Dakar — Quelque 300 enfants atteints de paralysie cérébrale sont pris en charge au Centre national d'appareillage orthopédique (CNAO) depuis 2017, a révélé lundi Phillipe Sène, kinésithérapeute spécialisé au CNAO, selon qui que cette situation devrait pousser à "plaider pour avoir des accouchements normaux".
"Depuis que j'ai commencé en 2017, officiellement plus de 300 enfants sont passés. C'est une prévalence extraordinaire qu'il y a dans les hôpitaux. Les hôpitaux doivent également se concentrer, parce que c'est un phénomène de santé publique", a estimé M. Sène, en s'exprimant au nom de l'association des familles d'enfants atteints de paralysie cérébrale.
Il affirme que le fait que les parents se sont "regroupés en association" va permettre de "lutter, de sensibiliser" et de vulgariser "tout ce qu'il faut comme information sur cette maladie, qui est plus ou moins inconnue chez les citoyens et même chez les professionnels de la santé".
"En tant que kinésithérapeutes, nous accompagnons les enfants à avoir un bon développement moteur. C'est-à-dire s'ils ne savent pas tenir la tête, on les aide à le faire. S'ils ne savent pas s'asseoir, on leur apprend à le faire. On leur apprend aussi à marcher, ou à se mettre debout, s'ils n'arrivent pas à le faire", a-t-il expliqué.
Selon lui, "c'est tout le développement neuro-moteur de l'enfant qu'on aide à travers des séances de kinésithérapie un peu spécialisées. On les aide dans leur croissance de tous les jours".
Rokhaya Barr, mère d'un enfant atteint de paralysie cérébrale, invite les autorités étatiques et les bonnes volontés à "aider" l'association des familles d'enfants touchés par cette pathologie. "Nous vivons difficilement la maladie de nos enfants, car la prise en charge et les médicaments sont coûteux, car même le taxi pose problème des fois pour acheminer l'enfant au CNAO", a déclaré cette femme venue assister aux journées portes-ouvertes du CNAO.
"Les médicaments sont parfois en rupture. L'ordonnance mensuelle peut aller jusqu'à 45.000 FCFA, sans compter la prise en charge urgente d'une crise. Nous pouvons venir deux à trois fois par semaine au centre pour un massage", confie-t-elle.
Des ressources humaines spécialisées très rares
"Les ressources humaines sont très rares, parce qu'il faut être spécialisé pour le faire. Sur le point de vue logistique, on fait beaucoup de rééducation. C'est la ressource humaine spécialisée qui fait défaut", a déploré Philipe Sène.
Il soutient que le gouvernement "doit (...) aider" le CNAO à "avoir des kinésithérapeutes spécialisés dans ce domaine". Les kinés ne refusent pas selon lui de prendre en charge les enfants, mais le fait est qu'on a affaire à "un domaine spécialisé", a-t-il fait remarquer.
Il a rappelé que " le coût en kinésithérapie est lourd", une seule séance pouvant revenir à 8000 francs, en l'absence d'une prise en charge. "Dix séances vous reviennent à 80.000 FCFA, alors que c'est un accompagnement qui dure des années. Si l'enfant doit faire 100 séances, c'est à 800 000 francs l'année", a-t-il précisé.
Malgré le manque de ressources humaines, le CNAO parvient, dit-il, à "aider ces enfants à retrouver leur évolution motrice", chose qui n'est cependant pas évidente, selon lui. "Tout dépend du degré de lésion", explique-t-il.
Selon lui, "plus la lésion est importante, plus les dégâts sont importants. Ce qu'il faut faire, c'est plus de prophylaxie, aller en amont, essayer de faire en sorte que les accouchements se passent bien. Si les accouchements se passent bien, on aura moins de paralysie cérébrale".
Il estime que "le plus important, c'est que les mamans comprennent de quoi souffrent leurs enfants et cela est réussi à travers l'association".