Ile Maurice: Décidément, tout ne tourne pas rond...

26 Février 2023

La décision de la magistrate Jade Ngan Chai King dans le cas Bruneau Laurette a consterné beaucoup de monde !

Si elle arrive à la conclusion (paragraphe 34) que "having assessed all the evidence on record...", il lui paraît raisonnable que "...the constitutional right of the applicant to be released on bail outweighs the need for him to be continuously detained", les conditions extrêmes de remise en liberté de Laurette établissent un précédent formidablement incommode et proprement inquiétant pour l'avenir !

Voyez vous-même ! Après presque quatre mois de détention préventive où l'enquête n'est toujours pas terminée, les vidéos pas partagées, le FSL encore attendu sur la qualité de la marchandise ; la cour réclame quatre cautions, totalisant Rs 2,1 millions, sous forme de chèques bancaires ; des reconnaissances de dettes personnelles de Rs 50,2 millions ; une obligation de se pointer au poste de police le plus proche deux fois par jour ; le couvre-feu absolu entre 20 heures et 5 heures - toute urgence requérant notification à la police ; une obligation de notifier son emploi du temps détaillé à la police à chaque fois qu'il leur rendra visite et son téléphone mobile, qu'il DOIT garder avec lui, accessible à tout moment, doit désormais être muni d'un "tracking device". De plus, aucun appel international ne lui est désormais permis et il devra ne pas s'approcher de la mer... à moins d'un rayon de 500 mètres !

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C'est du jamais-vu de mémoire d'homme et c'est une bien drôle de remise en LIBERTÉ, les conditions imposées à Dewdanee, par exemple, en 2019, pour 119 kilos d'héroïne valant Rs 1,8 milliard - oui, MILLIARDS - ayant été de Rs 450 000 de caution, doublé d'une reconnaissance de dettes de Rs 3 millions et d'une seule visite quotidienne au poste de police. Il est vrai que chaque cas est unique et que le coût de la vie a beaucoup augmenté depuis...

Et si c'est ainsi pour Rs 240 000 de cannabis et un pistolet sans permis (dont on n'a pas beaucoup parlé jusqu'ici... Une arme "factice" ? (Une vraie ?), qu'en sera-til, désormais, de la dame de 26 ans arrêtée, selon l'express de ce jeudi, à Flic-en-Flac, avec environ un kilo d'héroïne, d'une valeur marchande de... Rs 14,2 millions ? Le ton a été donné, n'est-ce pas ?

Parmi les personnes consternées, pour forcément d'autres raisons, on retrouve la représentante du DPP en cour, qui a, elle, donné avis d'appel pour contester la liberté provisoire de l'activiste. En effet, ce ne sont pas les conditions sévères de remise en liberté qui inquiéteraient cette fois le bureau du DPP, mais le principe même de la liberté de Laurette. Les arguments du DPP, si formulés en cour demain, ont évidemment intérêt à être très solides, car si Laurette reste "andan" en attendant, le nouveau DPP ne peut prendre le risque d'être désavoué, en appel, en Cour suprême, car ce serait plutôt moche pour un début de parcours. On verra bien !

"Si dans l'affaire des ballons, l'on peut soupçonner et la chine et les américains de jouer un peu la comédie, il y a, en point de mire,du beaucoup plus sérieux !"

Mardi matin. Le cyclone Freddy est déjà loin, mais j'ai entendu à la BBC, que je respecte et que j'adore pour ses standards de journalisme, que "...we will go shortly to Mauritius where they are bracing themselves to meet cyclone Francis..." Le "cyclone" nous avait pourtant déjà rendu visite et il avait été... rebaptisé !

Comme quoi, cela peut arriver à n'importe qui et que la perfection n'existe pas. Ou comme me le disait à l'époque un collègue au travail : "Pobody's Nerfect !"

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Ça sent de plus en plus mauvais sur le plan géopolitique mondial, les autocraties ayant tendance à se regrouper, comme le font d'ailleurs les démocraties avec, en zone de combat proxy, l'Ukraine (combat déjà déclenché) et Taïwan (où la valse préparatoire s'accélère malheureusement !)

J'ai entendu cette semaine une conférence de presse (un faux ?) du ministre des Affaires étrangères russe, M. Lavrov, où il tentait de faire le parallèle entre la grande coalition européenne de Napoléon qui voulait, selon lui, "finir" la Russie, la grande coalition nazie de 39-45 qui, ayant d'abord assujetti l'Europe aurait aussi essayé de "finir" la Russie et maintenant la grande coalition américano-européenne qui, en Ukraine, tenterait une fois de plus de "finir" la Russie !

