Cote d'Ivoire: Alex Moussa Sawadogo (Délégué général du FESPACO) - " La volonté du FESPACO est de demeurer le creuset qui féconde les énergies et les intelligences pour la promotion du cinéma africain "

14 Février 2023
interview

La 28ème édition du FESPACO - Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou - se tiendra du 25 février au 4 mars 2023 dans la capitale burkinabè, autour du thème " Cinéma et culture de la paix ". Dans cet entretien, le Délégué général du FESPACO, M. Alex Moussa Sawadogo explique le choix de ce thème, situe les enjeux de l'événement et lève un coin de voile sur ses grandes articulations.

Pourquoi avez-vous choisi de mettre cette année le festival en résonance avec la question sécuritaire ?

Alex Moussa Sawadogo : Le thème de l'édition du FESPACO 2023 est : " Cinémas d'Afrique et culture de la paix ". Cinémas avec un S. Le thème de chaque édition du FESPACO est choisi en tenant compte du développement du secteur cinématographique et de l'audiovisuel et des attentes des professionnels mais aussi de la conjoncture économique et sociale du continent. Dans cette optique, le thème doit être compris comme une réflexion sur les préoccupations de notre temps et non un critère de compétition. Le choix de la réflexion sur cette problématique à travers le colloque international traduit la volonté du FESPACO de demeurer le creuset qui féconde les énergies et les intelligences pour la promotiondu cinéma africain et le développement de notre continent face aux multiples défis qui se dressent sur son chemin. En effet, notre monde est aujourd'hui confronté à de multiples crises liées aux inégalités sociales, à l'exclusion, aux extrémismes, à l'autoritarisme, à la course aux armements, et de manière générale, à la gestion mercantile de la planète.

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Ces crises protéiformes confirment l'idée selon laquelle le monde vit dans une logique de guerre de tous contre tous. Cette dynamique de violence qui menace la survie de l'humanité tout entière impose nécessairement un changement de paradigme. En tant que lieu privilégié de manifestation et de projection des imaginaires individuels et collectifs, le cinéma et l'audiovisuel ont un rôle important à jouer dans le changement de ce paradigme. Alors, que peuvent proposer les cinémas d'Afrique, à l'Afrique elle-même et au reste du monde ? Face à la culture de la guerre, quelle alternative proposent les cinémas d'Afrique ? Comment peuvent-ils promouvoir la culture de la paix dans un monde en guerre ? C'est à cette réflexion que nous invite le colloque de la 28e édition du FESPACO.

 Justement, quelle sera la particularité de ce FESPACO 2023 ?

La particularité du FESPACO 2023 est que la biennale se tiendra dans un contexte international où les questions d'intérêt ou de thématiques qui touchent aux libertés démocratiques, aux droits de l'Homme, au vivre ensemble et à la culture de la paix se posent de plus en plus de manière accrue comme des défis à relever par toute l'humanité face à la persistance de la guerre (guerres en Afrique, en Ukraine... ), des menaces ou des attaques terroristes, de l'extrémisme violent... Dans ce contexte, le Burkina Faso, le FESPACO et tout le continent africain apportera sa pierre à la construction de notre identité collective à travers la promotion du vivre ensemble et la dissémination d'une culture de la paix partout où besoin sera dans le monde.

Quelles seront les principales articulations du festival ? Autrement dit les attractions majeures ?

Les principales articulations du festival sont : la compétition officielle des films avec les débats forums qui leur sont consacrés ; les rencontres professionnelles parmi lesquelles on peut citer la tenue du colloque international sur le thème de l'édition avec trois (03) axes thématiques fondamentaux faisant chacun l'objet d'un panel à savoir : " Imaginaires cinématographiques de construction de la paix : mémoire, coexistence, adaptation, résilience, innovation " ( panel 1) ; " Les cinémas d'Afrique face aux inégalités sociales, à l'exclusion, au terrorisme, à la mal gouvernance, aux défis humanitaires liés aux conflits et aux changements climatiques " (panel 2) ; " Filmer la paix - Filmer la guerre.

Nouveaux écrans, nouveaux scénarii : enjeux esthétiques, socio-culturels et économiques " (panel 3)). Il y aura également les masters class, la cérémonie de libation, l'hommage aux cinéastes disparus et la célébration de la naissance de Sembène Ousmane ; le FESPACO PRO qui s'articule autour du MICA (le marché de films), des ateliers Yennenga (Le Yennenga post Production consacré à l'accompagnement des films en finition, Le Yennenga Academy, un espace qui met ensemble des " aspirants cinéastes " afin de susciter ou de préparer le terrain pour de nouvelles initiatives, de nouvelles collaborations, pour des projets communs), de le Yennenga Coproduction (Espace aux échanges entre les professionnels du cinéma et les producteurs et les Fonds) et de Yennenga connexion (passerelle par excellence de collaboration entre le FESPACO et les mécanismes de références d'aide à la création du cinéma africain.)

