Congo-Kinshasa: D'où vient l'argent du M23?

Congo M23
23 Février 2023

Le point sur la délicate question du financement du M23, alors que les responsables du mouvement continuent de nier tout soutien venant du Rwanda.

"Ce peuple que l'on contraint à l'exil sait contribuer pour sa survie. Il vont aux champs,ils enseignent dans des peites écoles, ils font des sacrifices pour que nous ayons un peu d'argent pour ne serait-ce qu'avoir le minimum pour nous permettre de nous défendre."

C'est la réponse de Bertrand Bisimwa, le chef du M23, quand on lui demande d'où proviennent les fonds qui financent le groupe rebelle.

Si celui-ci nie un quelconque soutien du Rwanda, il met en revanche l'accent sur l'engagement de Kigali aux côtés des déplacés tutsis dans ce pays.

Pas de soutien du Rwanda

"J'ai du respect pour les pays voisins et principalement pour le Rwanda qui a accepté de supporter le fardeau des déplacés... Nous avons toujours contesté les rapports qui parlent d'un soutien du Rwanda en termes militaires, de personnel, ou en termes de moyens financiers" assure Bertrand Bisimwa . Mais si ce n'est pas le Rwanda, alors qui finance le M23 ?

Il y a d'abord l'exploitation illégale des ressources minières des territoires que le groupe armé contrôle. Par ailleurs, les rebelles collectent également des taxes sur la population.

Le Groupe d'experts des Nations unies sur la RDC révèle par exemple, dans un rapport remis en décembre 2022 au Conseil de sécurité, que les taxes imposées par le M23 aux postes frontières de Bunagana et de Kitagoma ont contribué au financement de ses opérations militaires.

Toujours selon l'Onu, le mouvement aurait collecté en moyenne 27.000 dollars par mois rien qu'au poste-frontière de Bunagana.

Un sentiment ambiguë

Quant au soutien financier des réfugiés tutsis au M23, comme l'affirme le chef du groupe rebelle, Bertrand Bisimwa, cette version est considérée avec prudence par Boniface Musavuli, analyste politique et spécialiste des questions sécuritaires.

"Dans le Nord-Kivu où le M23 est en activité, il n'existe pas d'informations confirmées selon lesquelles ce mouvement recevrait l'aide des réfugiés tutsis. S'il s'agit de réfugiés installés dans la région, si cette aide vraiment existe, elle ne doit être qu'infime, symbolique, comparée aux moyens militaires qu'il faut mobiliser pour mener des opérations contre le Congo" précise le chercheur.

Il rappelle par ailleurs que la guerre menée par le M23 n'est pas ethnique mais plutôt économique car elle vise le contrôle des ressources minières dans le Nord-Kivu.

Jason Stearns, responsable du Groupe d'étude sur le Congo, précise pour sa part que le soutien des réfugiés tutsis au M23 n'est pas unanime.

"Il est vrai qu'il y a une grosse population tutsi congolaise qui habite au Rwanda, des personnes qui sont là depuis très longtemps et qui ne peuvent pas rentrer chez elles au Congo. Et dans cette communauté il y a un soutien parfois au M23 mais il y a aussi un sentiment ambiguë. Il y a ceux qui savent que ce même M23, qui se présente comme un protecteur de la communauté tutsie, aggrave par son existence la discrimination contre eux et le ressentiment contre cette même communauté " explique Jason Stearns qui précise que beaucoup de réfugiés congolais tutsis pensent ainsi que l'offensive du M23 ne fait qu'aggraver la discrimination à leur encontre et la durée de leur exil au Rwanda.

AllAfrica publie environ 600 articles par jour provenant de plus de 110 organes de presse et plus de 500 autres institutions et particuliers, représentant une diversité de positions sur tous les sujets. Nous publions aussi bien les informations et opinions de l'opposition que celles du gouvernement et leurs porte-paroles. Les pourvoyeurs d'informations, identifiés sur chaque article, gardent l'entière responsabilité éditoriale de leur production. En effet AllAfrica n'a pas le droit de modifier ou de corriger leurs contenus.

Les articles et documents identifiant AllAfrica comme source sont produits ou commandés par AllAfrica. Pour tous vos commentaires ou questions, contactez-nous ici.