Sénégal: Procès pour diffamation d'Ousmane Sonko - Le chemin qui mène à la présidence passe par le prétoire

analyse

Que nous réserve la journée d'aujourd'hui à Dakar ? C'est en effet ce jeudi 16 mars 2023 que l'opposant sénégalais Ousmane Sonko doit se présenter à la barre pour répondre des faits de " diffamation, injures et faux ". A la base, une plainte déposée contre lui par l'actuel ministre du Tourisme, Mame Mbaye Niang. Le leader du PASTEF l'avait accusé au cours d'une de ses sorties d'avoir détourné 29 milliards du Programme des domaines agricoles communautaires.

L'affaire avait été appelée une première fois en février puis renvoyée parce que le mis en cause affirmait n'avoir pas reçu de convocation. Cette fois, toutes les conditions semblent être réunies pour que le procès se tienne. Reste à savoir dans quelle ambiance ce jugement aura lieu.

Comme toutes les fois où Ousmane Sonko et les autres ténors de l'opposition sont convoqués par la justice sénégalaise, la rue s'en mêle et ça dégénère en actes de violence. L'audience d'aujourd'hui a d'ailleurs été précédée de deux jours au cours desquels le prévenu a chauffé à blanc ses partisans. D'abord mardi où des milliers de manifestants se sont rassemblés et hier où les forces de l'ordre ont cette fois fait barrage aux velléités de protestation, allant jusqu'à empêcher Ousmane Sonko de quitter son domicile.

Ces manifestations interviennent sur fond de contestation de troisième mandat qu'on suspecte Macky Sall de vouloir briguer. Il est vrai que derrière ces dossiers judiciaires, c'est un peu la bataille rangée pour la présidentielle de 2024 qui se joue depuis d'interminables mois.

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D'un côté donc, le président en exercice qu'on accuse de vouloir jouer indûment les prolongations et de l'autre des opposants, notamment Ousmane Sonko qui pourrait voir ses ambitions hypothéquées si d'aventure il était condamné. Et c'est tout l'enjeu de cette journée classée rouge à Dakar.

Comme ce fut déjà le cas dans l'affaire Adji Sarr, le leader de la coalition Yewwi askan wi a de nouveau brandi l'argument de la cabale politique. Ce serait pourtant bien, que ce soit dans l'un ou dans l'autre dossier, qu'il puisse se défendre de ce dont on l'accable plutôt que de se réfugier derrière l'argument, un peu trop facile au demeurant, de la combine politicienne, quand bien même la multiplication des procès qui visent les opposants depuis que Macky Sall est arrivé au pouvoir n'est pas à son honneur. Ce n'est pas non plus à l'honneur de la démocratie sénégalaise qui était considérée pendant longtemps comme le phare de la démocratie en Afrique. Mais force est de reconnaître qu'entre procès d'opposants et embastillements de journalistes, le phare est devenu de plus en plus terne et il faut espérer qu'il ne s'éteigne pas sous les coups de boutoir d'hommes politiques plus préoccupés par leur propre destin que du devenir du pays.

En tout état de cause, on espère que le président sénégalais aura suffisamment de sagesse pour ne pas s'embarquer dans une voie sans issue, c'est-à-dire foncer droit dans le mur, le même mur contre lequel son prédécesseur Abdoulaye Wade s'était déjà fracassé pour avoir lui aussi voulu jouer les prolongations.

Il est vrai que les politiciens n'apprennent jamais du passé mais de là à être totalement amnésique, il y a certainement un pas que Macky Sall devrait se garder de franchir.

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