Ce n'est pas la première fois qu'une page Facebook dont le nom comporte le mot "Sun" fait l'objet d'une plainte à la police. Ce n'est pas non plus la première fois qu'une telle page disparaît lorsque la pression monte. Et ce n'est pas la première fois que la police affirme qu'"une enquête en cours" pour expliquer la longue attente...
Les plaintes Lundi, Me Rashid Ahmine a porté plainte contre Sun TV News. La veille, les administrateurs de cette page avaient mis en ligne une vidéo qui remet en doute l'intégrité du DPP en l'accusant d'avoir touché de l'argent pour ne pas contester la libération conditionnelle de Bruneau Laurette et d'être un "Narco DPP". Malgré le communiqué sans équivoque émis par le bureau du DPP lundi matin, expliquant clairement les raisons pour lesquelles il ne ferait pas appel, la vidéo était toujours en ligne.
Ce n'est qu'hier, lorsque la plainte de Me Rashid Ahmine a été publiée dans les médias, que Sun TV News a subitement dis- paru. Une autre page, Power Raising Sun, a mis en ligne une vidéo presque similaire, mais en prenant - à peine - le soin de "masquer" les noms.
"Léker fermal"
Le 10 novembre dernier, Sun TV et Sun Power avaient fait l'objet d'une plainte de trois confrères. Les pages en question les accusaient d'être des trafiquants. Pour rappel, le Premier ministre lui-même avait repris le slogan posté par les administrateurs de ces pages Facebook lors de son discours sur le cannabis thérapeutique à l'Assemblée nationale le 29 novembre dernier. C'est d'ailleurs la page Sun Power qui avait posté un mème le 15 septembre dernier sur l'arrestation de Bruneau Laurette par la Special Striking Team, soit plus d'un mois avant que cette "prédiction" ne se réalise. De- puis, les deux pages ont aussi été "taken down".
Plus de trois mois plus tard, qu'en est-il ? Sollicité hier à ce propos, le responsable de communication de la police, l'inspecteur Shiva Coothen, a fait savoir qu'il n'est pas au courant de l'avancée de l'enquête et a promis une réponse bientôt. En attendant, Me Azam Neerooa et la magistrate Vidya Mungroo-Jugurnath avaient été attaqués via cette même page il y a quelque temps, sans qu'aucune action ne soit prise par les autorités. Le 26 janvier de cette année, ce sont deux journalistes de La Réunion qui avaient fait l'objet d'un post virulent des administrateurs.
Mais à côté de cela, Avinash Bissessur, le frère d'Akil Bissessur, a été convoqué aux Casernes centrales samedi dernier et il devra y retourner samedi prochain, sur la plainte d'un policier pour Breach of ICTA. "J'avais posté la vidéo CCTV de la perquisition chez mon frère. Un des policiers qui y participait affirme avoir eu des problèmes psy- chologiques par la suite. So léker inn fermal... Donc, on m'interroge suite à sa plainte", explique Avinash Bissessur. Pourquoi cette plainte a-t-elle été traitée plus vite que les autres ? Est-ce que la police n'arrive pas à retracer les administrateurs des pages disparues ? Pourquoi les enquêtes ne démarrent-elles pas dès que la plainte est enregistrée ? Pas de réponse à ces questions...
On se souvient cependant par le passé que les enquêtes avaient débuté... avant même l'enregistrement des plaintes. Le 15 avril 2020 par exemple, Rachna Seenauth a été arrêtée pour un post humoristique partagé sur Facebook. Les policiers avaient débarqué chez elle à 13 h 24. Son avocat, Me Rouben Mooroongapillay, avait adressé une lettre à plusieurs hautes personnalités du pays pour demander pourquoi il y a eu "such a rush for police to be at her residence at the same time when statement was still being recorded from declarant". Là encore, pas de réponse. Puis, il y a eu la plainte de Kobita Jugnauth contre Rigg Needroo en 2018. Lors du procès, le 15 septembre dernier, l'enquêteur avait concédé que Rigg Needroo a déjà été interrogé avant même que la plainte ne soit consignée...
Qui est derrière ?
Face à la lenteur des enquêtes, Me Antoine Domingue a présenté une résolution pour une réunion urgente du Bar Council afin de condamner "in the strongest possible terms the vile attacks" contre l'ancien chef juge Eddy Balancy, le magistrat de la cour de Moka, Mes Rashid Ahmine et Shakeel Mohammed. À plusieurs reprises, ce dernier a rappelé le lien entre les noms de ces pages - Sun - et le MSM. Officiellement, aucun lien n'a été prouvé. Toujours est-il que Sun TV News, encore en ligne, parle de Pravind Jugnauth comme étant "Nou leroi" et "1 zoli garson" (sic).
Me Rouben Mooroongapillay avait qui plus est affirmé lundi qu'un cadre de la MBC est impliqué dans l'administration de ces pages controversées, la direction a toutefois nié. N'empêche, l'avocat persiste et signe. "Je maintiens ce que j'ai dit. Un cadre de la MBC est impliqué. Ils vont devoir répondre de leurs actions." Un autre nom cité avec insistance concerne un proche du pouvoir qui était accusé, dans le passé, d'actes indécents et de breach of ICTA. Sa version des faits est attendue.