Congo-Brazzaville: Agora juridique - Des étudiants en droit discutent du statut pénal d'un ancien Premier ministre

A l'initiative des étudiants de l'Université protestante au Congo (UPC) et ceux de l'Université catholique du Congo (UCC), regroupés dans une structure indépendante créée par eux dénommée "Agora juridique" avec comme objectifs, entre autres, de débattre sur les questions scientifiques de hautes factures, il s'est tenu, le 18 mars dans l'auditoire de G1 droit de l'UPC, un débat scientifique contradictoire.

Les deux grandes universités congolaises sont préoccupées par deux arrêts contradictoires rendus par la Cour constitutionnelle sur le cas du sénateur Augustin Matata Ponyo. D'où le thème "La Constitution du 18 février 2006, instrument d'impunité ou non ? Cas des anciens présidents et Premiers ministres à l'aube de l'affaire Matata Ponyo 17 ans après".

Cette thématique a donné lieu à un débat houleux, sans passion et purement scientifique entre les étudiants de la Faculté de droit de l'UPC et ceux de l'UCC. Un duel verbal juridique de haute facture, animé par un jury composé essentiellement de deux éminents professeurs de droit, Roger Songambele et Otshudi, ainsi que l'assistant à la faculté de droit de l'Université de Kinshasa, Me Assani. Du côté des étudiants de l'UPC, le revirement jurisprudentiel qui a donné lieu au second arrêt a sa raison d'être, dans la mesure où la Cour constitutionnelle cherche à combler un vide. Hérésie juridique, ont estimé les étudiants de l'UCC qui ont rejeté en bloc ce raisonnement. Pour eux, les juges de la Cour constitutionnelle n'ont pas vocation à créer des normes juridiques car, la Cour s'étant déjà prononcée sur son incompétence à juger un ancien Premier ministre, la possibilité d'un revirement juridique n'est plus possible.

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Poursuivant leur défense, les étudiants de l'UCC ont soulevé au jury un principe classique de la procédure pénale qui stipule : "Non bis in dem", pour dire que nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement en raison d'une infraction pour laquelle il a déjà été acquitté. Pour ces étudiants, la Constitution ne consacre pas du tout l'impunité mais elle est tout simplement muette quant aux juridictions devant lesquelles des anciens présidents et Premiers ministres doivent être jugés. Ils ont recommandé aux parlementaires de légiférer sur le statut pénal des anciens présidents de la République et Premiers ministres étant donné qu'à ce jour la question n'est réglée par un quelconque texte juridique, à part l'arrêt R. Const. 1816 qu'ils ont qualifié d'inconstitutionnel et ne pouvant s'appliquer qu'aux futurs anciens présidents de la République et Premiers ministres.

En fait, les étudiants de l'UCC ont rallié la position de leurs collègues de l'Université de Kinshasa et des professeurs et chercheurs en droit sur la question des poursuites pénales contre les anciens présidents de la République et Premiers ministres. Ils ont unanimement fait le constat qu'à ce jour, il n'existe aucun texte juridique qui règle la question du statut pénal des anciens chefs de l'Etat et des Premiers ministres. Cet exercice de la rhétorique juridique a permis aux membres du jury d'évaluer et de plébisciter l'UCC, vainqueur de ce duel avec 254 points sur 300, contrairement à l'UPC qui a récolté 228 points par rapport aux critères retenus.

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