Un panel de psychologues, psychiatres et activistes étaient réunis ce week-end du 25-26 février au Bushman Hôtel d'Abidjan, à l'initiative de l'ONG GT Fondation, pour une conférence de sensibilisation au suicide. Un événement rare en Côte d'Ivoire, où les questions de santé mentale sont encore largement taboues.
Malgré son thème particulièrement sombre, la conférence a fait salle comble. Les panelistes, professionnels de santé mentale ou activistes, ont rappelé que l'Afrique était le continent avec le plus fort taux de suicide, et la Côte d'Ivoire le troisième pays d'Afrique dans le classement. Pour expliquer ces chiffres, le psychothérapeute Nour Bakayoko avance plusieurs explications :
" Ici, par exemple, on dit : "Si t'es trop fâché, faut te tuer." On a tendance à tout banaliser en Côte d'Ivoire. Et c'est un des facteurs favorisant toutes les maladies psychiques. Pour quelqu'un qui a vécu la crise de 2002, la crise de 2011 et les différentes mutineries qui ont eu lieu, il y a forcément des séquelles au niveau psychique. Donc, on pense qu'ici, on a beaucoup besoin de thérapeutes, on a beaucoup besoin de suivi. "
Pour la psychologue Yasmine Mouaine, spécialisée en neuropsychologie, les efforts de conscientisation opérés par les professionnels du secteur et les ONG ont commencé à porter leurs fruits :
" Les mentalités commencent un peu à changer. Les réseaux sociaux démocratisent un peu plus les choses, ça encourage les jeunes et les populations ivoiriennes à consulter. Mais il y a quand même un gros travail de sensibilisation qui doit continuer pour casser les stéréotypes et permettre aux gens de se sentir moins seuls. "
Mais pour l'heure, la santé mentale reste le parent pauvre des politiques ivoiriennes de santé publique : la Côte d'Ivoire ne compte que 35 établissements conventionnels de prise en charge sur tout son territoire.
Il faut croire qu'il y a une réelle souffrance psychologique, mais qui n'est pas entendue, qui n'est pas prise en charge
Côte d'Ivoire : le tabou sur la santé mentale