A Madagascar, la gestion des flux migratoires internes est un défi pour la capitale malgache. Dépassée par l'arrivée de nouveaux habitants venant des campagnes, depuis plusieurs années, Antananarivo s'est transformée en une ville surpeuplée qui peine à faire face aux impacts de ces migrations dues principalement à un déséquilibre du développement économique sur le territoire.
Avec notre correspondante à Antananarivo, Laetitia Bezain
Recenser les migrants, connaitre les raisons de leur déplacement et leur permettre de mieux s'intégrer, c'est une première étape que veut mettre en place la Commune urbaine d'Antananarivo, en lançant, avec le soutien de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), une application de recensement.
" Tongasoa eto Iarivo " ou bien " bienvenue à Tana ", c'est le nom de l'application qui permet, à chaque quartier, d'enregistrer les nouveaux arrivants.
" Des statistiques à jour sont un début pour que nous puissions voir où nous en sommes et qui se déplace où. Quand nous parlons de migrations, il est aussi important de comprendre quels sont les facteurs qui attirent les gens vers un lieu et les facteurs qui les repoussent d'un lieu. Ce que je constate, c'est que le principal moteur des mouvements de population dans ce pays, ce sont les inégalités", fait savoir Ashraf El Nour, directeur régional de l'OIM pour l'Afrique australe, en visite dans la capitale malgache.
Parmi les migrants enregistrés, vendredi 17 février, par la commune d'Antananarivo, se trouve Clarisse, venue de Manjakandriana, localité située à une cinquantaine de kilomètres de la capitale : " Je pensais que venir à Antananarivo me permettrait d'améliorer ma vie, mais finalement, quand je suis arrivée, la situation était pire que quand je vivais à la campagne et je n'ai pas trouvé de travail jusqu'à maintenant. Ça a aussi été très difficile de s'adapter car quand tu viens d'ailleurs, tu es souvent mis de côté par le reste de la communauté."
Plus de 80 % des migrants à Antananarivo viennent de communes de cette province, d'après les statistiques de la Commune d'Antananarivo. Si la principale raison reste économique, le déséquilibre dans l'accès aux infrastructures de santé et scolaires, sur le territoire, sont aussi des facteurs de migrations.
Marchands de rue de plus en plus nombreux, multiplication des bidonvilles, jeunes dans l'économie informelle... alors que le centre d'Antananarivo suffoque, l'une des pistes discutées avec l'Organisation internationale pour les migrations est de relocaliser les infrastructures comme les marchés, en périphérie.
" Nous essayons de quantifier et de qualifier les maux que nous avons par rapport à un flux qui devient de plus en plus important. La ville a été conçue pour 400000 habitants. Aujourd'hui, dans ses 90 km2, elle est presque envahie. On n'a presque plus de terrains pour construire des infrastructures communautaires. Si c'est le commerce qui est le plus important à l'intérieur de la ville, il va falloir bouger cela dans les pourtours de la ville. Il en est certainement de même pour les centres universitaires et les hôpitaux afin qu'il y ait, justement, distribution de richesses et qu'il y ait un peu plus d'équilibre au niveau démographique", explique Elia Ravelomanantsoa directrice des Arts, de la Culture et de la vie communautaire au sein de la Commune urbaine d'Antananarivo.
La capitale et sa banlieue qui n'ont pas été conçues pour supporter une telle urbanisation, comptent aujourd'hui plus de 3 millions d'habitants.
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