiques de sa télévision d'État et il parle. Il expose librement ses vues, ses analyses sur l'Érythrée et le monde. Ainsi, pour la première fois dimanche, il a donné sa vision de l'accord de paix de Pretoria, qui a mis fin en novembre à la guerre du Tigré. Une paix " imposée " aux Tigréens par " leurs donneurs d'ordres " étrangers, selon lui. Pour lui, tout aurait été prémédité par les États-Unis pour mettre fin à une période " d'espoir et d'optimisme " après la réconciliation entre l'Éthiopie et l'Érythrée en 2018. Et l'accord de paix de Pretoria, qu'il a salué, ne serait qu'une manœuvre désespérée.
" Papier à signer "
" À Pretoria, on leur a donné un papier à signer... (Pause) Tout avait été fabriqué par la clique de Washington. Obasanjo, Kenyatta, l'Union africaine, c'étaient des couvertures. Le document avait été préparé par la clique de Washington, qui leur a demandé de signer et ils ont signé ", a déclaré le président érythréen.
C'est le " mauvais calcul de Washington " qui en 2020 leur aurait inspiré suffisamment confiance pour démarrer la guerre, affirme-t-il. Et la paix leur aurait ensuite évité " une défaite militaire totale ". Il a évoqué des " centaines de milliers de morts " tigréens et des dégâts " jamais vus dans le monde " causés par la guerre. Mais il les a entièrement attribués à son ennemi historique, le TPLF, le parti dirigeant le Tigré.
" Manigances de Washington "
Désormais, la capacité de nuisance du TPLF est abolie, s'est-il réjoui. Et les allégations de crimes commis par les troupes érythréennes sont, selon lui, " des manigances de Washington pour entraver la mise en œuvre de l'accord " et " gagner du temps ".
Ces accusations ont été aussitôt sèchement rejetées par l'ancien secrétaire d'État adjoint américain Tibor Nagy, aux affaires au démarrage de la guerre. " Depuis le début, a-t-il répondu, la position américaine a été d'essayer de mettre fin à la violence le plus rapidement possible. Point final. "