Les 2 et 3 mars 2023 se déroule un " Atelier autour des enjeux du monde carcéral " à Madagascar, pays où l'état des prisons reste désastreux. Les acteurs de ce milieu veulent profiter de cette réunion pour présenter des stratégies innovantes et améliorer ainsi les conditions des prisonniers. Explications.
Surpopulation carcérale, vétusté des infrastructures, malnutrition, insuffisance de personnel ... L'état désastreux des prisons malgaches, rendues tristement célèbres par un rapport d'Amnesty International en 2019, ne s'est pas arrangé depuis trois ans : c'est le diagnostic tiré fin janvier par les acteurs oeuvrant dans le milieu carcéral. Un mois après, tous ont décidé de se réunir à nouveau pour aborder le futur, cette fois, et présenter des stratégies innovantes pour améliorer les conditions carcérales des prisonniers.
" Malnutrition "
" Mourir de faim ? Oui, ça peut arriver dans les prisons malgaches. " Constat sans appel, pour Aina Tantely Rakotomalala, Directeur de l'humanisation de la détention et de la préparation à la réinsertion sociale. Cette réalité, assure-t-il, préoccupe son ministère, celui de la Justice. " Les plus grands enjeux, chez nous, c'est cette population carcérale atteinte de malnutrition. "
Sur les 30 000 prisonniers que compte le pays, un cinquième souffre de graves carences alimentaires. " Les défis sont immenses, colossaux ! " admet Vincent Dalonneau, le représentant d'Humanité et Inclusion à Madagascar, l'ONG à l'origine de cette grande réflexion entre acteurs du milieu carcéral. Des solutions existent et attendent d'être développées. " Si on rentre juste sur problématique nutrition, l'une des solutions pourrait être les camps pénaux, poursuit-il. L'objectif étant que les personnes détenues puissent sortir la journée, travailler la terre sur des terrains qui appartiennent à l'État pour pouvoir produire et apporter des compléments nutritionnels pour les autres détenus. Le ministère de la Justice vient de créer une direction spéciale dédiée à ces camps pénaux. Pour nous acteurs du milieu carcéral, on voit d'un très bon oeil cette initiative. On a envie vraiment de l'appuyer et de l'accompagner. Parce qu'elle permet de répondre à plusieurs enjeux cruciaux, plusieurs défis qui sont la nutrition avec des compléments nutritionnels, la réinsertion sociale et économique en apprenant un métier de la terre et le désengorgement des prisons, au moins la journée ".
De son côté, l'Agence Française de Développement (AFD), aujourd'hui principal partenaire du secteur pénitentiaire malgache - pour un montant de plus de 10 millions d'euros -, salue un changement de cap pris par le ministère de la Justice.
" Plutôt que de fermer les prisons pour éviter que les regards extérieurs viennent se poser sur des situations qui sont extrêmement difficiles et choquantes, le ministère de la Justice et l'administration pénitentiaire jouent le jeu en acceptant d'ouvrir leurs portes aux ONG partenaires. "
Un premier pas dans l'aide aux prisonniers. Avec trois fois plus de détenus qu'elles ne devraient contenir, avec des peines de détention préventive qui dépassent parfois les 5 ans et qui concernent plus de la moitié des détenus, les prisons malgaches cumulent les défis à relever.
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