Le commissaire de police (CP), Anil Kumar Dip, qui n'était pas au pays lorsque Bruneau Laurette a été libéré sous caution, lundi le 27 février, serait rentré en urgence. Et il semblerait que la guerre soit déclarée entre la Mauritius Police Force et le bureau du Directeur des poursuites publiques (DPP)...
Dans un communiqué explosif émis hier après-midi - et relayé par le Government Information Service sur sa page Facebook - Anil Kumar Dip revient sur l'affaire Bruneau Laurette et qualifie la décision du bureau du DPP, Rashid Ahmine, qui n'a pas objecté lundi à la remise en liberté conditionnelle de l'activiste, d'"evil precedent"... Pour appuyer ses dires, le CP argue que plus de 337 personnes sont actuellement en détention préventive pour trafic de stupéfiants. La quantité de drogue saisie sur elles de même que leur valeur marchande sont inférieures aux 40 kg de haschisch estimés à quelque Rs 200 millions.
Selon Anil Kumar Dip, l'affaire Laurette a créé un "dangereux précédent", arguant que les avocats des 337 présumés trafiquants pourraient désormais réclamer la liberté conditionnelle pour leurs clients ; et que si ces derniers sont libérés, cela aura un impact négatif sur la population et mettra en danger la sécurité des jeunes ainsi que le travail entamé par la police pour protéger la communauté dans son ensemble.
Le CP rappelle en outre dans le communiqué que la police "respecte la décision de la magistrate et la prérogative du DPP" concernant Bruneau Laurette - qui avance que la drogue aurait été plantée dans le coffre de sa voiture - mais indique que, dans son ruling, la magistrate souligne que le risque que Bruneau Laurette quitte le pays est bien réel. Il ajoute que la police ne "peut empêcher l'activiste de passer des appels internationaux et d'avoir accès à qui que ce soit".
Ce qui est certain, c'est que la teneur de ce communiqué fait sourciller plus d'un. Pourquoi la police ferait-elle une telle annonce alors que les avocats de Bruneau Laurette ont mentionné que l'application d'une caution est un droit constitutionnel de tout individu détenu sous le coup d'une accusation provisoire ? Pourquoi, en 2019, lorsque Geanchand Dewdanee, arrêté dans le cadre de la saisie de 119,5 kg d'héroïne d'une valeur de Rs 1,8 milliard, la police n'avait pas jugé utile d'émettre un tel communiqué ? Pour rappel, l'accusation provisoire de trafic de drogue qui pesait contre Geanchand Dewdanee a été rayée en cour intermédiaire par la suite en 2020.
Fait notable aussi : aucun communiqué n'a été émis aussi après la libération sous caution du multirécidiviste Vishal Shibchurn qui est ressorti de prison le 14 février, tout comme son fils, Mayur. Père et fils avaient été arrêtés le 6 novembre 2022 avec de la drogue estimée à environ Rs 500 000. Ces habitants de St-Hubert se disent d'ailleurs également victimes de "planting". Après le ruling du magistrat au tribunal de Grand-Port, il n'y a eu aucune objection à la décision de leur accorder la liberté conditionnelle.
Interrogé, Me Rouben Mooroongapillay, un des avocats de Bruneau Laurette, réagit : S'il considère cela comme un Evil Precedent, why did not he take advice and proceed as per this section within seven days as per section 4 (5) de la Bail Act? (...) To wait after seven days to make such comment is most inelegant and inappropriate. D'autant que le CP doit travailler avec le bureau du DPP pour les poursuites. Ça a tout l'air d'une mauvaise cohabitation".