Kenya: L'opposition veut poursuivre les manifestations contre l'inflation malgré l'interdiction

Photo d'archive d'une marche de l'opposition kenyane

Au Kenya, la contestation continue. Après la manifestation de lundi 20 mars, l'opposant Raila Odinga a appelé à un nouveau rassemblement lundi 27 mars contre la vie chère. Comme le précédent qui s'est soldé par des violents affrontements et la mort d'un manifestant, ce nouveau rassemblement a été déclaré illégal par les autorités, mais les opposants réaffirment leur droit à manifester, alors que l'inflation y a atteint 9,2 % en février.

Comme la précédente, cette nouvelle manifestation a été déclarée " illégale " par le chef de la police qui a assuré que ses services n'allaient pas permettre " de manifestations violentes ". Mais Raïla Odinga a réaffirmé depuis l'église dimanche 26 mars : " Nous avons le droit, le peuple kényan a le droit, de manifester dans la paix ", pour dénoncer la hausse du coût de la vie, en affirmant que cette nouvelle interdiction ne l'arrêtera pas.

Cette manifestation se déroulera dans la paix. La loi le permet. Au chef de la police Japhet Koome je dis n'apportez pas la violence, n'essayez pas de compliquer la situation. Vous dites que vous voulez arrêtez tous les manifestants, je suis prêt. Je serai en première ligne des démonstrations. Si nous ne protégeons pas les droits et les libertés des Kényans, nous n'aurons plus de Kenya. Ruto affirme que nous essayons d'apporter l'anarchie dans le pays : non Monsieur Ruto, nous ne voulons pas créer l'anarchie dans notre pays. Mais nous nous battons pour nos droits. Et nous avons le droit de dire la vérité aux kényans. Car c'est cela que nous disons, Monsieur Ruto. Nous avons le droit, le peuple kényan a le droit, de manifester dans la paix. Je sais que vous aimez bien de manière régulière vous exprimer lorsque vous êtes à l'église, je vous réponds depuis l'église. Avec ma coalition, Azimio, nous sommes prêts.

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L'opposant kényan Raïla Odinga promet de manifester pacifiquement malgré une interdiction

Les démonstrations de lundi avaient dégénéré. La police anti-émeute avait tiré des gaz lacrymogènes et utilisé des canons à eau contre des manifestants qui lançaient des pierres et incendiaient des pneus. Un étudiant a été tué par les forces de police dans l'ouest du pays, 31 policiers ont été blessés et plus de 200 personnes arrêtées.

Les commerçants touchés de plein fouet

L'inflation a atteint 9,2 % en février. Le shilling kényan a chuté à un niveau historiquement bas face au dollar, perdant 13 % en un an. Le pays fait aussi face à une pénurie de la devise américaine. Conséquence : les Kényans souffrent d'une flambée des prix.

Depuis son étal de vêtements de seconde main au marché de Toi, Jared Omuse s'en inquiète et fermera son commerce par craintes de débordements. Il comprend pourtant la colère des manifestants : la dépréciation du shilling kényan et l'inflation ont touché de plein fouet son commerce de fripes importés.

" Les prix ont augmenté d'environ 60 %. En ce moment, c'est tellement cher qu'on a du mal à acheter et revendre en se faisant assez de profit. On est obligé de réduire nos marges pour maintenir nos prix et éviter de perdre nos clients ", explique-t-il.

Le vendeur de 28 ans espère que les manifestations pousseront le gouvernement à prendre de nouvelles mesures contre l'inflation.

" Huit dollars me permettaient de tenir une semaine, maintenant, c'est à peine plus de deux jours "

Quelques rues plus loin, Philip Ayeko attend ses clients sur sa moto-taxi : lui aussi déplore la flambée des prix.

" Le carburant est trop élevé, le coût de la vie aussi. Il y a deux mois, l'équivalent de huit dollars me permettait de tenir une semaine, maintenant, c'est à peine plus de deux jours. J'aimerais bien augmenter mes tarifs, mais les clients ne seront pas contents. Ils se font déjà rares, la plupart se rabattent sur les bus. "

Philip ne répondra pourtant pas à l'appel de l'opposant Raïla Odinga. Et déplore l'impact de ces manifestations sur son travail. Selon un sondage de l'institut Tifa, bien que la moitié des Kényans estiment que le pays est dans une mauvaise passe économique, seul un tiers disent soutenir les manifestations.

Une loi fixant une limite de nombre de manifestants

Raila Odinga a lancé un appel à manifester chaque lundi et jeudi. Le président William Ruto l'a exhorté jeudi 23 mars à " arrêter de terroriser le pays " et à mettre fin aux protestations.

Le ministre de l'Intérieur a aussi annoncé dimanche qu'il comptait pousser pour l'introduction d'une nouvelle loi au Parlement, qui mettrait en place de nouvelles règles d'encadrement des manifestations, dont une limite sur le nombre de participants.

Pour faire face à la crise du dollar, le président William Ruto a annoncé que les compagnies pétrolières achèteront désormais leur carburant en shillings kényans. Mais le Kenya fait aussi face à une forte sécheresse qui contribue à la hausse des prix des denrées alimentaires. Et l'affaiblissement de la monnaie kényane a également augmenté les coûts de remboursement des prêts accordés au Kenya.

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