A travers une conférence de presse, avant-hier mardi, le Procureur général près la Cour d'Appel de Dakar, se prononçant sur différents dossiers dont celui dit des «Commandos du Pastef», la maladie d »Ousmane Soko et les manifestations violentes et l'affaire Dr Babacar Niang de Suma Assistance, s'est livré à un réquisitoire à charge. Réagissant à cette sortie, 24h après, des membres de la société civile spécialisé dans la défense des droits humains, tout en relevant que le parquetier est dans son rôle, expriment leurs inquiétudes.
SENGHANE SENGHOR, CHARGE DES AFFAIRES JURIDIQUES ET DE LA PROTECTION DE LA RENCONTRE AFRICAINE POUR LA DEFENSE DES DROITS DE L'HOMME (RADDHO)
«Les Procureurs Généraux donnent l'impression d'être dans une bataille de communication »
« Le point de presse fleuve du Procureur Général de Dakar suivi des communiqués de presse des PG de Thiès, Saint Louis et Ziguinchor m'inquiète. Parce que si la chancellerie a décidé de faire parler les magistrats du parquet qui ont autorité sur tous les représentants du ministère public, du ressort de chaque Cour d'appel, j'en tire la conclusion qu'ils sont envoyés au front alors que leur place dans la hiérarchie fait naturellement d'eux des veilleurs, les contrôleurs de l'action des Procureurs de la République placés sous leur autorité.
En se prononçant comme ils l'ont fait, les Procureurs Généraux ont omis les règles qui sous-tendent les grands principes de la procédure pénale : Le secret de l'instruction, la présomption d'innocence mais surtout les droits de la défense quand on sait que les personnes qu'ils citent nommément ne sont pas dans les dispositions pour donner leurs versions des faits. Ils donnent l'impression d'être dans une bataille de communication qui peut à terme, écorner l'image de la justice.
C'est bien de montrer de la célérité dans la distribution de la justice mais il y a des questions de fond. Aux termes de l'article 27 du Code de procédure pénale al 1 : «Le Procureur général est chargé de veiller à l'application de la loi pénale dans toute l'étendue du ressort de la Cour d'appel.» Or, il nous donne des informations sur des médecins poursuivis à la suite d'une plainte mais ne dit rien sur les 14 vies perdues en mars 2021.
Mieux, le Procureur général de la Cour d'appel de Dakar informe sur l'état d'avancement de la procédure relative aux présumés détournements sur les Fonds force Covid 19. C'est très bien mais nous attendons avec impatience la saisine d'un juge d'instruction sur les dossiers que Mme Seynabou Ndiaye Diakhaté avait transmis au Procureur de la République Serigne Bassirou GUEYE. Il est temps de gérer la perception que les justiciables ont de la justice.
Je m'interroge encore sur le format utilisé. Mais il ne faut surtout pas se voiler la face, les questions qui apparaissent en filigrane dans le discours du Procureur Général de Dakar ne sont pas rassurantes. Le Sénégal a surtout besoin de paix et il est de notre responsabilité de renforcer la cohésion sociale même dans l'application des lois ».