L'ancienne athlète Kène Ndoye que l'on savait malade depuis plusieurs années, s'est éteinte dans la nuit de lundi à hier mardi à Dakar, à 44 ans.
C'est la fin de parcours d'une belle sportive, autant par sa plastique que par ses performances sur les sauts horizontaux. Recordwoman du Sénégal depuis 2004 du saut en longueur (6,64 mètres) et du triple saut (15 mètres), elle a fait briller les couleurs du Sénégal sur toutes les aires de compétitions d'Afrique et du monde.
Adepte du ballon rond dans sa jeunesse, celle qui était alors, selon ses propres termes, " un garçon manqué ", a découvert l'athlétisme à ses 12 ans par le cross et le demi-fond avant d'être orientée vers les sauts horizontaux. Et dès ses premiers championnats d'Afrique, à Yaoundé, au Cameroun, en 1996, alors qu'elle était encore junior, Kène Ndoye s'est illustrée en remportant deux médailles d'or. À la Longueur, en atterrissant à 6,12 m, effaçant du coup le record national de Mariane Mendoza qui datait de 12 ans et au 4X100 m en compagnie de Tacko Diouf, Ami Mbacké Thiam et Aïda Diop.
C'était parti pour une carrière jalonnée de hauts faits qui lui ont valu à deux reprises (en 2004 et en 2005) la distinction du " Lion d'Or ", l'ancienne distinction du journal " Le Soleil " consacrant le meilleur sportif sénégalais. Les championnats d'Afrique, Kène Ndoye y a maintes fois étalé sa classe : 3ème au triple saut en 98 à Dakar, médaillée d'or à la Longueur et de bronze au triple saut en 2000 à Alger, médaillée d'or à la Longueur et d'argent au triple saut en plus d'une médaille de bronze au... 100 m haies en 2002 à Tunis, un an seulement après avoir donné naissance à son premier enfant, médaillée d'or et nouveau record national à la Longueur (6,64 m) et d'argent au triple saut en 2004 à Brazzaville et 2ème dans chacune de ses deux spécialités en 2006 à Maurice.
Demi-finaliste aux Jo de Sydney en 2000, Kène Ndoye était finaliste des Mondiaux de Paris et a décroché la médaille de bronze du triple saut aux Mondiaux en salle de Birmingham (Angleterre), entre autres performances de haut vol. En fait, Kène Ndoye était une athlète douée mais surtout dotée d'un mental à toute épreuve qui lui a permis de dépasser beaucoup de situations qui en auraient abattu bien d'autres. Toujours prête à puiser au plus profond de ses ressources physiques et mentales, elle était convaincue que, mieux accompagnée, elle " aurait pu battre le record du monde du triple saut ". Parfois, sans son entraineur au moment de s'élancer sur son sautoir, elle a plusieurs fois dû " se débrouiller " toute seule. Comme lorsqu'en 2004, elle avait battu son record du Sénégal du triple saut (15 m) qui tient toujours. " J'avais sauté à 50 cm de la planche ", révélait-elle il y a quelques années.
C'est alors qu'elle se préparait pour les Jo de Londres en 2012, après avoir remporté l'argent du triple saut l'année d'avant aux Jeux africains de Maputo (Mozambique) que Kène Ndoye est tombée gravement malade et s'est résolue à interrompre définitivement sa carrière. Et depuis, elle s'était engagée dans le match de sa survie. Pour n'avoir pas été récompensée à la hauteur des honneurs qu'elle a rapportés à son pays, elle a vécu le calvaire en Italie, à Formia, ville située entre Rome et Naples où elle était établie. Puis à Dakar, à son retour au pays.
L'Etat avait consenti, l'année dernière, à lui octroyer une enveloppe de 10 millions de FCfa pour l'aider à faire face à la maladie qui a fini par l'emporter, lundi nuit.
RÉACTIONS
Sara Oualy, président de la Fédération sénégalaise d'athlétisme : " Elle était courageuse, même en dehors des sautoirs "
" Le Sénégal tout entier vient de perdre une de ses plus valeureuses filles. Kène Ndoye a été une championne internationale qui a écrit l'une des plus belles pages de l'athlétisme sénégalais avec deux titres de championnes d'Afrique.
Elle était courageuse, même en dehors des sautoirs, pour avoir supporté dignement pendant des années la maladie qui l'a emportée. Nous prions Dieu pour qu'Il l'accueille au Paradis.
Ndèye Sira Ndiaye, ancienne athlète et présidente de l'Union pour la promotion et le soutien à l'athlétisme (Upsas) : " Elle est restée digne durant sa maladie "
" On s'est réveillé ce mardi avec cette triste nouvelle. Kène Ndoye a été une championne durant toute sa vie. Sur les aires de compétitions comme durant sa maladie. Elle a été et est restée digne durant sa maladie. Elle avait foi en Dieu. Aujourd'hui qu'elle est arrachée à notre affection, on ne peut que prier pour elle. Que Dieu l'accueille dans son paradis et l'élève au plus haut des jardins célestes. C'est un jour de prières, de compassion ; on ne peut pas dire grand-chose ; le cœur est lourd, les pensées lointaines. "
Mbagnick Mbaye, champion d'Afrique du 100 m en 1989 : " L'athlétisme a perdu une grande championne "
" Je suis vraiment attristé et atterré quand j'ai appris le décès de Kène. Je savais qu'elle était malade et je me disais que ça allait mieux. Je suis tellement touché que je n'ai même pas les mots. Parce que Kène, au-delà d'être une grande championne, une très grande championne, était ma petite sœur. C'était une fille très gentille et respectueuse de tout le monde. Une grande compétitrice aussi. La première fois qu'elle est venue en France, elle était licenciée dans mon club à Sotteville, avant d'aller en Espagne et en Italie. Elle détient toujours le record du club du triple avec plus de 14 m. L'athlétisme, le sport sénégalais en général a perdu une grande championne. Il n'y en a pas beaucoup comme elle ; que le Bon Dieu l'accueille au paradis. "
Amademe Gueye, entraineur Us Ouakam : " Kène est partie, mais la Championne restera à jamais parmi nous "
" Nous venons de perdre une championne, un produit bien modelé par coach Christophe Nassalane dès le bas âge. Plusieurs fois championne d'Afrique, et médaillée de bronze des championnats du monde en salle, Kène Ndoye, qui maîtrisait bien la technique du triple saut, savait aussi bien aborder une compétition de n'importe quel niveau. Son " quatrième saut n'a pas pu la faire sortir de cette maladie. Kène Ndoye est partie, mais la Championne restera à jamais gravée dans nos cœurs et nos pensées ".