Les cités universitaires tombent progressivement en ruine. Les occupants se plaignent de leurs conditions de vie.
Hoséa, étudiante en Sociologie à l'université d'Antananarivo, vit en promiscuité avec trois autres étudiantes, dans une petite pièce de deux mètres sur trois, à la cité d'Ambatomaro. Cette pièce leur sert à la fois de chambre à coucher, de cuisine, de salle à manger, de débarras. Bien qu'elles soient déjà à l'étroit dans cette pièce, un cinquième colocataire va bientôt s'y installer.
Des travaux sont en cours pour l'accueillir. Les jeunes filles ont créé un petit étage, avec du bois qu'elles ont commandé depuis Fianarantsoa, pour installer ce nouveau-venu. Hoséa aurait préféré vivre seule dans un endroit plus confortable, pour mieux se concentrer sur ses études, mais, elle ne peut pas faire autrement. " Je n'ai pas le moyen de louer un appartement. Même pour la nourriture, je galère, car le riz, l'huile, l'argent que m'envoient mes parents, ne sont pas souvent suffisants. Je demande souvent à des camarades de classe de me prêter de l'argent pour ne pas dormir le ventre vide. ", nous a raconté, hier, cette étudiante en provenance de Fianarantsoa, qui a redoublé sa première année de Fac. Vivre en promiscuité n'est pas sa seule préoccupation. Elle a surtout horreur de devoir cohabiter avec des rats. " Il y en a partout. ", affirme-t-elle.
Des étudiants se plaignent des conditions très précaires des logements dans les cités universitaires. ÀVontovorona, des étudiants avancent qu'ils doivent utiliser un parapluie, lorsqu'ils font leur besoin dans les toilettes du rez-de-chaussée. Il y a des fuites d'eau. Des sanitaires sont inopérationnels, ceux qui le sont encore sont sales et crasseux.
À Ankatso, les résidences sentent la moisissure, l'humidité se propage dans les mûrs, car les systèmes d'évacuation sont bouchés. Par ailleurs, les installations électriques laissent à désirer. Fano, étudiant en sociologie professionnelle, qui vit à Ambatomaro, évoque sa crainte permanente d'incendie. " Tous les logements vont être réduits en cendres, en cas de court-circuit. Il n'y a plus de disjoncteur dans cette cité, depuis le vol de compteurs en 2018. ", lance cet étudiant qui se transforme en gargotier pendant ses temps libres. " Les provisions que m'envoient mes parents ne sont pas suffisantes, donc, je fais ce boulot, pour arrondir mes fins de mois. ", indique ce jeune homme en provenance de Mananara-Nord. Il a ouvert sa gargote sur la façade du bloc où il vit. À Ankatso, ce sont les logements qui ont été transformés en gargotes ou en salons de coiffure.
Délaissés
Les résidents des logements universitaires sont également victimes de coupures d'eau et de pannes de courant, fréquentes. Ce qui les poussent souvent à manifester. " Depuis deux mois, il n'y a plus de coupure d'eau, mais lorsque cela arrive, nous faisons la quête chez les habitants qui ont des puits. Ces sources d'eau sont à une quinzaine de minutes de chez nous ", indique une étudiante à Ambatomaro.
Ces universitaires se sentent délaissés. Ils blâment l'inexistence de travaux d'entretien des cités universitaires. " Nous versons 18 000 ariary par année universitaire au Centre régional des oeuvres universitaires d'Antananarivo (Croua), mais il n'y a pas de travaux d'entretien. Regardez dans quel état sont nos résidences, les installations électriques, les sanitaires. ", déplorent des étudiants de l'Ecole supérieure polytechnique d'Antananarivo (ESPA) de Vontovorona. " Les agents du Croua ne viennent presque jamais, pour les travaux de nettoyage, on ne s'étonne pas si les rats se propagent. ", indique une étudiante à la cité d'Ambatomaro. Le Croua réplique que la somme de 18 000 ariary est destinée au budget de fonctionnement de cette direction, et non aux travaux d'entretien des logements des cités universitaires. " Nous ne disposons pas d'un budget colossal, pour des grands travaux d'entretien, pour le moment. Nous faisons ce qui est dans nos moyens et avec nos quelques ressources pour assainir et améliorer les cités. Les étudiants doivent également contribuer à cet assainissement. ", indique Aina Mamisoa, directeur du Croua. Pour une année universitaire, si les près de huit mille occupants des sept cités universitaires d'Antananarivo versent, chacun, 18 000 ariary, il y aura près de 150 millions d'ariary de disponibles.