La pièce historique Ranavalona III et le général Gallieni, créée par Victor Solo en 1963 et présentée au public tananarivien en 1965, comporte quatre actes. Yvette Sylla la présente brièvement aux lecteurs de la revue d'études historiques Omaly sy Anio (N°1-2, 1975). Le troisième acte s'ouvre sur Andriamifidy, fils de Rabefarihy, chef Menalamba, et de Rafara. Depuis l'envoi en exil de son père, il est encouragé par le pasteur Lauga à poursuivre ses études en France ((lire les deux premiers actes dans la note précédente). De retour à Madagascar, il devient le secrétaire particulier du général Joseph Gallieni. Il profite de sa situation pour espionner les actions de l'armée française afin de renseigner les Menalamba.
Son confident est le vieux Rainivao (ou Dadavao), un jardinier à qui il ne cache pas ses activités. C'est alors qu'entre sur scène le pasteur Lauga, porteur d'une demande de grâce en faveur de Rainandria-mampandry et de Ratsimamanga, destiné au général Gallieni. D'avance, ils savent que c'est une action vaine. Le pasteur Lauga profite aussi de cette occasion pour mettre en garde Andriamifidy car " Ramahatra et Rasandy l'ont dénoncé ". Andriamifidy, conscient du sort qui l'attend, refuse d'implorer le pardon du général malgré les supplications de sa mère... Enfin, apparaissent sur scène le général Gallieni et son adjoint, le commandant Gérard. Gallieni est furieux contre le résident général Hippolyte Laroche, résident général à l'époque du " protectorat réel " son prédécesseur. Rasanjy et Ramahatra à qui il a donné rendez-vous, sont, en outre, absents. Lorsque les deux " printsy " arrivent, ils se font un devoir de dénoncer Andriamifidy, accusé de collaboration avec les Menalamba. Ce dernier se livre, il est torturé et perd connaissance.
Fin du troisième acte. Le quatrième acte se déroule au Palais de Ranavalona III. La reine discute avec Ratsimihaba, son confident, de la condamnation de Rainandriamampandry, son ministre de l'Intérieur, et de son oncle Ratsima-manga. Elle exprime son chagrin et maudit les traitres qui les ont vendus. L'envoyé de Gallieni, le commandant Gérard, se fait annoncer et demande une audience pour le Général. C'est alors que Rasanjy et Ramahatra font irruption, suivis de Gallieni. Ce dernier manie l'ironie à l'égard de la reine et fait lire par le commandant Gérard, la loi d'annexion qui stipule " que, désormais, tous les drapeaux malgaches seront remplacés par les drapeaux français et que l'esclavage sera aboli ". La reine, effondrée, accuse Gallieni d'avoir monté une sombre machination à l'insu de son gouvernement.
Pourtant, " elle fait preuve d'énergie et de courage devant lui ". Elle se lamente toutefois lorsque ses visiteurs la quittent... La pièce s'achève sur des perspectives désespérantes, indique Yvette Sylla : " Ratsimihaba meurt assassiné aux pieds de sa souveraine, et celle-ci sanglote auprès du drapeau national jeté à terre. " Après avoir résumé le scénario de la pièce, Yvette Sylla commente ce qu'elle appelle " la pièce face à l'histoire ". D'emblée, elle signale que les divers grands thèmes de l'œuvre de Victor Solo et certains détails sont conformes à l'Histoire.
Ainsi, concernant le mouvement Menalamba, l'auteur veut glorifier ce mouvement d'insurrection qui est encore assez mal connu à l'époque où il écrit sa pièce et la met sur scène. Le Mouvement débute, en effet, dans l'Imamo au lendemain de la capitulation d'Antanana- rivo, fin 1895. Il s'amplifie sous la direction de chefs prestigieux comme Rainibetsimisaraka et Rabezavana. Yvette Sylla précise que la pièce fait allusion au massacre historique du missionnaire Johnson, car certains insurgés préconisent un retour aux sources ancestrales et rejettent les croyances étrangères.
C'est ainsi que l'on assiste à une véritable guerre sainte et des idoles, telles que Kelimamaza ou Ravololona, ressurgissent. L'une des missions du général Gallieni est de réduire à néant ce mouvement. Yvette Sylla aborde ensuite l'action du général Gallieni. Il rentre en France d'une longue campagne de quatre ans au Tonkin, quand il reçoit l'ordre de s'embarquer en 1896, à destination de Madagascar. La situation dans laquelle il trouve la Grande ile est déplorable : l'insurrection est générale. Sa mission est donc de réaliser l'occupation et la " pacification " du territoire. Il le fait grâce à la politique de la " tache d'huile ".