Afrique: Prise en charge de la lèpre au Sénégal - 47 cas à Dakar, des villages continuent à accueillir des pensionnaires

La lèpre est toujours présente au Sénégal. Au total, 150 cas ont été détectés l'année dernière dans le pays. Et la région de Dakar reste celle la plus affectée par la maladie, avec 47 cas. Malgré le plaidoyer de plusieurs acteurs de lutte et des défenseurs des droits humains, les villages de recasement continuent toujours de jouer leur rôle. Certains lépreux ont été soustraits de leur famille, pour vivre leur maladie dans des zones réservées à la prise en charge, pour ne pas exposer plus la communauté.

Le ministère de la Santé et de l'Action sociale (Msas) a organisé hier, jeudi 2 mars 2023, une séance d'information sur la situation de la lèpre au Sénégal. La rencontre qui s'est tenue à Dakar, a permis de faire la cartographie des cas de lèpre sur le territoire national.

Le coordinateur du Programme national d'élimination de la lèpre, le Dr Louis Hyancinthe Zoubi, a avancé qu'au cours des trois trimestres de l'année 2022, il a été enregistré 150 cas de lèpre sur le territoire national ; il ressort aussi de ces cas que 47 ont été dépistés dans la région de Dakar, 38 à Diourbel, 12 à Thiès et 11 à Kaolack, qui forment les foyers les plus affectés.

Se basant sur les données de 2019 à 2021, Dr Zoubi a fait savoir que quatre (4) régions ont un fardeau élevé, avec plus de 20 cas par an. Il s'agit de Dakar, Diourbel, Thiès et Kaolack. Deux (2) autres ont un fardeau moyen, entre 10 et 20 cas par an, notamment Saint-Louis et Louga. Cependant, huit (8) régions gardent un fardeau faible de moins de 10 cas de lèpre ; ce sont les régions de Fatick, Kolda, Sédhiou, Matam, Kaffrine, Tambacounda, Kédougou et Ziguinchor.

" En 2023, la situation est toujours stable, c'est en 2016 que nous avons eu un pic par rapport au nombre de nouveaux cas enregistrés. Aujourd'hui, nous oeuvrons toujours à la lutte contre la lèpre, en mettant en place plusieurs stratégies", a fait savoir Dr Louis Hyacinthe Zoubi, médecin épidémiologiste et coordonnateur du Programme national de la lèpre au ministère de la santé et de l'action sociale.

DAKAR, FOYER DE FORTE CONTAMINATION

Dans l'optique de rompre la chaine de contamination, Dr Zoubi a renseigné : "nous avons eu à mener une étude sur le dépistage actif, associé à la chimio prophylaxie. Dans un 1er temps, nous avons ciblé les villages de reclassements qui étaient les anciens foyers de la lèpre. Autour de cette étude, nous avons dépisté des nouveaux cas. La stratégie est de dépister précocement pour pouvoir rompre la chaine de contamination et réduire aussi davantage le nombre de mutilés".

Et de poursuivre : "nous avons eu l'expérience que la plupart des malades qui venaient pour la prise en charge étaient déjà mutilés c'est-à-dire qu'il y a des dépistages tardifs, avec des mutilations, alors que la lèpre peut être guéri sans ce procédé".

Les cas de lèpre sont plus détectés dans la région de Dakar. Selon Dr Zoubi, la capitale sénégalaise, compte tenu de la présence du Centre de l'ordre de Malte qui est un hôpital de référence pour la prise en charge de la lèpre, beaucoup de références y sont faites. "Il faut noter que parmi ces cas qui sont notifiés à Dakar, il y a ceux qui viennent de la banlieue, comme Guédiawaye, Pikine et Yeumbeul, et même des régions. La lèpre est une Maladie tropicale négligée (Mtn) car elle date de longtemps. Non seulement, elle ré-émerge, mais il n'y a pas de financement. Il n'y a pas un intérêt réel par rapport aux Etats et aux partenaires."

DES VILLAGES DE RECASEMENTS TOUJOURS EXISTANTS

Des villages de recasements pour les lépreux continuent toujours à exister au Sénégal, malgré le recul de la maladie. Si certains ont été transformé en village communiqué, d'autres continuent de servir de retraite à certains malades. "Nous avons des cas et nous étions obligé de les placer sous des foyers à cause du taux élevé de contamination. Aujourd'hui, il est possible d'éliminer la lèpre au Sénégal, car nous avons un plan mondial qui est élaboré par l'Organisation mondiale de la santé (Oms). Donc, nous avons une feuille de route pour tous les pays endémiques à cette maladie. Et nous travaillons pour un dépistage précoce, car la lèpre peut se guérir sans que le malade ne garde des séquelles qui sont souvent stigmatisantes", a assuré Dr Zoubi.

Pour rappel, le Sénégal compte 9 villages de reclassements dont Njambo à Saint-louis, Mbaling et Toubapico à Thiès, Teubie et Djibélor à Ziguinchor, Médina Chérif à Kolda, Fadiga à Kédougou, Souane à Fatick et enfin Koutal à Kaolack. Suffisant pour que Pape Mamadou Diagne, président de l'Association sénégalaise de lutte contre la lèpre et les Mtn, s'attaque à la loi 03-76 du 25 mars 1976 qui a régi les villages de reclassements sociaux.

Pour lui, quand on vous dit qu'en 2023, il y a des villages qui n'existent pas, administrativement parlant, dans la cartographie du Sénégal, c'est autre chose. "Nous sommes en train de mener des combats pour l'élimination de cette loi qui est stigmatisant et discriminatoire. C'est une loi obsolète et nous interpellons le président de la République à revoir cette loi pour permettre à ces populations de retrouver leur dignité. On ne peut pas concevoir, à l'heure où nous sommes, qu'on nous parle de villages de reclassement social ; c'est inadmissible."

UN PLAIDOYER POUR L'ACCOMPAGNEMENT DES MALADES

Il y a plusieurs perspectives pour accompagner les malades, du point de vue social et de la réinsertion. Pour Pape Mamadou Diagne, président de l'Association sénégalaise de lutte contre la lèpre et les Mtn, il faut une prise en charge pour ceux qui vivent les séquelles de la maladie. "Nous voulons qu'il y ait un accompagnement psycho-social et des programmes de réinsertion."

AllAfrica publie environ 500 articles par jour provenant de plus de 100 organes de presse et plus de 500 autres institutions et particuliers, représentant une diversité de positions sur tous les sujets. Nous publions aussi bien les informations et opinions de l'opposition que celles du gouvernement et leurs porte-paroles. Les pourvoyeurs d'informations, identifiés sur chaque article, gardent l'entière responsabilité éditoriale de leur production. En effet AllAfrica n'a pas le droit de modifier ou de corriger leurs contenus.

Les articles et documents identifiant AllAfrica comme source sont produits ou commandés par AllAfrica. Pour tous vos commentaires ou questions, contactez-nous ici.