Cameroun: Dans de nombreux cas, nécessité peut faire loi !

Pour conjurer l'avènement de Franck Biya à la tête de l'État comme successeur de Paul Biya, son père, on entend souvent dire que le Cameroun n'est pas un royaume mais une République. Ce que jusqu'à présent, on a malheureusement pas entendu ouvertement dire quelqu'un sur le même registre, est que le Cameroun ne pourrait pas devenir une Principauté, c'est-à-dire un régime politique où la succession deviendrait héréditaire, mais dont le souverain porterait le titre de président de la République.

Pour comprendre pourquoi il n'est pas hors sol d'envisager une telle hypothèse, il faut savoir que les entités existantes qui sont politiquement et internationalement reconnues comme étant des principautés, le sont souvent devenues à cause de la volonté d'un homme où d'un groupe d'hommes qui avaient de bonnes ou de mauvaises raisons, d'une part, de s'établir dans un lieu géographique donné, et d'autre part, d'y instaurer une dynastie dans laquelle la dévolution du pouvoir serait héréditaire. A titre d'exemple, l'histoire des Grimaldi, la famille princière qui règne sur le rocher de Monaco depuis 1297, étaye d'une certaine façon les principales motivation d'une telle entreprise.

Et dans cette logique, généralement, c'est alors la nécessité qui conduit à faire loi et à s'installer de manière durable et pérenne. Les mêmes causes produisant les mêmes effets dans les mêmes conditions, dans les pays africains comme le Togo et le Gabon, où un homme promu à la tête de l'État par d'autres, avec souvent la complicité de la coalition des intérêts de toutes sortes qui se constituent ensuite autour de lui, est parvenu à faire accepter à la camarilla une succession filiale, à cause notamment du besoin de la préservation et de la sauvegarde des acquis indus, l'organisation du besoin de se protéger, devient objectivement non seulement une nécessité vitale pour le groupe, mais surtout un impératif qu'il faut rendre légal en usant de toutes sortes d'artifices, et qu'il rendre acceptable et défendable sur le plan international.

Si l'on considère les choses sur cette base là, telles que les évènements se déroulent au Cameroun depuis 1982, il n'est donc pas exagéré de penser que même si nous ne sommes pas dans un royaume mais dans une république, la tentation de faire muter le régime politique en place en une sorte de principauté de facto, n'est pas complètement à écarter. Dans un tel cas, une principauté étant par définition un petit État où le souverain arbore le titre de prince et où la succession est héréditaire, si les choses étaient amenées à prendre cette tournure là, on s'arrangera simplement à faire en sorte que le prince porte le titre de président, et que les élections soient la couronne dont on coiffera le régime afin de lui conférer le label démocratique d'une république.

Il faut dire que dans le contexte des pays africains du pré-carré français, ceci sera comme toujours au demeurant d'autant plus facile à faire d'une part, parce que le rapport de force qui prévaut depuis 1960 est resté en faveur des équipes que le colonisateur a placé aux commandes, et d'autre, parce qu'il n'y a véritablement aucune force organisée de manière conséquente, face à eux.

Partout dans le monde, les Etats qui n'ont pas d'amis, mais seulement des intérêts, tout comme les hommes et les femmes qui ont amassé des biens matériels et autres, sont d'abord mus par le besoin de les protéger et de les voir prospérer et être transmis à leurs hommes liges ou à leurs progénitures. Si la protection de ce qu'ils ont acquis normalement en toute transparence est naturellement garantie par la loi dans un État de droit, dans une démocrature, un néologisme que j'emprunte au politologue prolixe Paul Heutching, dans un État de non droit, où bien naturellement enrichissement indûment réalisé est la norme, l'impératif de protéger les biens mal-acquis ne s'embarrasse pas d'emprunter des chemins de traverse. Et c'est au nombre de ces cas qu'il faut objectivement intégrer les successions dynastiques qui ont lieu en général dans les Républiques bananières. Qu'elles soient africaines ou d'ailleurs.

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