Où se dérouleront les cérémonies d'ouverture et de clôture ?

Les cérémonies d'ouverture et de clôture se tiendront au Palais des sports de Ouaga 2000.

Cette année, il n'y aura pas d'activité à l'Institut Français. Comment comptez-vous vous adapter à cette nouvelle donne ?

Nous regrettons sincèrement cette situation. Mais, le FESPACO est un festival professionnel en phase avec son temps, un festival résiliant à l'instar du peuple Burkinabè. Nous avons toujours un plan B. Cette situation a été surmontée et nous avons trouvé d'autres espaces parmi lesquels on peut citer la salle de la mairie centrale de Ouagadougou, pratiquement au même endroit que l'institut Français, où se dérouleront les activités qui y avaient été initialement programmées.

 Depuis quelques années, à chaque édition, la statuette d'un cinéaste lauréat de l'Etalon d'or de Yennenga est inaugurée. Qui aura cet honneur cette année ?

Cette année, c'est la République du Niger qui aura l'honneur d'être représentée sur la colonne des Etalons. En effet, c'est le cinéaste nigérien Oumarou Ganda, premier Etalon de Yennenga de l'histoire du FESPACO en 1972 avec son film " Le Wazzou polygame " qui verra sa statuette inaugurée.

 Le Mali est le pays invité d'honneur. Qu'est-ce qui a milité en faveur de ce choix ?

Le pays invité d'honneur est choisi en fonction des relations de coopération qu'il entretient avec le Burkina Faso dans le domaine de la culture et de son engagement pour le développement des cinémas d'Afrique et de la Diaspora. Ce choix tient également compte des opportunités que ce pays pourrait offrir en termes de partenariat économique et de coproduction cinématographique et audiovisuelle. Le Mali remplit toutes ces conditions. Le choix du Mali comme pays invité d'honneur est donc un choix judicieux.

 Le FESPACO, c'est avant tout la compétition des films. Pour l'Etalon d'or de Yennenga, quinze films ont été sélectionnés dans la catégorie longs métrages de fiction. Pourquoi ce nombre ?

Quinze (15) films ont été effectivement sélectionnés pour la compétition officielle longs métrages de fiction et quinze (15) films dans la compétition officielle documentaires longs métrages. Les films sélectionnés dans ces deux sections compétissent pour remporter l'Etalon d'or de Yennenga réservé à leurs sections respectives. Ce sont ces chiffres qui ont été annoncés lors de la conférence de presse de dévoilement de la sélection officielle le vendredi 13 janvier dernier. Vous pouvez vérifier ces informations sur le site officiel du FESPACO www.fespaco.org ou par voie de presse. Du reste le nombre de quinze (15) films pour les longs métrages est une recommandation issue de l'atelier international de réflexion sur le cinquantenaire du FESPACO et de ses futures éditions.

Cet atelier organisé à Ouagadougou au Pacific Hôtel, du 30 novembre au 02 décembre 2017 avec l'appui financier de l'Organisation internationale de la francophonie (OIF) dans le cadre des préparatifs de l'organisation de la 26ème l'édition-cinquantenaire du FESPACO a regroupé au total soixante-dix-sept (77) professionnels africains et de la Diaspora du secteur du cinéma et de l'audiovisuel et des personnes ressources y compris les anciens responsables du FESPACO, la Fédération nationale des cinéastes du Burkina (FNCB), la Fédération panafricaine des cinéastes (FEPACI), la Guilde africaine des réalisateurs et bien d'autres compétences.

 Comment jugez-vous la qualité de la production cinématographique en Afrique. Est-elle en progression ou en baisse ?

La production cinématographique en Afrique est d'une grande vitalité et en constante progression. Cette vitalité se bonifie davantage d'année en année. La preuve, malgré le contexte mondial marqué depuis plus d'une dizaine d'années par une récession économique, des crises à dimensions multiples et la difficulté de plus en plus accrue d'accéder à des sources de financements, nous avons enregistré l'inscription de mille quarante-six (1046) films pour le FESPACO 2019, mille cent trente-deux (1132) films pour le FESPACO 2021 et pour l'édition 2023 de la biennale, mille cent quarante-deux (1142) films.

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