L'association Bantu culture, que préside Cherel Otsamigui, en partenariat avec le Centre culturel Zola, a organisé, le 21 février à Brazzaville, une conférence-débat sur le thème " Les langues maternelles en danger au Congo ", à l'occasion de la célébration de la Journée internationale de la langue maternelle dans le monde. Cette cérémonie marque la troisième édition au niveau de cette association.
Afin de sensibiliser, conscientiser, édifier et rendre hommage à la Journée mondiale de la langue maternelle, l'association Bantu culture a rassemblé un public hétérogène, notamment des conférenciers, des professeurs, des élèves de 5e et 4e, des mécènes culturels, des parents d'élèves et des journalistes de divers horizons pour échanger et débattre sur les langues maternelles telles le lingala, le kituba et les autres langues ethniques qui sont jusque-là un tabou dans les écoles, dans les administrations, dans les lieux de prières et dans la majeure partie des familles congolaises.
" Nous célébrons cette journée, question d'accompagner les organisations internationales dans la promotion du multilinguisme à travers le monde. La langue maternelle est définie comme la première langue que l'enfant parle quand il est né. Aujourd'hui, avec la mondialisation, nombreux sont les jeunes, les élèves qui ne s'intéressent plus à leur langue maternelle au profit de celle de Molière. C'est pourquoi, l'association Bantu culture, dans sa vision de promouvoir la culture africaine en général et congolaise en particulier, veut montrer l'importance et la place de cette langue dans l'éducation des enfants et de tous ", a fait savoir Chérel Otsamingui, président de l'association Bantu culture.
Dans le même contexte, Birane Oyindza, enseignant actif de français des lycées et l'un des conférenciers, a fait une autopsie de la langue maternelle en mettant l'accent sur la législation des langues maternelles dans l'apprentissage. Selon lui " L'expression de la langue maternelle nous est parvenue au moyen de la colonisation.
Et, les Blancs avaient compris qu'il n'y a pas de culture sans langue si bien qu'ils nous ont imposé le français, faisant de celle-ci une langue officielle, d'intelligence et d'élégance dans les administrations et dans les écoles... ". Il a ajouté qu' " il y en a qui ne comprennent pas totalement le français, ce qui fait qu'ils sont marginalisés. Pourtant, nous retrouvons dans l'ouvrage de l'écrivain congolais Henri Lopes (le Pleurer-rire) des mots comme pili-pili (le piment), elengui (délicieux), sukali (sucre) qui sont en lingala et font leur apparition dans le français et aujourd'hui, cela est autorisé. Un enfant qui ignore sa culture est un analphabète national ", a-t-il dit. Il a également profité de l'occasion pour exhorter d'autres professeurs à enseigner aux enfants d'autres cultures via la langue maternelle.
Quant à Maman credo, artiste chrétienne et promotrice du festival Zaba, " l'apprentissage de la langue maternelle doit aussi se faire dans les églises quelles que soient nos religions. Au moment de la prédication, de l'intercession, de la louange, valorisons ces langues car elles représentent notre identité. A tous ces enfants qui sont dans les groupes d'Ecodim, de Yamboté, de Scout, c'est le moment d'apprendre. Toutes les deux semaines dans le monde, une langue disparaÏt et ce n'est pas ce que nous voulons "
Cette conférence a pris fin par la visite du stand d'exposition d'ouvrages traduits en plus de cinquante langues maternelles par l'organisation des traducteurs internationaux, partenaires de l'association Bantu culture.
Rappelons que la célébration de la Journée internationale de la langue maternelle a été instaurée par l'Unesco depuis 1999 et observée à partir de l'an 2000 dans le monde. Au niveau international, cette journée a été célébrée sur le thème " L'éducation multilingue, une nécessité pour transformer l'éducation ".