Sénégal: Procès pour diffamation entre Ousmane Sonko et Mame Mbaye Niang - L'affaire renvoyée en audience spéciale au 30 mars

Appelée hier, jeudi 16 mars, à la barre du tribunal de grande instance hors classe de Dakar statuant en matière correctionnelle, l'affaire de diffamation opposant le maire de Ziguinchor, Ousmane Sonko, non moins leader du parti Pastef au ministre du Tourisme Mame Mbaye Niang a été renvoyée en audience spéciale à la date du jeudi 30 mars. Ce renvoi a été demandé par la défense qui se base sur les violences subies par son client de la part des éléments de la police qui l'ont gazé et extirpé de son véhicule pour le ramener de force au tribunal.

Troisième renvoi du procès en diffamation opposant le maire de Ziguinchor, Ousmane Sonko, non moins leader du parti Pastef au ministre du Tourisme Mame Mbaye Niang, responsable du parti au pouvoir, l'Alliance pour la République. Appelée hier, jeudi 16 mars à la barre du tribunal de grande instance hors classe de Dakar statuant en matière correctionnelle, cette affaire a finalement été renvoyée à la demande des avocats de la défense en audience spéciale à la date du jeudi 30 mars prochain. Ce renvoi a été décidé aux termes d'une audience très mouvement ponctuée par plusieurs suspensions.

En effet, prenant la parole peu après l'arrivée de leur client dans la salle 3 du Palais de justice Lat Dior où se tenait cette audience, avec des habits froissés et tachés aux environs de 10h 41, les avocats de la défense ont estimé que ce dernier n'était pas dans les conditions d'être jugé. Selon eux, leur client et leur confrère, Me Ciré Clédor Ly, pour avoir été gazés par des éléments de la Bip (Brigade d'intervention polyvalente de la police nationale) à l'intérieur du véhicule dans lequel ils étaient embarqués, n'étaient pas dans les conditions de comparaitre. Ils ont ainsi sollicité un renvoi. Tour à tour, ils ont pris la parole pour dénoncer devant le tribunal les violences exercées par des éléments des forces de défense et de sécurité sur leur client extrait de son véhicule et conduit de force au Palais de justice.

Estimant que son client a été gazé par la police, la défense évoque son incapacité à comparaître

Prenant ainsi la parole en premier, Me Ousseynou Fall sollicitant un renvoi pour permettre à leur client de voir son médecin, a signifié au président que la défense s'oppose à la tenue de l'audience. " Notre client a été littéralement brutalisé, violenté et tabassé par les forces de l'ordre qui l'ont extrait de force de son véhicule pour le mettre dans la voiture de la BIP et l'amener ici. Vous serez complices de forfaiture, parce qu'Ousmane Sonko doit être suivi par un médecin après ce qui s'est passé. Nous nous opposons à la tenue de l'audience. Il est hors de question que cette audience se tienne. Nous nous opposerons à la tenue de cette audience ", insiste la robe noire qui demande un renvoi.

Prenant la parole à son tour, Me Ciré Clédor Ly a informé la Cour que la défense jusqu'à ce matin était dans les dispositions de plaider cette affaire n'eût été la brutalité exercée par les forces de défense et de sécurité sur son client et lui. " Jusqu'à 4h 30 du matin, j'étais sur le dossier. Il était convenu que je sois chez mon client à 8 h pour qu'on puisse arriver au tribunal à 9 heures. Je demande de simples constatations matérielles et d'examiner les habits de mon client. Si j'enlevais ma robe, vous verriez les séquelles " a-t-il fait remarquer à l'endroit du président du tribunal avant d'ajouter.

" Nous avons voulu retourner à la maison quitte à ce qu'il soit jugé à défaut, mais on nous a interceptés et gazés. Depuis lors, je n'arrive pas à ouvrir les yeux. Je suis dans un état physique et psychologique qui ne me permet pas d'exercer de même que mon client. Il n'est pas en mesure de répondre aux questions. Nous demandons un renvoi, pour être dans des conditions de plaider. Le code de procédure pénale peut dispenser Sonko à comparaître. Je demande au tribunal de renvoyer l'affaire ".

Abondant dans le même sens, Me Kam Guy, avocat du barreau de Ouagadougou nouvellement constitué pour la défense du leader de Pastef a également sollicité du président du tribunal un renvoi pour, dit-il, lui permettre de prendre connaissance de cette affaire. " Dès mon arrivée au Sénégal, j'avais prévu de rencontrer mon client pour échanger avec lui mais j'ai été empêché par les éléments de la Police déployés aux abords de son domicile.

Ils m'ont refusé de le rencontrer parce qu'il était en état de résidence surveillée. J'étais loin d'imaginer ce qui se passe actuellement au Sénégal. Je suis triste lorsque je vois mon client dans cet état, je suis également triste en voyant mon confrère dans cet état. Je suis triste surtout pour ce que le Sénégal représente en Afrique. D'ailleurs, je n'arrive pas à comprendre cette brutalité surtout que la comparution de notre client n'était pas obligatoire ".

