Les réseaux sociaux se sont invités dans le quotidien des enfants et des jeunes sans qu'ils s'interrogent sur leur impact, notamment sur leur santé mentale. Quels sont les risques qui les guettent ? Que faire pour les éviter et se protéger ? Car derrière un écran peut se cacher de grands dangers. On t'explique tout avec Audrey d'Hotman de Villiers-Desjardins, psychothérapeute et détentrice d'une maîtrise en «Clinical Social Work» des États-Unis. Elle est spécialisée dans le développement de politiques sociales et a géré plusieurs projets et institutions dans les domaines du VIH/SIDA, de la toxicomanie, de l'éducation, de la psychologie, entre autres.
Pourquoi considérez-vous les réseaux sociaux comme un danger ?
Les réseaux sociaux ne sont pas un danger en eux-mêmes. C'est un moyen de communication moderne et extrêmement intéressant, qui a apporté une ouverture vers le monde et vers les autres. Depuis l'arrivée des réseaux sociaux libres, le monde a fait un grand pas en avant et comme tout progrès, il y a du bon et du mauvais.
Pourriez-vous lister les dangers que représentent les réseaux sociaux pour les enfants et les jeunes ?
Les réseaux sociaux et la façon dont nous les utilisons, peuvent être dangereux pour les enfants, les jeunes et les adultes. Le plus grand danger pour l'enfant/le jeune est son ouverture sur un monde dont il ne connaît pas encore les codes. Connaître les autres, différents de soi, c'est merveilleux mais quand on n'a pas encore l'expérience pour se protéger contre des adultes ou des adolescents mal intentionnés alors il y a danger. Les utilisateurs plus âgés connaissent les points faibles des enfants/des jeunes : le désir de plaire, d'être accepté, de se sentir important, écouté, entre autres, et ils utilisent ces besoins de base pour avoir du pouvoir sur l'enfant. Et ce pouvoir recherche alors des gratifications sexuelles et/ou monétaires.
Un autre danger, c'est l'addiction aux réseaux sociaux. Download est une application pour comptabiliser le temps qu'une personne passe en ligne et le nombre de fois qu'elle vérifie son compte, etc. ? Si un enfant ou un jeune passe plus d'une heure ou deux par jour sur son portable alors il prend le risque de développer une addiction, des problèmes psychologiques, voire de l'obésité. De plus, il passe à côté de son temps libre, qui devrait être employé à développer son physique (sport) et sa personnalité au contact d'autres enfants et jeunes.
Comment s'en protéger ?
Pour se protéger, il vaut mieux se fier aux adultes de confiance (parents, instituteurs/enseignants) et à leurs amis proches. Les gens qui les aiment et leur veulent du bien vont surveiller leurs réactions, leur excitation, leur anxiété aussi par rapport à leurs relations en ligne et ils apporteront soutien et conseils si cela dérape. L'enfant/le jeune ne doit pas se fier aux belles paroles et aux beaux visages affichés sur les profils, il doit vérifier avec qui il est ami et demander à ceux qu'il connaît s'ils ont rencontré en personne l'individu derrière ce profil. Il vaut mieux installer uniquement des applications pour son âge et s'autodiscipliner.
Le nombre d'enfants victimes de chantage, d'intimidation ou de harcèlement a-t-il augmenté depuis l'avènement des réseaux sociaux virtuels ?
C'est évident, même sans statistiques locales fiables. Avant, le monde de l'enfance était composé de la famille, des voisins, des amis et de l'école. Et il y avait généralement un 'adulte responsable' impliqué dans la supervision du bon comportement des plus jeunes. Aujourd'hui, les parents ont perdu le contrôle et les jeunes savent très bien faire croire aux adultes que tout va bien et qu'ils sont des petits anges très sages. Les prédateurs (adultes et adolescents) le savent et profitent de la naïveté des jeunes internautes.
Internet n'est-il pas une échappatoire à la réalité, comme une sorte de drogue douce ?
Il n'y a pas de drogues douces car le fait qu'une substance (alcool, cigarettes, etc.) ou une activité (jeux d'argent, shopping, jeux en ligne, etc.) soit autorisée en société n'enlève rien à la difficulté de sortir du piège des besoins et des manques créés lorsqu'ils disparaissent. Toutes les dépendances sont des évasions de réalités dures ou simplement ennuyeuses. Lorsque des enfants/des jeunes sont encadrés par des adultes pour pratiquer des activités sportives, artistiques ou une activité sociale ou environnementale, ils se découvrent et restent loin de tous les dangers de la dépendance. Quand la vie est passionnante, la meilleure addiction c'est elle.
Selon vous, quel est le meilleur âge pour commencer à naviguer seul sur Internet ?
Dès l'âge de dix ans, il faut un apprentissage progressif à l'Internet sous supervision et après avoir pris connaissance des sites autorisés pour son âge. En général, les éducateurs de l'enfant (parents et enseignants) ont une idée de la maturité de l'enfant/du jeune et sont de bons guides par rapport à quoi il est prêt à être exposé.
Quels sont les dangers des filtres de beauté sur la santé mentale ?
Les filtres de nos images, bien qu'amusants au premier abord, peuvent vite devenir une illusion, un mensonge, une échappatoire à la réalité. L'apprentissage de la vie en société doit se faire en personne et non à travers un écran. Il est plus facile d'envoyer un texto ou un emoji pour s'excuser mais apprendre à le dire en face-à-face est plus important. Si on fuit devant de petites difficultés comme de dire «Je m'excuse» à une amie, comment réussir à trouver le courage de dire à son instituteur/ enseignant que l'on trouve injuste le traitement accordé à son travail ?