Madagascar: L'agriculture comme base...

C'est en août 1866 que la NMS (Norske Misjonsselskap, Norwegian Missionary Society) débuta sa mission en terre malgache avec l'arrivée de John Engh (1833-1900) et Nils Nilsen (1834-1923), accompagnés de leur fiancée respective Johanne Mathilde Abel (1843-1921) et Inger Ommundsen (1845-1921). En décembre 1867, le troisième arrivé, Martinius Borgen (1834-1915), s'établissait à Betafo, alors capitale du Vakinankaratra. C'est grâce aux missionnaires luthériens norvégiens si "Sirabe" (en une d'un numéro du Norsk Missionstidende, de septembre 1881) est sorti de l'anonymat parce que l'administration royale d'Antananarivo avait établi la capitale du Vakinankaratra dans le fief seigneurial de Betafo. Torkild Guttormsen Rosaas (1841-1913) s'établit à Antsirabe dont il découvrit la vertu thérapeutique des sources thermales : à partir de 1872, il bâtit un établissement balnéaire qui allait faire la renommée de l'agglomération, décidant le général Galliéni à en faire le chef-lieu de la région, en 1903, après la conquête coloniale.

La première pierre de l'école "Tombontsoa" d'Antsirabe fut posée le 11 novembre 1962 et l'enseignement y débuta en 1965. Cette école est l'enfant de la NORAD (coopération norvégienne) et de l'Église Luthérienne Malgache. C'est à partir de la ferme-école "Tombontsoa", tenue par les Luthériens, que s'est développée la FIFAMANOR : un centre de recherche et de développement rural en agriculture et en élévage, basé à Antsirabe et programme fort de la NORAD (1972-2008) qui a permis notamment de multiplier par 30 la production laitière et de faire également du Vakinankaratra la première région productrice de pommes de terre, ignames et autres tubercules.

L'IPSATTA (Institut Supérieur en Agronomie et en Technologies de Tombontsoa Antsirabe), qui fait partie de l'Université Martin Luther, a ouvert en 1965, et vient de sortir une nouvelle promotion ("Taratra") d'étudiants ayant obtenu la Licence en sciences agronomiques ou sciences paravétérinaires ou sciences des gestions.

De leur côté, les Jésuites sont implantés dans la Capitale depuis les règnes de Radama II (1861-1863) et de Rasoherina (1863-1868). Outre leurs activités "classiques" d'enseignement général, les Jésuites du Collège Saint-Michel firent, en 1953, l'acquisition d'un terrain à Bevalala, un peu au Sud d'Antananarivo. Un arrêté du 10 avril 1957 les autorisa à y ouvrir une ferme-école à l'origine du CAR (Centre d'Apprentissage Rural, 1973), qui deviendra le CFP (Centre de Formation Professionnelle, 1995). Depuis trente ans, un enseignement supérieur est dispensé au sein de l'EPSA (École Professionnelle Supérieure Agricole), un des sept "U-Magis", projet global des Jésuites pour l'éducation supérieure à Madagascar.

Les Luthériens sont donc parvenus à développer une école, un lycée et une université à vocation agricole, un siècle après leur arrivée à Betafo-Antsirabe en 1867-1872. Les Jésuites, implantés à Antananarivo depuis 1862, avaient également compris cette "vocation agricole" à laquelle ils allaient donner terre, quatre-vingt-dix ans après leur arrivée. Quant à la République malgache, elle compte une École Supérieure des Sciences Agronomiques au sein de l'Université d'Antananarivo. Parmi ses sept établissements, trois sont à régime facultaire (DEGS, Lettres, Sciences), deux à régime intermédiaire, entre école et faculté (Santé et Polytechnique), et deux à régime d'école (École Normale Niveau III et Agronomie).

Le refrain classique, qu'on retrouve dans la littérature et qu'il est de bon ton de reprendre dans les discours politiques, assigne une "vocation agricole" à Madagascar, parfois (sur)qualifié de "grenier de l'Océan Indien" quand bien même il peinerait déjà à nourrir correctement sa propre population. Le hiatus tiendrait justement entre le peu d'actes concrets et le discours officiel. En 2017, et alors que le centre FOFIFA de Moriandro, au Sud-Ouest de Mahitsy, devait célébrer ses trente ans d'existence, la panne de sa chambre froide priva notre laboratoire du riz d'un outil-clé à ses recherches. En cette année 2023, cela fait quatre mois qu'enseignants et étudiants d'une ESSAAgro, qui va sur ses soixante ans, se plaignent d'une panne de courant. "L'agriculture comme base, l'industrie comme moteur..." disait certain slogan politique. Que slogan, et que politique, depuis tant et tant.

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