Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a déclaré vouloir se rapprocher de l'Afrique et de l'Amérique latine afin de contrer l'influence russe.
Le choix porté par le président ukrainien Volodymyr Zelensky sur l'Afrique et l'Amérique latine n'est pas anodin. En effet, l'influence de Moscou sur ces deux continents s'est accentuée depuis quelques années.
Selon Patrick Mboyo, chercheur en droit public et en sciences politiques à l'Université Paris-Saclay en France, "cela montre que le soutien militaire, économique, financier que ce pays reçoit des pays occidentaux - et la plupart constitués de grandes économies - ne suffit pas, ou ne suffit plus, pour aller au bout de son ambition de tenir tête à la Russie". "C'est une annonce très attendue. D'ailleurs, elle a mis beaucoup de temps à venir, un an après le début de ce conflit. Volodymyr Zelensky avait rappelé que l'aide international ne se résume pas seulement aux pays de l'Union européenne", rappelle le directeur de l'Institut prospective et sécurité en Europe (IPSE), Emmanuel Dupuy,
Soutiens diplomatiques
L'annonce de cette offensive marque en effet le désir d'obtenir des soutiens diplomatiques, notamment au travers des votes à l'Assemblée générale des Nations unies. C'est ce que souligne le général Dominique Trinquand, expert militaire et ancien chef de la mission militaire française auprès de l'Onu.
"Il est important que l'Ukraine puisse faire entendre sa voix auprès d'un certain nombre de pays africains, en particulier pour relayer le message que la guerre russe en Ukraine est une guerre coloniale. Et donc, qu'elle ne peut pas être soutenue par d'anciennes colonies qui ont lutté pour leur indépendance", affirme-t-il.
Un enjeu pour l'Ukraine
Le continent africain constitue un enjeu important pour l'Ukraine mais sa présence reste encore très limitée, rappelle Volodymyr Poselsky, président de l'ONG Ukraine en Europe, enseignant à l'Institut national des langues et civilisations orientales (Inalco).
"L'Ukraine a des capacités limitées pour l'instant. Par exemple, ce pays n'a que dix ambassades sur tout le continent africain. Depuis le début de l'agression russe (le 24 février 2022), Zelensky a parlé quand même à plus d'une vingtaine de dirigeants des pays africains. Et le ministre des Affaires étrangères s'est rendu en Afrique pour la première fois depuis des décennies. Par ailleurs, le continent africain est désormais plus important sur le plan commercial que la Russie."
Le Maroc est ainsi le plus grand importateur de blé ukrainien. Les exportations de blé représentent environ 50% des échanges commerciaux que l'Ukraine réalise avec l'Afrique. Cette part est de 90% pour la Russie.
Selon l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), l'Egypte, grand importateur de blé, achète 20% de son blé en Ukraine mais les deux tiers toujours à la Russie.
Selon Henri-Louis Védie, docteur en sciences économiques de l'université Paris-Dauphine et chercheur principal au Policy Center for the New South, à Rabat, cité par nos confrères de Jeune Afrique, "Au total, 16 pays africains dépendent à plus de 56 % pour leur approvisionnement en blé de l'Ukraine et/ou de la Russie, auxquels viennent s'ajouter 26 pays ayant une dépendance inférieure. L'Afrique est sans doute le plus concerné des continents par sa dépendance au blé russe et ukrainien."