La nouvelle garde des sceaux de la République prend officiellement les rênes du ministère de la Justice. À l'instar de ses prédécesseurs, elle affirme sa détermination dans la lutte contre la corruption au sein du système judiciaire.
Une priorité des priorités. C'est ainsi que Landy Mbolatiana Randriamanantenasoa, nouvelle ministre de la Justice, qualifie la lutte contre la corruption au sein du système judiciaire. Un point qu'elle a souligné durant la cérémonie de passation de service avec son prédécesseur, François Rakotozafy, à Faravohitra, et lors de sa première prise de parole en conseil des ministres, au palais d'État d'Iavoloha, hier.
"Qu'importe ce que nous entreprendrons pour améliorer le système judiciaire, qu'importe les lois, qu'importe les structures, toutes nos actions seront vaines tant que nous n'arriverons pas à vaincre la corruption", soutient la nouvelle garde des sceaux. Devant le conseil des ministres, elle a mis en avant ses années en tant que magistrate auprès de la Chaîne pénale anti-corruption (CPAC), l'ancêtre du Pôle anti-corruption (PAC), pour dire que, pour elle, la lutte contre la corruption va au-delà des mots.
De l'action et des sanctions. Ce sont sur ces deux fronts justement que la nouvelle ministre de la Justice est attendue dans la lutte contre la corruption au sein du système judiciaire. L'ambition qu'elle affirme et la détermination qu'elle affiche font échos aux leitmotivs tambourinés par ses prédécesseurs. Le constat est cependant que depuis un peu plus de quatre ans, cinq gardes des sceaux se sont succédé à Faravohitra. Et le mandat de chaque ministre, à une exception près, a été chahuté par des scandales liés à la corruption et des malversations connexes.
Dans une allocution tenue en ouverture du conseil des ministres, hier, Andry Rajoelina, président de la République, a souligné, "les changements apportés sont dans le but d'apporter une amélioration du travail, de la concrétisation des projets et des programmes d'actions dans les départements ministériels concernés". D'aucuns attendent donc de l'ancienne sénatrice la traduction de la parole en acte. Des actions franches, concrètes, exemplaires dans la lutte contre la corruption, sur le rétablissement de la crédibilité du système judiciaire et pour la reconquête de la confiance du public.
Durant le conseil des ministres, Landy Mbolatiana Randriamanantenasoa a avancé quatre actions immédiates pour la lutte contre la corruption. Elle cite, entre autres, la multiplication des boîtes à doléances. "Cette fois-ci, chaque doléance fera l'objet d'une enquête. Et si les faits reprochés sont confirmés, il y aura une traduction devant le conseil de discipline. C'est pour démontrer que personne n'est au-dessus de la loi. Que nous sommes dans un Etat de droit", soutient la garde des sceaux.
Crise de confiance
Outre les membres du personnel qui sont en frontline auprès des juridictions et des cours, ce sont les cas de corruption avérés ou présumés à haut niveau qui torpillent la crédibilité du système judiciaire. Des suspicions qui touchent de hauts responsables du ministère de la Justice, les rangs de la magistrature qu'ils soient des magistrats du ministère public ou de siège, ainsi que le commandement de l'administration pénitentiaire. Le dernier scandale qui a fait vaciller la Justice par exemple, éclabousse nommément les principales figures de la hiérarchie judiciaire du pays.
Questionnée par la presse sur les dossiers chauds qui concernent son département, à l'issue de la cérémonie de passation à Faravohitra, la ministre Randriamanantenasoa réplique, "des mesures et des décisions appropriées seront prises. Des enquêtes seront ouvertes". Elle rassure, par ailleurs, que "le principe d'indépendance de la Justice et des magistrats ne se discute pas. Seulement, cela ne veut pas dire que le magistrat a tous les droits. Qu'il n'y a pas de limite. Il n'y a pas d'impunité".
Toute mesure disciplinaire contre un magistrat est du ressort du Conseil supérieur de la magistrature (CSM). Depuis quelque temps, la teneur des réunions du CSM est rarement publiée. Surtout lorsqu'il s'agit des décisions prises contre des magistrats lorsqu'il siège en conseil de discipline. S'ils se précipitent à vociférer contre d'éventuelles pressions et interventionnistes, les magistrats sont paradoxalement taiseux lorsqu'il s'agit de dénoncer ou juste recadrer leurs pairs, ou bien faire part des sanctions prononcés contre eux.
Les magistrats rendent leur verdict au nom du peuple. Des verdicts qui ne doivent souffrir d'aucune suspicion de partialité, du moins vis-à-vis des dispositions légales. Pareillement, le moindre doute sur la probité des responsables du système judiciaire, à tous les niveaux, affaiblit la crédibilité de la Justice. Certes, il y a la présomption d'innocence. Seulement, la crise de confiance entre la Justice et les justiciables est telle que chez ces derniers, c'est la suspicion de culpabilité qui prévaut.
Les hésitations, voire l'inertie face à des sujets fracassants n'arrangent pas les choses. Pour briser cette crise de confiance des citoyens vis-à-vis de la Justice, il est impératif de transcender les mots et être sans merci contre tout fait de corruption, à tous les niveaux et sans distinction de statut.