Sénégal: Application baisse des prix du loyer - Des locataires soulagés, mais pas encore rassurés

Le Décret portant baisse des prix du loyer est entré en vigueur, depuis le 1er mars dernier. Cette nouvelle mesure a été un soulagement pour des locataires vivant dans la capitale sénégalaise. Toutefois, ces derniers craignent un relâchement de l'Etat, qui serait synonyme d'un retour au diktat des bailleurs.

Le Décret n°2023-382 du 24 février 2023, modifiant la loi n°2014-03 du 22 janvier 2014 portant baisse des loyers n'ayant pas été calculés suivant la surface corrigée, est entré en application le 1er mars dernier. A Dakar, suite à l'effectivité de la baisse des prix du loyer, des locataires lancent un ouf de soulagement. "J'étais septique, j'ai cru que les bailleurs n'accepteraient pas de se plier à la nouvelle décision de l'Etat. Mais, c'est mon logeur lui-même qui est passé nous notifier qu'à partir de ce paiement (fin février) je vais désormais payer 42.000 francs CFA, au lieu de 50 000 francs CFA", déclare Moussa Tine, originaire de la région de Thiès, locataire au quartier de la Médina.

Si Moussa se réjouit de l'attitude de son bailleur, qui n'a pas été réticent à la nouvelle mesure, Aida, gérante d'une gargote à Fass, révèle avoir tenu tête à son bailleur qui avait voulu faire abstraction du nouveau décret. "Certains locateurs sont têtus. Malgré tout ce qui a été dit dans la presse, concernant la baisse du loyer, ils veulent faire la sourde oreille. Le propriétaire de la maison où ma petite soeur et moi avons loué avait réclamé le même montant que nous payions avant la baisse ; j'ai refusé. Quand il a su que je suis consciente des droits que le nouveau décret me donne, il a fini par se courber", confie-t-elle. La gargotière se réjouit de la nouvelle mesure qui constitue un soulagement, et appelle l'Etat à procéder aussi à une baisse du loyer des baux à usage commercial.

CETTE FOIS-CI, L'ETAT DOIT ALLER JUSQU'AU BOUT

L'initiative de baisser les prix du loyer, jugé trop cher, prise par l'Etat du Sénégal, est unanimement appréciée positivement par les locataires. Cependant, bon nombre de ces derniers craignent qu'elle fasse long feu. Abdou Ndiaye, un taximan que nous avons trouvé à quelques encablures du rond-point Sahm, non loin du Centre hospitalier Abass Ndao, invite le gouvernement à assurer le suivi du nouveau Décret.

"On ne peut qu'apprécier cette initiative que les autorités ont prise, en décidant de baisser le coût du loyer, pour soulager les citoyens sénégalais qui souffrent profondément de la cherté de la vie. Sauf que, malheureusement, elles ont l'habitude de prendre des initiatives pareilles, mais sans assurer le suivi. Cette fois-ci l'Etat doit aller jusqu'au bout. Il n'y pas de travail dans le pays et la vie est trop chère. Les Sénégalais sont fatigués", lance le taximan, en refermant la portière de son véhicule.

Selon l'adage, le bonheur des uns, fait le malheur des autres. Si les locataires se réjouissent de voir les prix du loyer baisser, les bailleurs, de leur côté, se courbent à la décision de l'Etat, malgré eux. "Ce sont nous qui allons subir les conséquences. Personnellement, à cause de ce décret, mon revenu immobilier mensuel a drastiquement baissé. Les bailleurs aussi sont des citoyens, et je crois que vouloir soulager des citoyens ne doit pas être une raison pour mettre d'autres en crise", se plaint Daouda Gaye, résident du quartier Gueule Tapée.

Le bailleur de se résigner : "Ce sera certainement très compliqué pour nous, locateurs. Mais, dans ce cas de figure, quand l'Etat décide, on n'a pas d'autres choix que de se plier à sa volonté", précise-t-il.

L'Etat du Sénégal s'est jusqu'ici montré déterminé à faire respecter le nouveau Décret, en annonçant la création d'une Commission nationale de régulation des loyers, pour l'application et le suivi, et en prévoyant des sanctions contre les récalcitrants. Cependant, des Sénégalais craignent que les bailleurs fassent recours à d'autres stratégies pour déjouer les plans de l'Etat.

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