Afrique: Des personnes en prison pour homosexualité au Burundi

(Photo d'archives) mots-clés : cellule, prison,

Une vingtaine de personnes ont été arrêtées lors du séminaire d'une ONG de lutte contre le sida à Gitega, la capitale burundaise, fin février.

Au Burundi, 24 personnes accusées de "pratiques homosexuelles" sont en prison depuis le 23 février. Elles ont été arrêtées pendant le séminaire d'une ONG de lutte contre le sida à Gitega, la capitale politique du pays.

Selon une source judiciaire, la police aurait découvert des documents sur les droits des homosexuels. La loi burundaise considère comme un crime punissable de plusieurs années de prison les relations sexuelles avec une personne de même sexe. L'Association des homosexuels burundais dénonce la violation de leurs droits.

Le "calvaire" des personnes LGBTQ

La communauté LGBTQ burundaise est victime de stigmatisation, du manque d'accès aux soins de santé dans les structures publiques et d'emprisonnement.

"C'est un calvaire !", témoigne Yves Niyonkuru. Celui que l'on surnomme "La duchesse" est homosexuel et milite au sein de l'association "Rainbow Candle Light" pour défendre la communauté LGBTQ au Burundi.

"On n'a pas de liberté d'expression, poursuit Yves Niyonkuru. Il n y a pas d'avocats, tous les avocats ont renoncé. Nous sommes emprisonnés stigmatisés, nos droits sont bafoués, on est vraiment coincés."

Le militant associatif assure qu'"il y a aussi des populations de la communauté LGBTQ qui sont torturées, tuées ou emprisonnées. Ce sont des innocents qu'il faut relâcher. Il faut que les autorités nous comprennent. Qu'est-ce qu'ils ont fait de mal ? Rien! Parce qu'ils sont homosexuels ? Non ! Il y a des assassins qui ne sont pas arrêtés !"

Un tabou fort

L'homosexualité est un sujet tabou au Burundi. Cinq jours après l'arrestation de 24 présumés homosexuels, en marge de l'échange de voeux avec les élus à l'hémicycle de l'Assemblée Nationale, le 1er mars dernier, au nom de la culture et la tradition, le président Évariste Ndayishimiye est allé jusqu'à appeler la population à bannir les homosexuels, qui sont, selon lui, des parias porteurs d'une malédiction.

Extrait de l'allocution du président Ndayishimiye: "(...) il y a de mauvais comportements : les mariages homosexuels. Dieu l'a-t-il dit ? Il ne l'a jamais prévu! C'est une malédiction ! Je vous demande, à vous les Burundais, de vraiment bannir ce comportement, tous ! Tout Burundais, où qu'il soit, qui s'adonne à l'homosexualité, maudissons-le, tous. Qu'il soit maudit dans notre pays (...)!"

Demande d'enquêtes

Les défenseurs des droits humains tentent de nuancer. Gérard Hakizimana est le président de l'Association de lutte contre le népotisme et le favoritisme. Pour sa part, mais hors-micro, il nous a confié, que "Le Burundi est un Etat de droit, qui respecte la culture et la tradition". Il recommande à "la jeunesse [de] se garde[r] de s'attirer des ennuis inutilement". Néanmoins, le militant appelle le gouvernement à "diligenter des enquêtes minutieusement..., d'inculquer une éducation culturelle aux jeunes et de se garder de violer les droits de ses citoyens."

Le dossier se heurte à la défense des valeurs culturelles dans la société burundaises très conservatrice. Mais sa gestion doit néanmoins rester humaine. C'est du moins l'avis du sociologue Patrice Sabuguheba. Il propose une commission pour débloquer la situation.

"On est confronté a défendre des humains qualifiés de déviants mais on doit arriver à réconcilier la défense des valeurs culturelles et les droits humains, estime le sociologue. Je propose une commission multipartite composée du gouvernement, de la justice, des analystes du comportement, dont les sociologues, les psychologues et les médecins. La commission aura une orientation juste et équitable pour la justice. On aura ainsi trouvé une façon de traiter ces homosexuels humainement."

Les personnes reconnues coupables d'homosexualité risquent trois mois à deux ans de prisons et une amende qui peut aller jusqu'à 100.000 francs burundais.

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