Le Parquet et la partie civile s'opposent à un nouveau renvoi

Interpellés par le président du tribunal sur cette demande de renvoi de la défense, les avocats de la partie civile ont indiqué qu'ils s'opposaient " énergiquement " à tout renvoi de cette affaire. " On a entendu longtemps. Un tribunal n'attend pas. Je regrette mais cette requête est tout simplement mal fondée. Je propose de continuer de gérer les débats pour nous permettre de plaider. Celui qui prend la responsabilité d'aller voir son médecin, c'est son problème " a martelé Me El Hadj Diouf qui vient tout juste de se constituer pour la défense du ministre du Tourisme.

Loin de s'en tenir-là, le tonitruant avocat s'en prend vertement à son confrère venu du Burkina Fasso qu'il a traité d'étranger provoquant dans la foulée une vive réaction de ses confrères de la défense qui l'ont invité à retirer ce terme. " C'est absurde ce qu'on veut nous faire croire. Qu'on vienne du Burkina ou des USA, on doit s'imprégner du dossier de son client avant de débarquer au Sénégal. Car, il y a beaucoup de moyens électroniques pour s'informer. Je rappelle à mon confrère étranger que même via WhatsApp, il pouvait recevoir les dossiers. Je me suis constitué aujourd'hui comme lui et je sais ce que dit le dossier. Ensuite, un étranger ne doit pas se permet de porter de faux jugements sur mon pays ".

Invité à prendre la parole, le ministre Mame Mbaye Niang s'est également opposé à cette demande de renvoi. " Je suis venu ici parce que je crois en cette institution. Je suis venu parce que leur client dit qu'il détient un rapport qui m'a épinglé. C'est la troisième fois que je viens. J'ai fait la même chose. Chaque comparution, on me demande de donner mon itinéraire, pourtant cela ne m'a pas empêché d'être là.

Depuis plusieurs mois, je cours derrière la justice pour qu'il me rende justice ". Pour sa part, le représentant du ministère public a également estimé qu'il n'est pas pour un nouveau renvoi de cette affaire qui, selon lui, est en état d'être jugé. " Malgré les péripéties qui se sont déroulées ce matin en dehors de tribunal, je dois dire que ce dossier est en état de jugement et rien ne s'oppose à ce qu'il soit jugé. Car, tous les faits évoqués par la défense ne sont extérieurs à ce tribunal. Par conséquent, nous nous opposons à un nouveau renvoi de cette affaire ", a fait remarquer le substitut du procureur de la République.

Sonko et Me Ciré Clédor Ly admis à l'infirmerie

Pivot dans la défense du maire de Ziguinchor, Me Ciré Clédor Ly qui était extrait en même temps que son client et conduit de force au tribunal à bord d'un blindé de la Bip (Brigade d'intervention polyvalente de la Police nationale) a passé quelques minutes seulement dans la salle d'audience. En effet, peu après sa prise de parole devant la barre pour expliquer au tribunal les conditions dans lesquelles son client et lui ont été amenés de force au tribunal, la robe noire a quitté son client et ses confrères en compagnie d'un jeune homme présenté comme un de ses fils à l'extérieur de la salle d'audience.

Quelques minutes après, ses confrères Me Ousseynou Fall et Me Youssoupha Camara ont annoncé son évacuation par un véhicule du SAMU. S'agissant du leader de Pastef, Ousmane Sonko, il a été emmené à l'infirmerie du Palais de justice pour consultation par son médecin personnel qui a fait le déplacement sur les lieux. Ce dernier lui a même délivré un certificat médical après l'avoir examiné.

Le juge expulse Me Ousseynou Fall qui refuse de sortir

Contrairement à l'adage qui dit que la justice est rendue dans un climat de sérénité, l'audience du tribunal de grande instance hors classe de Dakar statuant en matière correctionnelle dans l'affaire de diffamation opposant Ousmane Sonko à Mame Mbaye Niang s'est tenue dans une ambiance très tendue hier, jeudi. Un avocat de la défense a été même expulsé de la salle par le président du tribunal.

Il s'agit de Me Ousseynou Fall. En effet, prenant la parole dans une salle envahie par un vacarme, peu après l'arrivée de son client, la robe noire a estimé que ce dernier du fait des violences qu'il a subies de la part des éléments des forces de défense n'était pas en mesure de comparaitre a demandé un renvoi. Prenant la parole, le président du tribunal estimant que la " justice est rendue dans la sérénité " a invité tout le monde à garder le silence sans quoi, il n'hésitera pas à faire évacuer toute la salle.

Arrachant de nouveau la parole, Me Ousseynou Fall tout en insistant sur la demande de renvoi de l'audience a invité le juge Mohamed Diop puisque c'est de lui qu'il s'agit à commencer à faire sortir de la salle des éléments encagoulés du Groupement d'intervention de la Gendarmerie nationale (Gign) pour faire régner la sérénité dans la salle. " Nous ne supportons pas la présence des Forces de l'ordre. Ces hommes ne sont pas identifiables.

En plus, ils instaurent une atmosphère tendue dans la salle. C'est inadmissible ce qui se passe et nous n'acceptons la présence des forces de l'ordre. Vous serez complices de forfaiture, parce que Ousmane Sonko doit être suivi par un médecin ". En réaction, le président du tribunal lui a demandé de quitter la salle. Mais, face au refus de l'avocat de la défense de s'exécuter, le juge a tout simplement procédé à une nouvelle suspension de l'audience. Au total, quatre suspensions d'audience ont été dénombrées hier, jeudi.

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