Le chroniqueur et activiste Ras Bath a passé sa première nuit en prison. Il est accusé par la justice malienne de "simulation d'infraction".
Mohamed Youssouf Bathily, dit Ras Bath, a passé sa première nuit à la maison centrale d'arrêt de Bamako Coura, un quartier populaire de Bamako. Le chroniqueur radio et activiste avait estimé, le week-end dernier, que l'ancien Premier ministre, Soumeylou Boubeye Maïga, avait été assassiné par la junte au pouvoir. Interpellé le lundi 13 mars, il a été placé sous mandat de dépôt en début de soirée. Ras Bath est accusé par la justice malienne de "simulation d'infraction". L'emprisonnement du porte-parole du CDR, le Collectif pour le développement de la République, intervient dans un contexte très tendu au Mali avec les grèves en série et des dissensions autour du référendum constitutionnel, ou encore du respect du calendrier électoral.
Pas de surprise
Pour Aliou Touré, du Collectif pour le développement de la République (CDR), leur porte-parole Ras Bath est en prison parce qu'il dérange les autorités de transition à travers sa chronique hebdomadaire, "Les grands dossiers".
"Nous nous attendions plutôt à son arrestation et nous n'avons pas été du tout surpris. Etant une organisation de veille et de contrôle citoyen, le CDR reste attaché aux valeurs démocratiques et républicaines. Souvent, ceux qui chantent les louanges des princes du jour (les autorités de transition), ceux-ci ne sont pas inquiétés. Mais quand tu n'es pas de ce bord, quand tu tiens d'autres propos, tu es inquiété.Nous osons croire que la justice elle est toujours indépendante et que ce n'est pas une justice aux ordres" a confié à la DW Aliou Touré.
Certains parlent de violation de la liberté d'expression dans le cas de Ras Bath. Mais la journaliste Ramata Diaouré préfère de son côté nuancer. Selon elle : "Un activiste qui est personnage public dans un évènement public, qui accuse quelqu'un même sans le nommer d'avoir assassiné quelqu'un, c'est une accusation très grave. Une accusation normalement qui devrait avoir des preuves. En tout cas des débuts de preuves. De ce point de vue-là, la liberté de presse et la liberté d'opinion n'autorisent pas tout. Mais il y'a d'un autre côté, un autre souci, c'est que Ras Bath sait très bien que depuis quelques temps, il y a beaucoup d'auto saisine le concernant. Il se retrouve souvent en délicatesse avec les autorités judiciaires et policières. Cela devrait l'amener à beaucoup plus de circonspection par rapport à certains débats".
La faute à la transition
Selon l'avocat de Mohamed Youssouf Bathily, maître Kassoum Tapo, ce n'est pas son client qui est en faute dans cette affaire, mais plutôt les autorités de transition qui auraient, selon lui, entretenues le flou autour de la mort de Soumeylou Boubeye Maïga.
"Il a fallu sur mes conseils que la famille de l'ancien Premier ministre Soumeylou Boubeye Maïga renonce expressément à l'autopsie pour qu'on leur rende le corps. Ce qui veut dire qu'il y avait des doutes, pour le moins, des doutes, des soupçons sur les causes du décès. Donc c'est le procureur général qui a créé le doute autour de la mort de Boubeye. Donc, s'il se trouve qu'il y a des gens pour dire qu'il a été assassiné, la logique aurait voulu que le procureur de la République déclenche une enquête. A ce titre, les dénonciations de Ras Bath peuvent être considérées comme une dénonciation publique tout simplement" assure à la DW maître Kassoum Tapo.
Ras Bath sera présenté à un juge le 13 juin prochain. Mais le CDR annonce d'ores et déjà que ses avocats feront une demande de liberté provisoire dans un délai d'un mois.