Cette histoire revisitée, c'est du délire pur bien sûr ! On peut supposer que c'est pour continuer à tenir le peuple russe derrière son chef, Poutine ? Mais tout de même ! Il y a des limites à la réécriture de l'histoire de l'humanité...

Pour répéter la vérité historique établie, il y a eu, entre 1792 et 1815, sept coalitions différentes de pays européens contre... Napoléon ! Il n'y a jamais eu, à l'époque, une coalition de toute l'Europe pour détruire la Russie. Si l'Angleterre s'est parfois retrouvée presque seule face à Napoléon qui subjuguait ses adversaires un à un, la Russie n'était PAS l'objet de convoitise principale ni de Napoléon, ni des Européens. D'ailleurs, le traité de Tilsitt signé le 7 juillet 1807 entre Napoléon et la Russie pose les bases d'une alliance... franco-russe !

Pour les nazis, comment peut-il, sans rire, parler d'une Europe unie contre la Russie quand toute l'Europe, sauf pour l'Italie et certains pays mineurs comme la Hongrie et la Roumanie, était plutôt sous la botte d'Hitler, qu'à la gorge du "petit père" Staline !

Quant à l'invasion de l'Ukraine, s'il y a eu déviation des promesses faites aux Russes dans le sillage de la réunification de l'Allemagne, où était le Casus Belli plausible pour envahir l'Ukraine, détruire ses infrastructures, torturer et tuer des civils, comme à Bucha, et tenter de détruire son économie et son identité culturelle ? D'ailleurs, que nous sachions, si l'Ukraine est attaquée violemment depuis un an, il n'y a pas (et il ne lui est pas permis) de contrepartie et la Russie n'est pas du tout attaquée, sauf dans les territoires ukrainiens annexés par force ou sous contrainte, par la Russie, dès 2014 !

La Chine, piquée apparemment au vif par l'affaire des ballons, ne s'est pas cachée pour se rapprocher, cette semaine, de l'ami Poutine. Si dans l'affaire des ballons, l'on peut soupçonner et la Chine et les Américains de jouer un peu la comédie, il y a, en point de mire, du beaucoup plus sérieux ! D'abord Taïwan, producteur de la grande majorité des "chips" électroniques mondiaux et que la Chine veut récupérer. Les Américains ne laisseront sûrement pas faire jusqu'au moment où ils auront eux-mêmes rapatrié le contrôle suffisant des puces électroniques qui comptent le plus ?

Ensuite, il y a les velléités chinoises pour le contrôle de la mer de Chine et où les pays de la région collent de plus en plus aux thèses de l'UNCLOS qui reconnaît bien mieux les intérêts des autres riverains que la Chine. Encore heureux que l'Inde ne singe pas la Chine en exigeant le contrôle de l'océan... Indien ! Finalement, si le commerce extérieur de la Chine ne représente plus que 20 % de son PIB (35 % il y a seulement quelques années), ce commerce, qui totalise tout de même 3,6 trillions de dollars par an, est clairement à risque, si, par exemple, la Chine se rapprochait et armait la Russie en Ukraine.

Le vote écrasant aux Nations unies cette semaine, exigeant à la Russie de cesser les hostilités et d'évacuer les territoires ukrainiens ; 141 pays votant pour (dont la Turquie, la Géorgie, la Hongrie, l'Indonésie, Maurice, l'Arabie saoudite et... l'Afghanistan), laisse la Russie en compagnie plus qu'embarrassante (Biélorussie, Mali, Corée du Nord, Nicaragua, l'Érythrée et la Syrie). Seuls quelques-uns des 32 pays abstentionnistes (Inde, Chine, Afrique du Sud) peuvent conforter la Russie quelque peu, car même s'ils préfèrent raser les murs, entre autres, pour des raisons économiques ou par solidarité BRICS, le soutien officiel à l'envahisseur n'y est manifestement pas !

Le drame, c'est que de tels votes ne changeront ni les ambitions des Russes qui ne voudront pas perdre la face, ni les exigences des Ukrainiens et de leurs alliés. Il n'y a, dès lors, que trois schémas de sortie possible : soit les alliés de l'Ukraine poussent à un compromis territorial quelconque, soit ce sera Poutine qui sera renversé de l'intérieur, soit encore ce sera l'escalade, la spirale vers l'enfer, le possible engagement de l'OTAN et le nucléaire !

Non, décidément, tout ne tourne pas rond en ce moment !

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