Licenciée en Relations internationales à la Faculté de sciences politiques administratives de l'Université libre de Kinshasa, Thérèse Kapinga Bukasa occupe le poste de directrice des ressources humaines à l'Agence nationale d'aménagement du territoire (Anat). Engagée dans la lutte pour la promotion des droits des femmes, elle plaide en faveur d'un traitement équitable entre l'homme et la femme en milieu professionnel. Entretien.
Bonjour madame. Pouvez-vous nous dire ce que vous entendez par égalité professionnelle femmes/hommes ?
Bonjour. L'égalité professionnelle implique l'équilibre professionnel entre l'homme et la femme, parce que nous avons tous les mêmes diplômes, avons étudié de la même manière dans les mêmes facultés et universités. Par conséquent, nous avons aussi droit à avoir les mêmes fonctions que nos collègues hommes dans les institutions. Au nom de l'égalité professionnelle, les femmes et les hommes sont appelés à travailler dans la synergie pour porter loin leurs connaissances afin de bâtir la République.
Quelles sont les barrières qui empêchent les femmes d'occuper des postes de direction et de prendre des décisions au sein des institutions.
Les barrières se situent à deux niveaux. Premièrement, au niveau des employeurs qui relèguent la femme au dernier plan. Cela a toujours était un long processus pour que la femme accède au poste de commandement, de prise des décisions. L'homme a toujours été regardant vis- à-vis d'elle. A la moindre erreur de la part de la femme, on en parle partout mais si c'est l'homme qui en commet, cela passe sous silence .
Secondo, c'est la femme elle-même qui croupit sous le poids des pesanteurs. C'est ainsi qu'elle ne sait pas se battre pour donner le meilleur d'elle-même afin qu'on puisse la découvrir et qu'elle puisse accéder au poste de décision.
Cependant, il faut souligner qu'il y a des femmes qui occupent des postes de décision qui étouffent d'autres femmes. C'est pourquoi, on a toujours dit que l'ennemi de la femme, c'est la femme elle- même.
La femme doit savoir que l'accès aux postes de décision n'est pas un cadeau qui lui sera offert sur un plateau d'or, elle doit plutôt montrer de quoi elle est capable. Elle doit se battre et faire preuve de ses compétences.
Auriez-vous une idée originale, innovante, à proposer pour améliorer l'égalité professionnelle ?
Pour améliorer l'égalité professionnelle, il faudrait mettre l'accent plus sur la femme. Elle doit prouver les diplômes qu'elle a obtenus à l'université. Elle doit montrer qu'elle les a mérités. Elle doit prouver qu'elle est mature, a un bagage intellectuel. Au niveau professionnel, c'est le savoir-faire, être et connaître qui va faire en sorte que cette femme puisse se valoir, se découvrir, puisse accéder aux postes de prise des décisions.
Sur quel modèle le leadership de la femme africaine doit-il se construire ?
Il faut savoir qu' un leader est celui qui est à l'écoute de tout le monde, qui se met à la place des autres, qui cherche à connaître même auprès de son huissier comment il vit. Quand on est élevé dans la société, on devient esclave de l'autre, un vrai leader ne vient pas avec des galons pour se considérer comme un super homme mais il est plutôt celui qui sert. Il est animé par le souci du vivre ensemble.
Le leadership africain doit se fonder sur des valeurs qui feront que l'Afrique puisse aller de l'avant. Malheureusement aujourd'hui, nous sommes en train de copier aveuglément ce qui se passe sous d'autres cieux, nous oublions même nos repères. Pourtant, on dit toujours que si un homme n'a pas de repère, il se perd cruellement. Donc, nous devons connaître nos repères, nos pères, nos idoles pour bâtir un véritable leadership africain.
Le leadership se construit autour de valeurs. Quelles sont les vôtres ?
Le vivre-ensemble est la première valeur qui nous est léguée par nos parents. Lorsqu'on naît dans une famille, on t'oblige à connaître ton grand-frère, ton père, le père de ton ami, berf, qui est devant toi. La valeur, ce n'est pas seulement aller à l'université pour décrocher un diplôme. Il faut savoir respecter les autres. Au niveau professionnel, le respect doit être mutuel, parce que les relations qui lient l'employeur à l'employé sont des relations de collaboration et non de dictature. Au travail, le chef doit savoir respecter ceux qui sont sous son autorité, il est appelé à avoir de limite parce que personne n'est esclave de l'autre.
Quelle personnalité féminine vous inspire le plus ?
En tant que femme, je me suis toujours inspirée de Kimpa Vita, parce que toute jeune qu'elle était, cette femme âgée de 20 ans a su dire non là où les autres disaient oui. Elle s'est opposée là où il y avait l'hypocrisie. C'est une valeur que j'ai toujours portée en moi. Par rapport à sa franchise, à ses décisions, Kimpa Vita a été brûlée vive. Outre elle, j'ai été aussi inspirée par d'autres modèles de femmes comme Sophie Kanza, Maman Ndombe Sita, Nzuzi wa Mbombo.