Rabat — Des participants aux premières Journées du cinéma panafricain de Rabat, clôturées jeudi, ont déploré la faiblesse des sociétés de gestion des droits d'auteurs sur le continent, et esquissé des pistes de solutions.
Ils participaient à une table-ronde consacrée aux modalités de fonctionnement des droits d'auteurs et droits voisins. Une des particularités de ces journées cinématographiques articulées autour de rencontres d'échanges, d'ateliers pratiques et de master class.
Pointant par exemple la faiblesse des sociétés de gestion des droits d'auteurs et la méconnaissance des mécanismes devant les régir de même que les retombées économiques potentielles, la productrice et réalisatrice sénégalaise, Angèle Diabang, a insisté sur l'importance de promouvoir une approche pédagogique.
"La problématique doit être d'ordre pédagogique car dans nos pays, les ayants droit ne savent pas souvent à quoi ils ont droit. Dans le plus claire du temps, le créateur ne sait pas à quoi il a droit, ne sait pas comment il doit faire pour prétendre à ces droits ni où aller pour toucher ses droits d'auteurs", a soutenu Diabang.
L'ancienne Présidente du conseil d'administration de la société sénégalaise du droit d'auteur a également souligné la nécessité de sensibiliser davantage les autorités étatiques qui ne comprennent pas toujours les enjeux.
"Autrement, elles se seraient investies davantage pour faire évoluer les choses dans la mesure où c'est une manne d'argent importante aussi bien pour l'Etat que pour les acteurs", a souligné Angèle Diabang.
Elle a dans le même temps insisté sur l'impératif d'accroître la sensibilisation en direction de ceux qui utilisent les œuvres musicales, cinématographiques, entre autres.
"Un rapport de force"
"Ce sont les radios, les télévisions, les salles de cinéma, les restaurants, les hôtels. Il faut une pédagogie à l'endroit de tout ce monde qui utilise nos œuvres et ne savent pas qu'ils sont en faute", a préconisé la réalisatrice.
"C'est une question de rapport de force. Au-delà des acteurs, on considère que les droits d'auteurs sont basés sur des lois. C'est vraiment le cadre législatif qui doit être respecté. Il y a des opérateurs dans des pays qui ont une telle puissance qu'ils peuvent se permettre d'exploiter de manière impunie", a de son côté déclaré Samuel Sangwa, directeur régional de la SISAC.
Il s'agit de la Confédération internationale des sociétés d'auteurs et compositeurs dont la mission est de coordonner les activités des sociétés membres en Afrique, de promouvoir des lois relatives à la propriété intellectuelle.
"'En Côte d'Ivoire, un organisme a été contraint de s'acquitter des droits d'auteurs non pas parce que la société de gestion ivoirienne est mais que l'Etat, par le biais de l'autorité de régulation de l'audiovisuelle a menacé de couper le signal de cette chaîne de télévision", a rappelé M. Sangwa.
Il a ainsi salué une telle conscience de l'Etat de dire : "nous avons une loi qui protège les créateurs vous êtes en train de la violer et si nous enlevons le signal il y aura un manque à gagner".
"On est dans un écosystème où il faut que chaque partie joue le jeu. Les sociétés de gestion des droits d'auteurs ne sont pas parfois puissantes. En Afrique, il n'y a que deux sociétés qui ont plus ou moins une capacité économique du fait de leurs marchés", a fait noter le directeur régional de la SISAC.
Il a ainsi cité les sociétés de gestion collectives des droits de l'Afrique du Sud et du Maroc. "Sur les 80 millions d'Euros que le continent africain a collectés après la crise sanitaire l'Afrique Sud à elle seule y a une part de 30 millions d'Euros", a-t-il fait valoir.
A l'en croire, la plupart des sociétés se montrent impuissantes face à certains groupes qui ont par exemple la capacité de faire venir les meilleurs avocats du secteur pour se défendre face aux sociétés de gestion qui les trainent en justice.
D'un autre côté, il a appelé à ne pas perdre de vue que plusieurs opérateurs n'opèrent pas à partir des territoires. "On est sur une retransmission par satellite où l'opérateur se trouve dans un autre pays mais arrose son contenu sur un autre territoire. Il faut aussi arriver à contraindre ces entités à payer les droits d'auteurs", a insisté Samuel Sangwa.