Pour booster la productivité agricole et pour mieux adapter la politique semencière malgache aux attentes des acteurs du secteur, l'heure est à l'approfondissement des connaissances des spécificités des régions agricoles ainsi que des préférences des cultivateurs en matière de semences.
L'étude de référence socio-économique, dont le rapport a été rendu public au début de ce mois de mars à Antananarivo par le Madagascar Business Farming (MBF), dans le cadre du projet baptisé « Recherche participative pour identifier les variétés de cultures améliorées pour la nutrition et la sécurité alimentaire », a permis de savoir davantage sur les cultures prioritaires et leurs caractéristiques variétales dans les régions Vakinankaratra et Androy.
L'objectif principal, selon le MBF, est de pouvoir fournir des semences de qualité aux producteurs agricoles en tenant compte de leurs vrais besoins. « Il est essentiel de connaitre les préférences des producteurs en ce qui concerne les espèces à cultiver ainsi que les caractéristiques variétales. Cinq cultures prioritaires ont été identifiées dans le Vakinankaratra, à savoir le riz, la pomme de terre, le maïs, le soja et la patate douce. Pour l'Androy, ce sont la patate douce, le manioc, l'arachide, le maïs, le niébé et la dolique », a-t-on aussi rapporté.
L'étude a permis de soulever les difficultés dont font face les producteurs concernant la disponibilité en semences améliorées. Les prix des semences améliorées posent aussi problème. Les statistiques établies montrent que seulement près de la moitié des producteurs des deux régions connaissent l'existence de variétés améliorées.
Concernant les attentes de agriculteurs, la maturité précoce et le rendement élevé sont les critères mis en avant. Si la nécessité d'accélérer le développement du secteur semencier à Madagascar a été une fois de plus démontrée suite à cette étude, constat a aussi été fait que la majorité des agriculteurs sont disposés à engager des changements et payer davantage pour accroitre leur productivité et disposer des semences qui s'arriment à leurs besoins.
Pour sa part, le ministère de l'Agriculture et de l'Élevage (MINAE), par la voix de son titulaire, Harifidy Ramilison, a rappelé que la réforme du système semencier malgache est en cours. On sait en outre que la saison agricole 2022-2023 bénéficie d'une campagne de sensibilisation et de distribution de semences de qualité inédite.
Implication du Seed Systems Group
D'autres régions du pays feront aussi l'objet d'étude pour identifier les variétés de cultures améliorées. Côté mise en oeuvre du projet, le MINAE a confié la tâche au Seed Systems Group (SSG). Ce dernier est une organisation à but non lucratif basée en Afrique dirigée par des spécialistes des systèmes semenciers qui ont joué un rôle central dans la sélection de meilleures variétés de cultures et le lancement de plus de 100 entreprises semencières locales dans une quinzaine de pays, dont le Ghana et l'Éthiopie qui sont à l'avant-garde de la révolution verte sur le continent.
Le SSG, actuellement présidé par Dr Joe DeVries, connu surtout comme étant l'un des fondateurs de l'Alliance pour une révolution verte en Afrique, estime que chaque agriculteur de chaque village devrait avoir accès à des semences de haute qualité pour un large éventail de variétés de cultures, et travaille avec les gouvernements et les investisseurs pour en faire une réalité. Rabenasolo Paul, agent de liaison de l'organisation à Madagascar, a noté que l'investissement stratégique dans le système semencier du pays incitera les producteurs à mettre fin à des décennies de baisse de productivité en cultivant des semences à haut rendement et plus résistantes.
Cet ingénieur agronome, spécialiste en technologie et production de semences, dans sa contribution dans le document intitulé « Semences pour la transformation de Systèmes alimentaires dans les pays d'Afrique laissés pour compte», a soutenu qu'avec un investissement de 6,5 millions de dollars, la Grande Ile devrait pouvoir augmenter de 180% ses semences de qualité.
À Madagascar, l'approvisionnement en semences a toujours fluctué en fonction des niveaux de financement des donateurs, et nombre d'agriculteurs sont contraints de recycler les semences des récoltes précédentes. De leur côté, les responsables ont toujours fait face à des difficultés financières pour mener des actions d'évaluation des nouvelles variétés et pour produire des quantités suffisantes de semences de base.
Le projet « Recherche participative pour identifier les variétés de cultures améliorées pour la nutrition et la sécurité alimentaire » devrait donc changer la donne. À savoir que le Centre de recherche et de développement international (CRDI) du Canada assure son financement. Parmi les autres entités impliquées dans sa mise en oeuvre, notons l'USAID, Catholic Relief Services, la Banque Mondiale et la FAO.