Maroc: La complexité de la conjoncture actuelle nous amène à des arbitrages encore plus difficiles

Le wali de Bank Al-Maghrib, Abdellatif Jouahri

L'économie nationale évolue désormais dans un environnement externe globalement défavorable et incertain. Tel est le constat que dressait récemment le wali de Bank Al-Maghrib, Abdellatif Jouahri, soulignant la complexité de la conjoncture actuelle.

Ainsi qu'il l'a fait remarquer lors de la Conférence nationale sur l'environnement des affaires, les séquelles de la pandémie s'imbriquent avec les implications du conflit en Ukraine, dont notamment les perturbations des chaînes d'approvisionnement, l'accélération de l'inflation, et comme corollaire, une hausse des taux, un durcissement des conditions de financement, un ralentissement de l'activité économique.

A cet environnement externe complexe et difficile s'est greffé récemment "l'enclenchement de ce qui pourrait devenir une crise bancaire aux Etats-Unis", a poursuivi Abdellatif Jouahri.

"Tout cela vient se recouper avec des changements de paradigmes déjà à l'oeuvre, liés à la transformation digitale, la fragmentation géopolitique, ainsi que la montée du souverainisme économique et des exigences en matière climatique", a constaté le wali de la Banque centrale.

Le problème, c'est que "cette conjoncture complexe nous amène à des arbitrages encore plus difficiles", a-t-il déclaré lors de cette rencontre tenue sous le thème "Une nouvelle génération de réformes".

En effet, l'environnement ainsi décrit est tel qu'au plan de la politique monétaire, Bank Al-Maghrib a dû augmenter le taux directeur pour prévenir tout désancrage des anticipations et l'enclenchement de spirales inflationnistes auto-entretenues.

Quand bien même ces décisions peuvent avoir des impacts indésirables à court terme, Abdellatif Jouahri estime que "le coût de non-action est largement plus élevé à moyen et long termes".

De ce point de vue, le wali note que "l'unanimité au sein des communautés financière et académique est claire, il ne peut y avoir de croissance durable et inclusive sans stabilité macroéconomique, en particulier celle des prix".

Pour lui, ce constat est valable de manière plus générale pour toute réforme nécessaire et "la reporter ne ferait qu'accentuer sa difficulté et alourdir son coût économique et social".

A propos des réformes, devant un agenda chargé et des pressions sur les ressources de l'Etat, le wali de Bank Al-Maghrib affirme que "le grand défi est d'opérer un saut qualitatif de l'investissement privé au bénéfice de la croissance et de la création d'emplois".

Cet objectif n'a d'ailleurs jamais été absent de l'action de la Banque centrale, assure-t-il. Pour preuve, "nous poursuivons les efforts dans tous nos domaines d'intervention en faveur notamment de la TPME pour faciliter son accès au financement à travers des programmes dédiés et la diversification des instruments de financement".

Comme il l'a affirmé, "nous travaillons de façon permanente à l'amélioration de la relation banque-client, à la promotion d'une concurrence saine, à la digitalisation des services bancaires en veillant également de très près sur la solidité du système bancaire à travers la mise en oeuvre de règles prudentielles en ligne avec les standards internationaux,... ".

"Malgré le contexte externe difficile, nous n'avons d'autre choix que d'oeuvrer à l'accélération du rythme de développement de notre pays, capitalisant dans cela sur les avancées réalisées et les chantiers initiés sous le leadership de Sa Majesté le Roi".

L'occasion pour le wali de rappeler les nombreux atouts du Maroc dont la stabilité politique, un agenda de réformes important, un environnement des affaires largement assaini, un système bancaire solide et compétitif ainsi qu'un positionnement international privilégié.

Pour M. Jouahri, il est évident que c'est à la faveur de ces atouts que le pays engrange des succès notables.

Pour preuve, il évoque la sortie de la liste grise du GAFI, l'attractivité comme l'illustrent le volume annuel des IDE et le succès de la dernière émission du Trésor, la confiance des institutions internationales comme en témoigne l'accueil des Assemblées annuelles du FMI et de la Banque mondiale en octobre prochain.

Et, comme il l'espère, l'octroi dans quelques jours par le FMI de la Ligne de Crédit Modulable qui constitue une consécration "de la solidité des cadres de politique économique et du bilan du Maroc", a-t-il souligné.

Toutefois, pour consolider les avancées et réaliser les objectifs que s'est fixés le Maroc, le wali estime qu'il est impératif que toutes les parties prenantes fassent converger ensemble leurs actions et leurs efforts.

Selon lui, "cela ne peut se faire qu'à travers le dialogue permanent, le suivi régulier et l'évaluation; le tout en synergie et dans un esprit constructif loin de toute surenchère et invective".

Dans ce sens, la Banque centrale "s'engage à renforcer son rôle de conciliateur comme elle l'a fait en 2016 et en 2019 lorsqu'elle a réuni les représentants de l'entreprise avec le système bancaire et plus récemment lorsqu'elle a organisé plusieurs rencontres entre les représentants de la Nation et les présidents des banques", a-t-il assuré.

Enfin, si la question de l'investissement a toujours été d'actualité au Maroc, Abdellatif Jouahri affirme qu'elle l'est davantage dans cette ère post-covid marquée par une succession de crises et de chocs invraisemblables.

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