Ce samedi 25 février 2023, 93 millions d'électeurs nigérians vont choisir leur nouveau Président de la République pour la période 2023-2027, parmi les 18 candidats en compétition. Ils vont aussi élire, le même jour, les membres de l'Assemblée nationale fédérale avant de choisir des gouverneurs et parlementaires des États, le 11 mars prochain.
Depuis la réintroduction de la démocratie multipartite en 1999, le système politique nigérian, qui vit la quatrième République et toujours à l'épreuve de la résilience démocratique, connaîtra, ce samedi 25 février, sa septième élection présidentielle consécutive. Qui succèdera à l'actuel Président en exercice de la Fédération du Nigéria, Muhammadu Buhari ? Le général d'armée en retraite, aujourd'hui âgé de 80 ans, dont le deuxième mandat consécutif de quatre ans, le maximum autorisé par la loi, arrive à terme aujourd'hui ? Élu une première fois en 2015, sous la bannière du Congrès des progressistes ou All Progressive Congress (Apc), il rempile en 2019. Aujourd'hui, 93 millions d'électeurs nigérians répartis dans les 176.000 bureaux de vote vont départager les 18 candidats en lice. En outre, les 109 sièges du Sénat et les 360 sièges de la Chambre des représentants seront pourvus. La moitié des 36 gouverneurs d'État vont aussi quitter leurs fonctions au cours de ce cycle électoral.
Parmi les candidats, trois principaux rythmeront le scrutin présidentiel de ce samedi, selon les sondages. Ce sont le candidat de l'Apc, le parti au pouvoir, Bola Ahmed Tinubu, son principal challenger Abubakar Atiku, ancien vice-président et candidat du People Democratic Party (Pdp) et Peter Obi du Labour Party, le candidat des jeunes. Au Nigéria, selon une règle tacite, un Président de la République issu du Nord majoritairement musulman est succédé par un ressortissant du Sud majoritairement catholique, et vice-versa. Ceci en reconnaissance de la composition fragile et équilibrée entre musulmans et chrétiens ainsi que de la diversité ethnique du pays. Par conséquent, cette alternance politique à la tête du pouvoir fédéral, en place depuis 24 ans, signifierait-il pour autant que le Président élu en 2023 soit du Sud et chrétien ? Allons-nous assister à une rupture des schémas traditionnels avec le " muslim-muslim ticket Tinubu-Atiku " si le duo l'emporte sur le candidat Ibo du chrétien sudiste, Peter Obi ?
Le candidat de l'Apc, Bola Ahmed Tinubu, sudiste et musulman, aura la lourde mission de défendre le bilan des huit années de présidence de Muhammadu Buhari. Âgé de 70 ans, l'ancien gouverneur de la capitale économique, Lagos, de 1999 à 2007, promet une embellie économique en plus de mettre fin à la corruption et à l'insécurité dans le pays. Son principal adversaire, est le candidat du Pdp, Abubakar Atiku, nordiste et musulman comme lui. Ancien vice-président du Nigéria de 1999 et 2015, l'homme politique aujourd'hui âgé de 76 ans compte mettre à profit ses huit années d'expérience pour apporter les réformes nécessaires à l'émergence et au développement économique du Nigéria. Toutefois, ces deux vétérans politiques septuagénaires de l'establishment, sont en embuscade avec le leader du Labour Party, Peter Obi.
Âgé de 61 ans, M. Obi, entrepreneur à succès et ancien gouverneur de l'État d'Anambra (sud-est), est le candidat du Parti travailliste. À l'opposé des vieux routiers de la politique, il jouit du soutien des jeunes surnommés les " Obidient " et des masses populaires nigérianes, qui veulent faire entendre leur voix afin de façonner un avenir plus démocratique, plus stable et plus prospère de la plus grande économie d'Afrique. À ces trois favoris, un quatrième challenger, Rabiu Musa Kwankwaso, ancien gouverneur et sénateur de l'État de Kano (nord-ouest) et ancien ministre fédéral de la Défense, dirige le New Nigeria Peoples Party (Nnpp), pourrait jouer les trouble-fêtes.
Sécurité, corruption, difficultés économiques au cœur de la campagne
Les questions sécuritaires, l'impunité, la corruption, l'inflation généralisée, la cherté de la vie, la pénurie du naira dans les banques et la crise récurrente du carburant qui inquiète la commission électorale, ont été au cœur de la campagne présidentielle du pays le plus peuplé avec près 220 millions d'habitants et première puissance économique du continent. Compte tenu des enjeux, l'Ong Human Rights Watch a alerté sur l'impunité et l'insécurité généralisée dans cette Fédération qui pourraient menacer le bon déroulement de ces élections générales de 2023 tout en invitant les pouvoirs publics à bien les prendre en charge. Ils ont promis, tant qu'ils sont, de remédier à la violence, abus fréquents et autres préoccupations sécuritaires.
Les candidats à la présidence doivent remporter 50 % des voix au niveau national et au moins 25 % des voix dans au moins 24 des 36 États du Nigeria pour s'assurer la victoire. Si les candidats n'obtiennent pas de majorité au premier tour, les deux premiers s'affronteront lors d'un second tour. Les réformes électorales en cours, notamment la loi électorale de 2022 qui autorise désormais le vote et la transmission électronique des résultats des élections, l'accord de paix signé par les trois principaux candidats pour apaiser les tensions en vue d'un scrutin pacifique, la neutralité et la loyauté de la Commission électorale au seul peuple nigérian exprimée par son Président Makhmood Yakubu, constituent autant de gages qui devraient améliorer la transparence et la régularité des élections et réduire les possibilités de fraude électorale.